La découverte

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Après avoir quitté l'étrange boutique tenue par un homme encore plus étrange, Emma était rentrée chez elle, comme dans un état second. Elle s'était déshabillée et couchée dans son lit, serrant la liasse de billets dans sa main, comme si elle avait peur qu'ils ne disparaissent. Elle ne se souvenait pas avoir possédé autant d'argent d'un coup.

Au matin, lorsqu'elle avait ouvert les yeux, elle avait soufflé de soulagement en se rendant compte qu'elle avait toujours l'argent en sa possession. Elle rangea soigneusement le contrat et commença à honorer ses dettes. Elle avait hâte de ne plus être plâtrée pour pouvoir travailler de nouveau et ainsi rembourser la somme empruntée. Emma n'était pas à l'aise avec la solution qui lui permettait de s'en sortir, mais elle n'allait certainement pas s'en plaindre.

Les semaines passèrent, et Emma oublia.
Elle reprit son travail, et un beau matin, elle envoya une enveloppe pour rembourser son emprunt. Il ne lui vint même pas à l'idée de se rendre en personne à la boutique luxueuse : elle avait été trop mal à l'aise la première fois, et elle n'avait pas vraiment envie de se retrouver de nouveau face à l'homme étrange.

Il s'était peut être monté parfaitement aimable, mais il y avait chez lui quelque chose qui l'avait inquiétée. Comme s'il n'était pas tout à fait ce qu'il prétendait.

Un soir où elle avait laissé son esprit divaguer, elle avait décidé que l'homme avait le profil type pour être un style de tueur à gages : il paraissait normal mais il pourrait se montrer mortellement dangereux si le besoin s'en faisait sentir.

Cette vague idée ne quitta jamais vraiment ses pensées, sans même qu'elle ne s'en rende compte. Et maintenant qu'elle n'était plus dévorée par la peur de se retrouver à la rue, elle commençait à se demander si signer le contrat de cet homme avait été une bonne idée.

Elle n'avait toujours pas été contactée pour le service qu'elle devait, et puisqu'il ne la connaissait pas, elle se demandait laquelle de ses compétences il aurait besoin.

Un soir, alors qu'Emma ne parvenait pas à trouver le sommeil, elle se leva et sortit la chemise immaculée contenant le contrat qu'elle avait signé.

Les mains un peu tremblantes, elle étala les feuilles sur sa table et commença à les lire avec soin. Elle avait besoin de se rassurer quelque part. De vérifier qu'elle était en sécurité, qu'elle ne risquait plus rien.

A la première lecture, elle retrouva les termes énoncés lors de sa soirée étrange. Elle reçevait de l'argent pour honorer ses dettes, qu'elle pouvait rembourser dès qu'elle en avait la possibilité. Il n'y avait pas de limite de temps, comme si l'argent en lui-même n'avait pas d'importance.

En échange, elle s'engageait à fournir un service puisqu'elle n'avait rien à vendre. Un peu de son temps dans un domaine qu'elle maîtrisait.

Le contrat précisait que si elle ne souhaitait pas accéder à la demande du client demandant le service, elle pouvait refuser en toute liberté. Dans ce cas, elle était toujours redevable d'un service, qui pouvait lui être demandé à n'importe quel moment.

Emma soupira. A première vue, les choses étaient simples. Et bien trop alléchantes.

En voyant une ligne sombre en bas de la feuille, elle fronça les sourcils. Elle plissa les yeux, et blêmit : la ligne n'en était pas une. C'était juste une ligne en minuscules caractères.

Fébrile, elle fouilla ses tiroirs jusqu'à trouver une loupe, espérant que ça soit suffisant pour déchiffrer les lettres microscopiques.

La jeune femme eut besoin d'un long moment pour réussir à déchiffrer le tout. Et lorsqu'elle eut fini, elle resta immobile, les yeux dans le vague, choquée.

C'était totalement surréaliste.

"Si le contractant n'a pas honoré son service dû dans un délai de six mois après la signature, il cède son âme au prêteur initial".

Un instant, elle crut à une monstrueuse plaisanterie. Elle ne pouvait pas réellement céder son âme après tout...

Un coup d'oeil sur le calendrier la renseigna : voilà quatre mois qu'elle avait signé ce maudit contrat. Et personne ne l'avait contactée pour ce fichu service mystérieux.

Emma était une jeune femme pratique. C'était cette qualité qui lui avait permis de s'en sortir sans trop de mal dans un monde en perdition pendant toutes ces années. Elle était totalement autonome et habituée à se débrouiller seule.

La raison lui disait que c'était juste une plaisanterie stupide. Il était impossible de céder son âme. Il n'y avait même pas de preuves de l'existence de l'âme !

C'était peut être une formulation idiote signifiant autre chose. Elle ne savait pas vraiment quoi, mais ça n'avait probablement pas le même sens que celui qu'elle avait imaginé...

A force de se poser des questions et de s'en rendre malade, Emma prit la décision de se rendre à la fameuse boutique dès le lendemain. Elle demanderait des comptes à l'homme mystérieux, et elle serait fixée.

Elle était persuadée qu'elle en rirait dès qu'elle serait de retour chez elle. Elle s'imaginait déjà se reprocher sa stupidité et son imagination bien trop fertile...

Malgré un fond d'inquiétude qu'elle ne pouvait pas chasser, Emma passa une bonne soirée. La pochette blanche du contrat la narguait, mais elle réussit à oublier l'épée de Damoclès qui semblait planer au dessus de sa tête.

Le lendemain, dès l'aube, elle était prête à partir de chez elle. Contrat en main, elle se rendit à l'adresse de la boutique.

Il n'y avait plus rien.

L'endroit était désert. Il n'y avait plus les objets en vitrine, plus l'écriteau proposant des solutions. Les lumières étaient éteintes, et une légère couche de poussière couvrait les vitres.

Emma sentit son souffle se couper. Il n'y avait pas la moindre adresse de déménagement, pas le moindre signe de vie.

Elle resta un long moment devant la vitrine qui avait changé sa vie. Elle avait cru à un miracle, mais ça n'avait été qu'un piège visiblement. Et elle était tombée dedans.

Elle se souvenait parfaitement d'avoir pensé sur le moment que la proposition était trop belle pour être vraie, et l'endroit désert lui prouvait bien évidemment qu'il y avait eu une contrepartie qu'elle n'était pas prête à entendre.

Emma rentra chez elle à pas lents. Elle se sentait comme anesthésiée, détachée de tout. Ce ne fut qu'une fois dans son petit cocon qu'elle reprit ses esprits.

Elle savait qu'elle avait promis de ne pas parler de son contrat, mais elle pouvait toujours consulter un avocat. Se renseigner si une telle chose était légale.

Cette fois, malgré toutes ses ressources et sa force de caractère, Emma ne pourrait pas s'en sortir seule. Elle ne voulait pas prendre le risque de voir l'homme inquiétant débarquer un beau jour chez elle pour exiger... son âme.

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