Nils - course au palais 1

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Après sa leçon d’escrime du lendemain matin, Nils apprit que son père exigeait qu’il vienne au plus vite dans son bureau. Il préféra passer dans la salle de bains pour être présentable : Magnus détestait le laisser-aller et la négligence. Tout devait toujours être impeccable…

Bien lui en a pris. En ouvrant la porte du bureau, Nils remarqua aussitôt que son père n’était pas seul. En plus de l’inévitable Ingo, il vit que le Duc Miquel de Cresse se tenait tout près du roi. Tous trois étaient en pleine conversation à voix basse, et Nils eut l’impression d’interrompre trois conspirateurs en plein mauvais coup.

Magnus fut le premier à lever la tête :

- Ah ! Nils, tu tombes bien ! Nous étions en train de parler de toi… et d’Antonella. Vous vous entendez bien tous les deux, n’est-ce pas ?

- Euh, …oui. Je crois.

Nils ne pouvait pas avouer à son père qu’il avait peiné à s’endormir, les yeux emplis du sourire de la belle demoiselle de Cresse. Magnus poursuivit :

- Très bien. Tu vas passer encore un moment avec elle aujourd’hui. Fais-lui visiter la ville. Elle ne connaît pas Valdemar, conduis-la partout où tu jugeras bon de le faire.

Le jeune homme jeta un coup d’œil au Duc qui semblait ravi de l’injonction de son père. Il trouva assez normal qu’on lui ordonnât de prendre en charge la jeune fille pour que son séjour soit agréable … Mais le ton de Magnus et le sourire un peu trop marqué de Miquel de Cresse lui paraissaient peu naturels. Que lui cachait-on ? Nils balaya ses inquiétudes : il s’agissait de passer du temps avec une fille charmante. Depuis quand était-ce un problème ? Il acquiesça donc, et sur un signe de tête de son père qui lui donnait congé, il ressortit aussitôt du bureau.

Il se rendit à la suite écarlate, frappa à la porte et vit une dame d’une quarantaine d’années, très maigre, lui ouvrir.

- Bonjour, Madame. Je suis Nils de Calabrun, prince de Valdemar. J’aurais souhaité m’entretenir avec Antonella, s’il vous plait.

La femme avait déjà un air pincé, mais soudain, elle eut une expression furieuse qu’il ne s’expliqua pas. Il eut même l’impression qu’elle avait réagi au moment où il avait donné son nom. Mais ce n’était pas possible. Il ne connaissait pas cette femme et n’avait rien fait de mal. Il avait dû se tromper. Elle recula dans les appartements, et Nils resta un moment devant la porte entrouverte. Il perçut des chuchotements, le ton semblait un peu vif, mais il ne distinguait pas les paroles prononcées.

Finalement, Antonella rouvrit la porte en grand. Nils fut frappé par les yeux rougis de la jeune fille.

- Antonella, que se passe-t-il ? Tout va bien ?, s’inquiéta-t-il.

Avec une voix un peu rauque, la jeune fille confirma qu’elle allait bien, mais qu’elle n’avait pas bien dormi. Nils comprit qu’elle aussi avait dû veiller tard, et ressasser la soirée qu’ils avaient passée ensemble la veille. Si elle était aussi troublée que lui, rien d’étonnant à ce qu’elle n’ait pas assez dormi !

Le jeune homme lui annonça qu’il avait pour mission de la divertir toute la journée et lui demanda de se préparer. Il repasserait la chercher une heure plus tard.

Il redescendit à la salle des gardes où il pensait trouver Bernil. Mais le vieux garde n’était pas là, et personne ne put lui dire où il pourrait le trouver. Il poursuivit ses recherches et fila jusqu’à l’aire d’entraînement. Eric se moqua de lui :

- Eh bien, mon garçon ! Tu n’en as pas eu assez ce matin ! Tu veux recommencer ?

- Non merci, Eric ! Je cherche Bernil… Tu ne l’aurais pas vu, par hasard ?

- Non, il n’est pas venu jusqu’ici… Essaie à la salle des gardes.

- C’est par là que j’ai commencé. Je vais voir dans les cachots. Peut-être qu’il fait son inspection.

Nils revint sur ses pas. De retour dans la salle des gardes, le garçon franchit la petite porte au fond à droite de la pièce et commença la descente des marches étroites qui menaient aux cachots. A chaque fois, le colimaçon lui donnait un peu le tournis. A moins que ce ne soit le souffle chaud de la géothermie… C’était un lieu assez désagréable, en tout cas, quelle qu’en soit la cause.

Les cachots du palais étaient un lieu étouffant et insalubre. Des bouches gigantesques, aux extrémités des couloirs, insufflaient un air brûlant, destiné à chauffer toute la partie basse du palais. Les prisonniers vivaient seuls dans des cellules privées, ou bien s’entassaient nombreux dans des cages immenses. Mais pour tous, la chaleur était insoutenable. Et Bernil veillait tout particulièrement à ce qu’ils puissent s’hydrater convenablement pour supporter les conditions de leur incarcération.

La plupart était des ennemis de son père, des nostalgiques des Sept Ducs. Ils s’autoproclamaient «Les Réfractaires». Qu’espéraient-ils ? Un monde meilleur ? On ne pouvait pas nier que Magnus avait réussi le tour de force d’assainir une situation politique catastrophique. Oui, il s’était imposé comme roi et on l’appelait souvent « l’Usurpateur » pour cette raison, mais grâce à lui, chacun pouvait désormais vivre dans des conditions décentes. Auparavant, sous le régime des Sept Ducs, les pauvres étaient affamés, les rues étaient devenues de vrais coupe-gorges, le pays tout entier était livré à des malhonnêtes qui agissaient dans le seul but de s’enrichir. Magnus avait bien des défauts, mais il avait assuré la sécurité de ses sujets, là où il n’y avait plus que du chaos.

Bernil était bien là et donnait des ordres à Tortmond et à Ingmar, les jumeaux roux, deux gars trapus au visage rond, pour fournir de l’eau aux prisonniers. Un système de tuyaux conduisait l’eau chaude qu’on puisait dans les profondeurs de la terre glacée jusqu’aux chambres du palais. Mais les cachots, du fait de leur situation particulière, bénéficiaient d’une citerne indépendante qu’il fallait régulièrement approvisionner.

Bernil leva les yeux et salua Nils :

- Ah ! Tu tombes bien, le joint d’étanchéité est tout abîmé. Il faut qu’on le change rapidement, sinon on risque d’avoir de sérieuses fuites ! Dépêche-toi d’aller chercher Stieg ! Et reviens vite. J’ai appris quelque chose qui te concerne, il faut qu'on en parle...

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