La sorcière amoureuse

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Dans une contrée lointaine, si éloignée que nul ne se rappelle de son nom, une légende racontait qu’une famille de sorciers possédait l’étrange pouvoir de changer les êtres humains en poupée de chiffon.

Léonie était la seule survivante de cette illustre famille. La jeune fille vivait seule au fin fond des bois, à l’écart des hommes, appréciant sa solitude. Ses seuls amis étaient un vieux chat noir qui perdait ses poils et un corbeau dont le bec était cassé. Ils étaient très malins et connaissaient le secret de leur maîtresse. Alors ils faisaient en sorte d’éloigner les hommes qui avaient l’audace de traîner dans les parages.

Ce jour-là, le vieux chat dormait au coin du feu. L’hiver était là depuis presque un mois, il n’osait pas mettre le nez dehors. Le corbeau non plus, car il ne voulait pas finir complètement gelé. Quant à Léonie, elle s’occupait de ses tâches habituelles. C’est alors qu’on frappa à la porte. La jeune fille sortit de la cuisine où elle se trouvait. Le vieux chat, près de la cheminée, la prévint en ces termes :

  • Léonie, n’ouvre pas ! Tu ne sais pas ce qui se passera !

Mais Léonie, intérieurement, mourrait d’envie d’ouvrir la porte. Cela faisait tellement longtemps qu’elle n’avait pas vu d’humains. Et tandis qu’elle posa sa main sur la petite poignée, le corbeau la prévint :

  • Léonie, n’ouvre pas ! Tu ne sais pas ce qui se passera !

Sourde aux mises en garde de ses amis, elle ouvrit la porte. C’était un jeune homme grelottant de froid, perdu dans les bois, qui lui demanda humblement le vivre et le couvert. Léonie, l’invita à entrer, refermant doucement la porte sur le froid glacial qui régnait dehors.

Le vieux chat et le corbeau s’étaient retranchés non loin de la cheminée, observant leur hôte discuter avec leur maîtresse. Le jeune homme s’était perdu en chassant. Les gens de son village comptaient sur lui pour rapporter quelques gibiers, car le froid n’arrangeait en rien leur condition. Et il avait accepté. Mais au bout de longues heures, il n’avait rien trouvé. De plus, il s’était perdu.

A peine avait-il fini de conter sa mésaventure que la jeune fille disparut dans la cuisine. Le chasseur avait pris l’une de chaise et l’avait posée près de la cheminée avant de s’y installer. Il regardait le vieux chat et le corbeau, mais ceux-ci ne disaient rien du tout, se contentant de l’ignorer, purement et simplement. Léonie était revenue quelques minutes plus tard avec un plat. Tous deux mangèrent de bon appétit ce soir-là. Le jeune homme repartit le lendemain, la remerciant chaleureusement. La jeune fille en eut le cœur tout retourné. Elle souhaita secrètement qu’il ne revienne jamais.

Quelques jours plus tard, quelqu’un frappa à nouveau à la porte, et tandit qu’elle s’avançait pour ouvrir, Léonie entendit les voix du vieux chat et du corbeau.

  • Léonie, n’ouvre pas ! Tu ne sais pas ce qui se passera !

Le cœur de Léonie s’emballa. Elle savait qu’elle n’avait pas le droit, que la malédiction de sa famille le condamnerait. Et à l’instant où elle tourna la poignée, elle sut qu’il s'agissait du jeune homme. Elle sut qu'elle l'aimait. Lentement, elle ouvrit la porte, dans l'espoir fou de le voir.

Sur le pas de la porte se trouvait une poupée de chiffon. La malédiction familiale venait à nouveau de faire une victime.

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