30 - Infiltration

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Lorelai se sentait bien. La chaleur des bras de sa mère était réconfortante. Quelques bribes de souvenirs lui revenaient en mémoire. Les nuits qu’elles passaient l’une contre l’autre, les chansons qu’elle lui murmurait pour l’aider à s’endormir, les sourires tristes qu’elle lui adressait. Il restait quand même quelques zones de flous. Elle ne savait plus comment elle s’était retrouvée dehors, livrée à elle-même, seule, sans sa génitrice. Une partie de son passé lui restait totalement inconnu pour le moment, et elle n’osait pas poser de questions à ce sujet pour l’instant. Peut-être plus tard…

La porte de la pièce s’ouvrit dans un grincement sinistre, et Richard Volkër se tenait dans son encadrement. Le visage neutre, son regard se posa sur les deux femmes. Il soupira bruyamment en croisant les bras.

  • Des retrouvailles touchantes oui… Lolithia…

La dénommée ainsi leva la tête vers son propriétaire, attendant sagement les ordres qu’il allait lui donner. C’était la meilleure façon de ne pas éveiller sa colère. Obéir et ne pas poser de questions. Le chef de la section quatre reprit sur un ton légèrement agacé :

  • Lolithia… Dans mon bureau. Tout de suite.

Cette dernière mit fin à l’étreinte de sa fille avant de se lever du lit et de se diriger vers son propriétaire. Lorelai fronça les sourcils, énervée par le fait que Richard traite sa mère de la pire façon possible. Elle cracha en direction de ce dernier :

  • Tu devrais p’t’être apprendre à lui parler autrement, c’est pas un clebs !

L’homme haussa les épaules. Ce que pouvait dire la nu-man lui passait par-dessus la jambe et ne le touchait pas du tout. Néanmoins, il fallait que cette dernière apprenne à rester à sa place. Il se rapprocha d’elle avant de lui asséner une gifle magistrale qui résonna dans la pièce. Lolithia avait détourné la tête, son cœur battant à tout rompre. Elle détestait la violence. Elle détestait quand Richard faisait ce genre de chose. Et elle détestait voir sa fille souffrir ainsi. Lorelai n’avait pas bronché. Elle n’avait pas pleuré. Elle s’était contentée de lancer un regard noir à l’homme qui se tenait devant elle. Sa joue la brûlait, mais elle ne pleurerait pas. Elle ne lui offrirait pas ce plaisir. Le visage neutre de Richard s’orna d’un léger sourire.

  • Les chiens ne font pas des chats, c’est sûr.

A peine termina-t-il sa phrase qu’il retourna aux côtés de Lolithia. Lui prenant le bras, il l'entraîna au dehors de la pièce, refermant la porte derrière lui. Lorelai put entendre le bruit du verrouillage, lui confirmant qu’elle ne pourrait pas sortir d’ici comme elle le voulait.

Ronan était enfin arrivé à destination. Laissant son véhicule non loin de l’Améthyste, il se demandait s’il arriverait à pénétrer le bâtiment facilement. Il savait que Lorelai se trouvait à l’intérieur, mais où exactement ? L’endroit était immense, et il était certain qu’il ne pourrait pas se balader comme il le voulait à l’intérieur. Passer par la porte principale et présenter son badge d’agent de la section cinq était exclu, c’était le meilleur moyen de se faire griller. C’était un peu comme s’il prenait la porte d’entrée et qu’il criait qu’il était là pour récupérer sa petite amie. Il fallait être bien plus discret. Faisant mine de regarder son téléphone, l’agent observait les alentours du bâtiment. Il jetait quelques coups d’œil, vérifiant les différentes entrées. Elles étaient toutes encadrées par des membres de la sécurité d’Elegia, reconnaissables à leurs costumes bleu nuit. Pendant un instant, Ronan se demanda s’il ne pouvait pas délester l’un de ces gardes de son costume. Ce serait bien plus prudent de pouvoir se jeter dans la gueule du loup en étant grimé comme l’un d’eux. L’agent refit le tour du bâtiment de façon plus discrète : il avait remarqué une porte qui n’était gardée que par un seul individu, légèrement éloignée de la vue de tous, dans un renfoncement. Il fallait qu’il fasse ça de façon propre et surtout rapidement.

Son frère lui avait raccroché à la figure, chose qu’il ne faisait jamais habituellement, même lorsqu’ils s’engueulaient tous les deux. Morgan poussa un soupir contrarié, et Eva comprit tout de suite que quelque chose n’allait pas. Sans attendre qu’elle ne lui pose la question, le gouverneur se tourna vers elle, annonçant simplement :

  • Ronan est partit à l’Améthyste. Sa copine est retenue là-bas.
  • L’Améthyste ?
  • C’est le bâtiment principal d’Elegia. Forcément, qu’ils allaient la ramener là-bas. Il doit y’avoir quelque chose comme un BioLab souterrain ou une connerie du genre… Tout du moins, une partie du bâtiment qui doit servir à des trucs pas très honnêtes. Je me demande si monsieur Casey est au courant de ce genre de choses…

Eva ne put s’empêcher de laisser échapper un petit rire nerveux avant de répondre à son interlocuteur.

  • Je pense qu’il est au courant. Sinon, il serait resté à table comme tout le monde pendant la fusillade pendant la soirée du bicentenaire. Mais, coup de chance pour lui, il était partit aux toilettes à ce moment-là. Il est resté bien en sécurité loin des coups de feu pendant que certains se faisait massacrer.

