Tonopah ou Frisco ?

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Dès que j’ai coupé le moteur, Emily s’est littéralement jetée sur moi. Il a fallu que je l’arrête pour qu’elle épargne les boutons de ma chemise. Quand elle a vu mon tatouage des Seals, elle a redoublé d’ardeur. Mon jean n’a pas fait le poids et je dois dire que je lui ai facilité la tâche. À ce moment là, j’avais lâché prise de mon côté et fait subir à son corsage le même sort que celui de ma chemise. Comme je l’avais présumé, elle ne portait rien dessous. Nous avons mélangé nos corps pendant quelques minutes, gênés par la console centrale et le levier de vitesses. J’ai attrapé une boite de capotes dans la boîte à gants et je lui ai dit de sortir de la voiture. Je l’ai couchée sur le capot et je l’ai prise comme une bête en rut. Elle criait son plaisir, mais au milieu du désert, elle ne risquait pas de déranger les voisins.

Je suis allé dans la malle arrière prendre une bouteille d’eau. Avec ce soleil, elle était tiède, mais ce n’était pas pour boire. Je me suis rafraichi le visage et le torse avant de lui passer. Elle a fait couler l’eau sur ses seins puis elle s’est grossièrement nettoyée avec un kleenex avant de remonter son jean trempé. J’ai eu une pensée pour le siège en cuir rouge, mais elle a vite été chassée par la marque de ses tétons qui pointaient à travers le chemisier humide.

Quand nous sommes remontés en voiture, nous n’avions pas prononcé une parole. J’ai repris le contrôle de la radio. Était-ce une coïncidence ou prémonitoire, je suis tombé sur « Suicide Blonde » *. J’ai interdit à Emily de changer de station. Elle a fait semblant de bouder en regardant à l’extérieur, mais je m’en foutais.

— Je sais que tu as l’intention de me larguer à Tonopah, me dit-elle, mais je veux continuer avec toi.

— Tu ne sais même pas où je vais !

— Je m’en fous, Tonopah c’est encore au Nevada, et c’est trop près de Vegas.

— Qu’est-ce que tu fuis ?

Je ne sais pas ce que j’aurais fait si elle avait répondu à ma question à ce moment là, mais c’est sûr que les événements auraient sûrement pris une autre tournure pour moi. Au lieu de ça, elle a replié ses jambes et remonté ses pieds sur le cuir rouge du siège et elle s’est mise à sangloter. Alors, comme je ne suis pas une brute, je lui ai dit que j’allais à San Francisco. Elle m’a supplié de l’emmener au moins jusqu’à la frontière de la Californie. La première ville après la frontière, c’est Benton, un bled minuscule au milieu de nulle part. Je n’allais pas lui rejouer le coup du Bagdad Café, mais je ne lui dis pas tout de suite.

— On verra le moment venu, dis-je lâchement.

Le moment n’était plus très éloigné de toute façon, j’avais remarqué un panneau indiquant Tonopah à cinq miles. Comme nous arrivions au niveau des premières maisons, Emily se mit à crier.

— Tourne à droite, tout de suite !

Sans réfléchir, comme je ne roulais plus très vite, j’ai obéi, par réflexe.

— Il y a des flics au carrefour. J’ai vu le gyrophare.

— Et alors, je ne dépasse pas la limite de vitesse. Où est le problème ?

— Peut-être que c’est un contrôle.

— Pourquoi voudrais-tu qu’ils aient placé un barrage dans un trou paumé au milieu du désert ?

— On est proches de la frontière de l’état, non ?

— Il y a encore au moins une heure de route. Tu as quelque chose à te reprocher ? Tu es recherchée ?

— Je ne sais pas, mais je ne veux pas prendre le risque. Tu peux les éviter ?

— Oui, sans doute, en passant par les petites rues, on doit pouvoir éviter le croisement principal et rejoindre la 95.

— C’est ça, fais-le s’il te plait.

— OK, mais il va falloir que tu m’expliques un certain nombre de choses.

À ce moment précis, j’aurais pu changer le cours de ma vie. J’aurais pu lui dire de descendre de ma caisse et la laisser là avec ses problèmes. J’aurais pu aussi tranquillement passer devant les flics et leur expliquer que je ne connaissais pas cette fille, que je l’avais prise en stop à Beatty, ce qui pourrait se vérifier auprès du pompiste, mais au lieu de ça, j’ai contourné le carrefour et j’ai repris la route de la Californie avec cette blonde atomique à mes côtés.

À ce moment précis, la radio diffusait « Should I stay or should I go » **.

* Suicide blonde : titre du groupe australien INXS
https://www.youtube.com/watch?v=Ma4TOv2f_WY

** Should I stay or should I go : titre des Clash
https://www.youtube.com/watch?v=BN1WwnEDWAM

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