Nouveau chapitre

3 minutes de lecture

Bertrand raconte :

Amandine avait certainement estimé qu’elle avait été trop loin en faveur de Guillaume, et qu’il lui fallait rééquilibrer ses interventions. Elle se présenta donc chez moi, et je lui offris de partager mon repas.

Elle semblait de bonne composition, et paraissait avoir digéré l’épisode Natacha.

Calée au fond du canapé, elle entreprit de me questionner :

— Tu as terminé d’écrire ton roman ?

— Pas eu le temps.

— Tu veux qu’on le continue ensemble ?

J’étais sceptique, je ne souhaitais pas partager les idées intimes qui me venaient à l’esprit lorsque je concevais une suite coquine à un épisode. J’étais capable de pondre de la pornographie, si cela s’imposait, mais je me refusais à explorer devant quelqu’un le fantasme personnel qui l’avait permis. Par contre, je n’étais pas opposé à analyser ceux d’une femme.

— Pourquoi pas ?

Amandine enleva son tee-shirt, et sa jupe, puis s’allongea sur le lit, les mains derrière la tête.

— Nouveau chapitre, tu me fais tout ce que tu veux ou presque. C’est moi qui écrirais le texte à la fin.

J’étais piégé, car je devais inventer quelque chose de peu commun, alors que tout avait déjà dû être imaginé en la matière. Et puis, je ne souhaitais pas faire trop détaillé, version porno à vendre dans les kiosques des gares.

Je regrettais de ne pas avoir Léa sous la main pour me conseiller. Je suis convaincu qu’elle aurait été capable de me dépanner, mais moins sûr qu’elle soit d’accord pour que j’utilise ses suggestions avec Amandine. Un petit froid s’était installé entre nous depuis une certaine pendaison de crémaillère.

J’aimais les femmes, et je m’en suis déjà expliqué, mais mes techniques amoureuses étaient plutôt sommaires. J’étais du genre omnibus qui explore toutes les destinations, en s’arrêtant un instant à chaque gare, sur un parcours fléché à l’avance. Cet itinéraire semblait offrir toutes satisfactions à mes partenaires, et je ne voyais pas l’utilité d’en changer. Comme je ne restais avec elles que quelques jours, avant de les quitter, le problème de la routine ne se posait pas.

Léa avait depuis belle lurette renoncé à me laisser conduire, comme elle disait, et j’obtenais avec elles des sensations sexuelles intenses que j’étais bien incapable de me procurer avec les autres femmes.

Le cas Amandine devrait se traiter à part, car elle avait bénéficié de tout ce qu’elle appelait « les sévices » relatés dans mon roman. Les premiers chapitres du texte formaient un recueil fantasmé des pratiques sexuelles trouvées dans des ouvrages. Ceux-ci provenant des meilleurs auteurs que je dévorais depuis des années. Et Amandine devenait l’héroïne expérimentant ces fantaisies, ce qui n’avait pas manqué de lui plaire lors de sa lecture. À tel point qu’elle avait souhaité les vivre avec moi.

Mais maintenant, je constatais la déception dans ses yeux. Elle avait réellement cru que j’allais spontanément lui délivrer une séance d’extase inédite.

Je fus sauvé par la sonnerie du téléphone d’Amandine. Elle décrocha.

Je sus que c’était sérieux quand je la vis commencer à se rhabiller.

Je ne perçus pas la conversation, mais à la voix, je compris que c’était Martha qui appelait.

Je l’entendis dire : « tu es sure », plusieurs fois.

Après avoir raccroché, elle se tourna vers moi :

— C’était Martha.

Elle m’a transmis des bruits qui courent dans le milieu.

Selon des informations non confirmées et peu crédibles, Rolando ne serait pas mort. Cela a circulé bien qu’il n’ait donné aucun signe de vie à ses anciens adjoints. Ses putes, tu as pu le constater, sont totalement livrées à elles-mêmes.

Il aurait été vu, mais c’est tout du « aurait », conduisant un go fast rempli de drogue en provenance d’Espagne. Martha ne croit pas que tout cela soit crédible, mais elle tenait à nous en faire part.

Elle est actuellement en couple avec Bartho, l’un des anciens proches de Rolando. Elle m’a dit qu’il lui semblait que l’on se méfiait d’elle. Aussi, quand elle me téléphone, c’est avec un appareil qu’elle cache dans la journée.

L’humeur badine d’Amandine avait bien disparu.

— Bertrand, qu’est-ce que tu en penses ?

— Rien, Rolando vivant, c’est impossible. Mais qu’est-ce que je vais raconter aux filles demain, car elles vont certainement me poser des questions ?

— Cela te fournira une occasion pour rendre visite à Natacha ?

— Natacha fait de gros progrès en français. Et toi, cela va te fournir l’occasion de rendre visite à Guillaume ?

— Tu es vraiment bête.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Harimax ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0