La taupe

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Bertrand raconte :

Il fallait se rendre à l’évidence. Rolando était particulièrement bien renseigné sur nos faits et gestes. J’avais emprunté un appareil capable de détecter tous les signaux qui pouvaient transiter dans une pièce d’habitation, et en particulier les micros-espions. J’avais inspecté toutes les maisons où logeaient les membres de la famille de Flora, et je n’avais rien trouvé. Les fuites provenaient donc d’ailleurs.

J’avais fait le tour de toutes les personnes susceptibles de renseigner Rolando, et je ne pouvais détacher mes pensées de Rosaria qui était la seule de notre entourage à pouvoir disposer de ces informations.

Rosaria était une amie d’enfance de Flora, qu’elle avait soutenue dans les moments très difficiles.

Elle avait surtout aidé Flora dans les années précédant son mariage, et elle avait ensuite participé à l’éducation de ses enfants. Elle était devenue sa confidente, et elle l’aidait à résoudre ses problèmes personnels.

Rosaria faisait partie de la famille ; les frères et sœurs l’adoraient et l’appelaient tata Rosa.

Il semblait impossible qu’elle soit la taupe, mais personne d’autre ne pouvait jouer ce rôle.

Nous savions tous qu’elle avait placé sa vieille mère dans une maison de retraite, et qu’elle lui téléphonait plusieurs fois par jour.

Flora avait bien connu sa maman, et lui avait soutenu le moral à plusieurs reprises lors de son entrée dans sa précédente maison de retraite. Mais la santé de sa mère se dégradant, Rosaria devenait maintenant sa seule interlocutrice et son seul soutien. Elle devenait sourde et n’avait plus toute sa tête, disait-elle à ma mère.

Elle l’avait changé de maison de retraite pour qu’elle soit mieux soignée, avec une chambre où elle était seule. Et Rosaria louait la gentillesse des nouvelles infirmières.

J’avais demandé à Flora de bien vouloir me répondre sur un point précis :

— Flora, quand Amandine vous a téléphoné pour vous informer que nous allions donner l’assaut à la maison aux volets verts, Rosaria était-elle à vos côtés ?

— Oui, elle terminait de laver la vaisselle.

— Elle a donc tout entendu ?

— Non, mais je lui ai expliqué ce qui se passait, et elle m’a dit qu’elle allait prier pour que tout se déroule bien.

— Et elle a quitté la pièce ?

— Oui, je crois, la vaisselle était finie.

— Merci, Flora.

Amandine refusait de croire que Rosaria puisse trahir. J’étais beaucoup plus sceptique qu’elle, aussi je souhaitais vérifier une chose. Et je demandais à Amandine de m’aider.

Alors que Rosaria terminait une conversation avec sa maman, Amandine lui demanda de venir à la cuisine. Ce qu’elle fit après avoir déposé son portable sur la table. Je me précipitais pour vérifier dans la liste des communications le numéro qu’elle venait d’appeler. Je constatais que ce numéro revenait régulièrement et qu’il était appelé plusieurs fois par jour. C’était un numéro fixe.

Rolando étant mort, ce n’était donc pas lui qui exploitait ces informations.

Je songeais à donner de fausses indications à Rosaria, pour tromper nos ennemis.

Il n’y avait pas une urgence à sauver la mère, car tant que sa fille n’était pas officiellement démasquée, elle ne risquait rien, à part évidemment un manque de soins. Mais l’intérêt de la bande de feu Rolando consistait à la maintenir en bonne santé pour éviter que Rosaria ne se retourne contre eux si elle ne répondait plus.

La question qui restait sans réponse : Quels intérêts les anciens adjoints de Rolando auraient-ils à continuer à s’acharner sur Amandine et ses sœurs ? Nous avions vu qu’ils avaient emmené Olivia, mais nous ne connaissions pas leurs objectifs.

J’étais tenté de croire qu’ils n’étaient pas encore au courant du décès de Rolando, ce qui serait surprenant, car Rosaria en avait été informée.

Le numéro de téléphone correspondait à celui d’une villa dans les environs du village d’Eguilles, ce n’était donc pas celui d’une maison de retraite médicalisée.

Faire passer de fausses informations à Rolando pour essayer de le piéger, ou sauver leur otage pour obtenir de Rosaria la révélation de tous les dessous de l’affaire qu’elle connaissait. Il y avait une vie en jeu qui risquait de disparaître si nos plans tournaient mal.

Nous étions comme dans un jeu d’échecs, où le gain d’un petit pion pouvait se révéler déterminant pour la suite de la partie. Encore fallait-il le prendre au bon moment.

Nous nous sommes rendus dans la villa sensée abriter la maman de Rosaria. Un couple nous reçut cordialement. Moyennant finances, et disposant de toutes les autorisations administratives, ils accueillaient une personne âgée sous leur toit. Nous dûmes attendre pour la voir, car une infirmière était en train de lui prodiguer les soins quotidiens. L’homme nous confia que sa fille pouvait joindre sa mère à tout instant, car on posait à côté d’elle un téléphone sans fil.

Je retournais à mon domicile pour récupérer mon testeur de micros-espions, et je constatais que la ligne téléphonique était piratée. Cela nous permettait de comprendre le mécanisme, mais pas de savoir qui en bénéficiait.

La mère de Rosaria semblant bien traitée, nous décidâmes de ne rien modifier, et d’éviter de la renseigner. Manifestement, elle n’était pas au courant des activités de Rolando.

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