Chapitre 9 - Le palais

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La première pensée qui traversa l’esprit de Lissandru et Fiona fut : « Mais c’est immense ! »

En effet, le palais qui se trouvait devant eux, s’élevait comme la tour de Raiponce. Le château était entouré de murailles qui devaient faire la taille de trois chênes centenaires, et les fortifications ne s’arrêtaient pas là. Autour des murailles, des douves avaient été creusé, et l’eau s’infiltrait comme une impasse. A l’intérieur de la « cité », encore des murailles ! Le palais, qui accueillait une ville entière, était divisé en trois partie : la partie royale –là ou ils se dirigeaient-, les quartiers les plus riches, et en dernier, les pauvres, qui étaient les plus proches de l’extérieur. Si le fort se faisait attaquer, ce serait les pauvres qui mourraient en premier. Fiona et Lissandru trouvait cela à la fois horrible et stratégique.

Quand ils entrèrent par le quartier des pauvres, les hommes, femmes et enfants, réclamèrent au prince des biens, de l’argent, pour les aider à surmonter la famine et la maladie. Mais le prince les ignora, comme le gouverneur, les soldats, et les enfants. Mais ces derniers eurent plus de mal à ne pas avoir pitié d’eux. Quelque part, ils se ressemblaient.

Un homme, amaigri et sale, s’accrocha à la cape blanche du prince, complètement désespéré.

- Mon prince, aidez-moi ! La famine nous amène la maladie. Daignez-nous offrir de quoi survivre, je vous prie !

Le prince lui jeta un regard de dédain, et lui enfila un coup de coude qui le fit tomber à la renverse. L’homme ne se releva pas, et fut écraser par d’autre pauvre. La troupe continuèrent leur route et passèrent par le quartier des riches, ou là encore, les hommes et femmes furent aux pieds du prince. Mais les réclamations et compliments sonnaient bizarrement. On aurait dit que dans le timbre de leurs voix, de la haine et de l’envie essayaient de s’échapper. Ceux-là étaient orgueilleux : les enfants furent effrayés par ces masques de clown que portaient les richards.

Ce fut avec soulagement qu’ils arrivèrent au quartier royal, et que les soldats saluèrent le prince. Le garçon descendit de son cheval, un soldat l’amena à l’écurie, tandis que le gouverneur et les soldats amenèrent seuls, les chevaux. Le prince tendit une main à Fiona pour l’aider à descendre : il lui souriait. Gêné, et sous le regard dur de Lissandru, Fiona lui offrit sa main et il l’aida à poser pieds à terre. Lissandru se débrouilla tout seul, comme un grand.

- Excuse-moi, jeune garçon, mais la coutume veut que les femmes soient escortées lors de leur descente à cheval pour ne pas se salir ou s’humilier.

Tes excuses ringardes tu peux te les garder, voulut grommeler Lissandru, sans toutefois le pouvoir.

Un homme débarqua de par la porte principale du palais. Il était immense, plus grand qu’un cheval, barbu, avec un regard jovial, des joues toutes roses, et une couronne d’or sur le haut de la tête. C’était le roi, et il accueillait avec joie son fils, le prince, revenu d’un séjour difficile.

- Mon très cher fils, quelle joie de te retrouver parmi nous ! Lança-t-il en l’enlaçant.

Le prince ne semblait pas apprécier l’étreinte de son père.

- Je suis de retour, annonça-t-il tout simplement, d’un ton ferme.

Le roi acquiesça, et leva les yeux vers les deux inconnus : les enfants.

- Qui sont-ils ? S’enquit le roi.

- Deux enfants que j’ai trouvé dans le village des terres de brumes, père, informa le prince, ils sont mal en point, et je souhaiterais les accueillir pour un petit temps afin qu’ils se rétablissent.

