Journal de Clara

4 minutes de lecture

24/08/2022

L’échange d’hier me laisse un arrière-goût amer. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça. Chaque fois, je me laisse convaincre et je le laisse s’approcher alors que je ne devrais pas. Et chaque fois je finis par le blesser parce que je ne sais pas réagir proprement quand ce qui se passe n’était pas prévu. Je lui en veux toujours pour l’autre jour. Pourtant, j’ai l’impression de ne pas réussir à lui en vouloir. Mais c’est mieux comme ça, il faut qu’il arrête de s’accrocher. Je ne vois même pas ce qu’il peut aimer chez moi. Il ne reste plus rien à aimer. Je vais partir et après je vais m’en vouloir de le blesser… Je m’en veux déjà… Enfin, ça ne change pas de d’habitude.

Et Mamy qui s’est mise à faire attention à tout ce que je fais maintenant que Théo lui a parlé, je ne peux plus avoir la paix. Manquerait plus qu’elle en reparle à Papa. Y a que Papy qui ne dit rien. Mamy m’a proposée un psy que je pourrais consulter à la rentrée, elle a des bonnes adresses à Nantes. Comme si je voulais me retaper des mois de psy… C’était assez chiant la première fois. J’ai pas besoin de psy, j’ai besoin qu’on me foute la paix.

Et Théo qui passe son temps à vouloir m’aider… Putain, faut laisser les gens tranquilles un peu, j’ai rien demandé moi. Qu’il s’occupe de ses potes avant de s’occuper de moi. Je sais pas qui de ses potes ou de moi est le plus toxique pour lui.

Pourquoi est-ce que l’humain doit toujours détruire les autres ? Détruire ceux qui ne le sont pas encore ? Théo mérite le monde mais c’est le monde qui lui marche dessus. Parce qu’il le laisse faire. Il le demande presque. Ou peut-être que c’est moi qui suis injuste ? Après tout, quelle différence est-ce que ça fait ?

Il ne faut pas qu’il s’embête avec moi. Pourquoi est-ce qu’il s’accroche comme ça ? Je ne m’attendais pas à ce qu’il s’acharne pour me parler. Qu’est-ce qu’il essaye de compenser ?

Je devrais le savoir pourtant… Ses parents. Ça a toujours été ça, il a besoin de gens proches pour compenser. Il ne lâche pas Thomas d’une semelle.

Et pourquoi est-ce que je cherche encore à l’analyser ? Pour échapper à ce qui me hante en cherchant ce qui hante les autres ? Je me prends pour qui ? Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ?

Heureusement, je pars bientôt, je vais pouvoir mettre tout ça derrière moi. Pour de bon.

Est-ce que je dois prévenir Théo du jour de mon départ ? Il ne me laissera jamais la paix si je lui dis. Le meilleur pour moi ? Le meilleur pour lui ?

Vois comme je n’ai pas besoin de psy, je me débrouille très bien toute seule.

Belle ironie.

C’était une erreur d’accepter qu’on se mette en couple. Il n’aurait pas eu si mal si j’avais réussi à garder mes distances comme je le faisais avant. Il fait trop facilement parler les gens…

Avec lui, la vie semble plus simple, plus lumineuse. Evidemment que quand je vois une oasis je m’y arrête… Je suis un corbeau et il est le soleil… Un nous n’aurait jamais dû exister et n’existera plus.

Pourquoi est-ce que ça m’attriste ? Je l’ai toujours su. Et une nouvelle vie m’attend dans quelques jours.

Ce n’est pas juste de nous laisser finir sur hier, non ? Mais je n’ai pas la force d’autre chose. Je n’aurais pas la force de le confronter à nouveau. Je lui laisserais un mot, peut-être même que Mamy lui parlera et l’aidera à passer au-dessus de tout ça. Oui, Papy et Mamy seront là pour lui, ils l’adorent tous les deux. Et moi, je m’enfuis.

Parce que, comme le dit Jean Anouilh, il n’y a qu’un seul remède à l’amour et c’est la fuite.

Le dramaturge préféré de Maman… Toute la splendeur bordelaise… Bordeaux me manque. Mais l’air y est devenu trop lourd pour moi, trop plein de souvenirs que Papa et moi avons ressassés tant de fois… Je crois que c’est ça que je cherche sur ma nouvelle vie : de la légèreté, un air pur et léger. C’est peut-être ce que d’autres trouvent à Bordeaux. Moi, que je sois là-bas ou ici, à Montpellier, je ne respire plus. Nantes, c’est ma seconde chance. C’est ma tentative de vie sans Maman. Oserai-je reprendre le théâtre ? Ça fait 3 ans que j’attends ce moment, ce moment où je pars sans regarder derrière.

Hors de question de laisser des choses me poursuivre. Théo compris.

Je dis que je ne reviendrai pas mais ce n’est pas sans amertume.

Il faut que je finalise mes affaires. Ma valise est déjà prête depuis longtemps. Il faut que je réorganise les affaires dedans. Que je fasse la liste de ce que j’ai à prendre chez Papa quand je vais y passer samedi soir. Et dimanche, le départ. J’ai hâte.

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