CHAPITRE 13

4 minutes de lecture

Allongé au sol, tétanisé, le dos douloureux, incommodé par l’haleine fétide de la bête, Gurvan ne pouvait plus rien faire. Il avait échoué, si près du but ! Il allait mourir, tout était perdu.

Au-dessus de lui, la masse imposante de la patte du monstre se découpait et lui obscurcissait la vue. Il ferma les yeux et attendit la fin, quand soudain un hurlement grave déchira le silence. Un bruit violent retentit, le sol trembla.

Gurvan ouvrit les yeux. Devant lui, le dragon gisait sur le flanc, une flèche plantée au milieu du front. Sa bave visqueuse et puante coulait lentement de sa langue pendante. Il râla de longues secondes et ferma à jamais ses yeux terrifiants.

Juste après, une jeune fille sortit de derrière la bête, un hennin sur la tête, un arc à la main, un grand sourire aux lèvres. Deux longues tresses brunes encadraient son visage tout rond. Ses yeux noisette pétillaient. Gurvan reconnut la princesse du château, celle-là même qui appelait à l’aide la première fois. De loin, il n'avait pas remarqué qu'elle avait à peu près le même âge que lui. Il rougit, intimidé.

La jeune fille s’avança vers lui et tendit la main.

  • Bonjour, fit-elle d’une voix douce. Moi, c’est Alice.

Gurvan essuya sa main moite contre son pantalon et la lui serra. Au bout d’une poignée de mains aussi interminable que gauche, Gurvan bredouilla.

  • B..Bonjour mademoiselle. Moi, c’est Gurvan. Euh... merci… de m’avoir sauvé.
  • Je t’en prie, c’était un plaisir, sourit Alice en le fixant droit dans les yeux avec son air malicieux.

Gurvan n’osait pas regarder la jeune fille en face. Tout à coup, il sentit les larmes monter, tenta de les contenir mais n’y parvint pas. Il s’effondra devant elle et pleura comme un enfant. Alice s’assit à côté de lui et passa le bras autour de son épaule.

  • Que se passe-t-il, Gurvan ?

Gurvan apprécia le contact chaleureux de la jeune fille. Il ravala ses sanglots et parvint à mettre des mots sur sa tristesse.

  • J’ai… j’ai échoué. Je ne suis pas parvenu à te sauver. J’ai honte. Voilà. J’ai honte.

Alice embrassa Gurvan sur la joue. Le jeune garçon, troublé, sentit son coeur battre la chamade.

  • Tu n’as pas à avoir honte, reprit-elle. Tu sais, les filles peuvent se battre aussi bien que les garçons ! Et puis, tu as été très courageux !
  • Un courage qui n’a servi à rien ! Tu as très bien réussi sans moi.
  • Détrompe-toi ! Cela faisait longtemps que je cherchais à me débarrasser de cette sale bête. Sans toi, le dragon ne se serait pas découvert, il serait resté sur le toit et je serais restée prisonnière à tout jamais. Grâce à toi, je suis enfin libre, je vais pouvoir rentrer chez moi. C’était ma dernière épreuve.

Gurvan, frappé par la révélation, resta coi quelques instants, il réalisa qu’Alice était dans la même situation que lui, prisonnière de cette forêt magique !

  • Attends… tu n’es pas d’ici ? Comment es-tu arrivée dans ce château ?
  • Oh c’est une longue histoire, tu vas me prendre pour une folle…
  • Raconte toujours !
  • Bon, eh bien je me suis perdue pendant une partie de cache-cache, j’ai sauvé un poulpikan coincé au fond d’un puits, il m’a offert un arc et des flèches. Ensuite, j’ai rencontré un écureuil qui m’a demandé de solutionner un épineux problème de noisettes, il m’a dit que je devrai vaincre le dragon pour sortir de la forêt. Puis je suis arrivée ici, le dragon m’a attaquée et je me suis réfugiée dans la tour. C’est idiot, non ?
  • Pas le moins du monde.

Gurvan raconta à son tour son aventure. Le Hêtre de Ponthus, l’épée coincée dans sa racine, le pont qui parle, sa première visite au château, son gros coup de fatigue, le fantôme qui le traîne en arrière, l’incendie et le tonnerre, le pont, pour la deuxième fois et son arrivée sur l’esplanade.

  • Nos histoires sont très similaires, à part le coup du fantôme, de l’incendie, et du tonnerre, commenta Alice. Une mise à l’épreuve de notre gentillesse, un défi à notre intelligence. Et le dragon à la fin.

Elle resta songeuse quelques instants et ajouta :

  • Dis, penses-tu que la dernière épreuve était en fait...
  • Une épreuve commune ? proposa Gurvan. Je me disais la même chose.
  • Je pense que c’est ça. On a vaincu le dragon ensemble, on doit pouvoir se libérer ensemble.
  • Alors, cherchons la sortie ensemble !

Alice et Gurvan se levèrent et parcoururent la propriété à la recherche de la sortie. Ils inspectèrent chaque brin d’herbe à la recherche d’une trappe cachée, fouillèrent le château de fond en comble et ressortirent, bredouilles et découragés.

Ils étaient sur le point d’abandonner lorsque le regard de Gurvan fut attiré par une ficelle rouge accrochée au tronc d’un arbre, en lisière de la forêt. Il en avisa Alice et tous deux se rapprochèrent pour observer cette découverte. Le fil tendu se prolongeait d’arbre en arbre au creux de la forêt.

  • La sortie est par là, se réjouirent-ils tous les deux en même temps, avant de pouffer ensemble, amusés d’avoir pensé à la même chose au même moment.

Ils suivirent la piste consciencieusement et parvinrent en vue d’une cabane en rondins que Gurvan connaissait bien. La ficelle menait directement à la porte.

  • La cabane de la grand-mère aveugle ! s’exclama-t-il.
  • Ah, toi aussi tu l’as vue ? demanda Alice.
  • Oui… Je pense qu’elle a des choses à nous dire.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Caiuspupus ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0