Elle ne put s’empêcher d’avoir un haut le cœur en repensant à cet homme qui l’avait dragué de façon très lourde et qui avait fini la tête éclatée sur la moquette de la grande pièce où se déroulait la soirée. La nu-man secoua la tête pour se remettre les idées en place, avant de planter son regard dans celui, incrédule, de Morgan.

  • Il est aussi dans le coup alors ?

La secrétaire hocha la tête.

  • Oui… Forcément.

A cet instant, la porte d’entrée de l’appartement s’ouvrit, et la silhouette de Karen se dessina dans son encadrement. Cette dernière était accompagnée d’un groupe constitué de membres de la section cinq. Sans aucune gêne, elle entra dans la pièce après y avoir jeté un coup d’œil et s’avança vers le duo, une expression neutre ancrée sur le visage.

  • Eh bien, il semble que nous allons devoir passer à l’action bien plus tôt que prévu. Et tout ça grâce à la petite amie de l’agent Laguna.

Elle se tourna vers Eva et demanda simplement :

  • On à un lieu où la retrouver ?
  • L’Améthyste.
  • Très bien.

Karen s’empara de l’une des armes qui se balançaient à sa ceinture et la tendit à la nu-man. Cette dernière la prit sans même poser de questions, attendant les ordres de sa supérieur. Car à cet instant, Karen n’était plus sa propriétaire, mais sa supérieur en chef. Eva suivrait les ordres, tel un soldat, sans se plaindre. Du moment que cela servait sa vengeance personnelle, elle n’avait aucune raison de ne pas suivre la chef de la section cinq. La femme aux cheveux blancs lança alors d’une voix puissante, qui résonna dans la pièce :

  • En avant !

Et tous ceux qui se trouvaient sous ses ordres se dirigèrent vers la sortie, suivis de près par les membres des deux premières sections. Morgan attrapa le bras d’Eva, la forçant presque à se tourner vers lui. Il demanda de sa voix inquiète :

  • Eva… Vous allez y aller aussi ?
  • Bien entendu. Je ne peux pas laisser passer cette chance de pouvoir mettre une balle dans la tête d’un enfoiré qui joue avec la vie des autres.
  • Je…

La poigne de l’homme se desserra doucement. Le gouverneur ne savait pas du tout quoi faire. Il désirait de tout cœur la suivre, pour pouvoir la protéger. Mais son devoir lui dictait de rester là, en sécurité, et d’attendre la suite des évènements.

  • Je…

Son regard se planta dans celui de sa secrétaire personnelle. Cette nu-man qui faisait toujours un travail exemplaire, et qui aujourd’hui allait se battre pour ceux qu’elle avait perdu. Pour que les erreurs du passé ne se reproduisent pas.

  • Je veux venir avec vous.

Les yeux d’Eva s’écarquillèrent de surprise.

  • Pardon ?
  • Vous m’avez bien entendu. Je vais venir avec vous. On va régler cette affaire ensemble.
  • Mais vous…
  • Je sais. Je suis gouverneur. J’ai des choses plus importantes à faire. Mais pour moi, c’est vous qui êtes plus importante, pour l’instant.

La jeune femme sentit ses joues s’empourprer légèrement, son cœur s’emballa dans sa poitrine. Puis elle reprit ses esprits, et un sourire se dessina sur son visage. Elle murmura doucement à son interlocuteur.

  • Merci.

Ronan grogna entre ses dents. Le costume n’était pas tout à fait à ses taille, et il avait dû serrer la ceinture pour ne pas que le pantalon ne termine sur ses chevilles. Mis à part ce petit détail, le reste lui allait plutôt bien. Le pauvre homme qu’il avait assommé se trouvait dans l’un des conteneurs qui servait de poubelle. Avec un peu de chance, il se réveillerait d’ici quelques heures, lui laissant de la marge pour retrouver Lorelai. L’agent pénétra l’immeuble aussi simplement que ça. Mais il ne savait pas du tout où se diriger. Arpentant les couloirs de façon aléatoire, il suivait simplement le petit point brillant sur son téléphone et qui indiquait qu’elle se trouvait là.

L’homme se plaqua contre un mur en entendant des bruits de pas un peu plus loin. Dans son esprit, il espérait juste que la ou les personnes allaient s’éloigner sans passer par ici. Le coeur de Ronan battait à tout rompre dans sa poitrine. Le bruit des pas sur le sol se rapprochait de plus en plus. La main sur son arme, il attendait, tel un animal prêt à bondir sur sa proie. Il n’entendait plus que ça. Le bruit des pas, son coeur qui tambourinait dans sa poitrine et sa respiration qu’il avait du mal à réprimer.

Au bout d’un moment qui lui parut bien trop long, les pas s’éloignèrent, et avec eux, le gêneur qu’il aurait pu croiser. L’homme poussa un long soupir de soulagement, se passant la main sur son front coulant de sueur. Il ne fallait pas qu’il reste ici trop longtemps. Et il ne fallait surtout pas qu’il laisse Lorelai moisir ici. Se décontractant un peu, Ronan reprit son chemin à travers les couloirs froids de cet endroit qu’il voulait quitter le plus vite possible. Il tourna au détour d’un couloir, puis se retrouva dans l’un des centres de commandement informatique.

Ce fut avec un grand étonnement qu’il découvrit que la pièce était vide. Les gardes et les vigiles n’étaient pas là. Quelque chose clochait, et il ne savait pas quoi. A moins que sa chance insolente n’ait décidé d’autre chose… Il se pencha sur l’un des tableaux de bord virtuels, cherchant un moyen quelconque pour retrouver sa petite amie. Pianotant avec aisance sur le clavier numérique, Ronan abaissa sa garde.

  • Ce n’est pas très poli de venir fouiller comme ça dans nos locaux monsieur Laguna.

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