Derrière ses mots se cachaient quelque chose de plus terrible ; Lissandru le ressentait. Ces paroles étaient fausses, et renfermait une dure réalité que le prince souhaitait montrer aux deux enfants. Mais quoi ? Le garçon n’en savait rien, et il espérait que cela ne ravive pas les effroyables souvenirs de Fiona. Sa sœur n’avait plus besoin de se rappeler du cirque, ni de toutes les tortures commises là-bas ; ces temps étaient révolus !

- Fort bien, jeunes enfants, bienvenu en mon saint royaume, les accueillit le roi, tout sourire aux lèvres, Gil, amenez ses enfants dans des chambres, et faites leur prendre un bain…

Il murmura quelque chose à l’oreille de Gil, d’un air sombre. Le gouverneur déglutit, avant d’acquiescer, et de demander aux enfants de le suivre bien sagement. Hésitants et méfiants, Fiona et Lissandru suivirent Gil dans les couloirs de l’immense palais. Les hauteurs des plafonds, les immenses portraits des anciens rois et reines, les nombres de pièces toutes plus inutiles les unes des autres, donnèrent le tournis aux deux enfants.

Gil s’arrêta devant une chambre, et il ouvrit la porte.

- Voici la chambre de monsieur. Mademoiselle, si vous voulez bien…

- Fiona ne dors pas avec moi ?! S’indigna Lissandru, qui empêchait le gouverneur de s’approcher.

- Chaque personne possède sa chambre, monsieur. Il en va de même pour mademoiselle, mais n’ayez crainte. Elle ne sera qu’à une chambre de la vôtre.

Lissandru ne voulait pas céder. Sauf que la main de Fiona se posa sur son épaule pour le rassurer.

- Ne t’inquiètes pas, au pire, on se rejoindra pour pas rester seule, pas vrai ?

- ça m’angoisse quand même de te laisser toute seule…

- Je reviens juste après, l’assura Fiona en suivant de près Gil.

A contrecœur, il rentra dans sa chambre pour constater de la grandeur de la salle.

- C’est trop grand pour moi ! S’exclama-t-il choqué, et profondément outré. Donner une chambre par personne, mais je rêve ! On peut installer une famille de sept dedans.

Après s’être plaint, Lissandru visita un peu les lieux. Il y avait un immense lit, assez grand pour trois personnes, un immense bureau, une grande armoire qui touchait le plafond, un tableau représentant un félin sous l’orage, et un tapis qui faisait la taille de la pièce, brodé de bleu océan. Les murs étaient tapissés de la même couleur, avec des symboles de foudre par endroit.

Faut croire que les chambres ont des thèmes maintenant…. C’est beau la richesse, grommela le garçon en ouvrant une porte qui menait à une salle de bain de la taille d’une chambre.

La baignoire était très moderne, d’un blanc de marbre magnifique. Les trois lavabos étaient luxueux, et un immense miroir trônait en leur centre. Lissandru aperçut son reflet dans la glace : il était dans le pire des états. Ses cheveux étaient ébouriffés, ses vêtements trempés et tâché de sang. Ses yeux avaient une lueur sombre, très fatigués, et des cernes marquaient sous ses yeux. Ses joues étaient creuses, il était très maigre.

- Voilà à quoi je ressemble réellement… murmura-t-il pour lui-même, je fais peine à voir… je n’avais jamais remarqué que mon apparence était si pitoyable.

Il continua de faire le tour de la salle de bain, et trouva un WC parfaitement propre. Rien de plus, rien de moins. Lissandru quitta la salle de bain, et en allant s’allonger sur le lit pour une sieste, les sons de trompettes frappèrent à la fenêtre de sa chambre. Il n’avait pas remarqué qu’après la porte-fenêtre, il y avait un grand balcon. La fatigue lui faisait oublier beaucoup de chose.

Curieux, Lissandru ouvrit la porte et se pencha sur le balcon pour voir d’un peu plus près qu’était toute cette cacophonie. Plus bas, à l’entrée du royaume, une troupe qui ne paraissait pas être celle du roi, avançait jusqu’à l’intérieur de la pièce. Des trompettistes accueillaient un homme fort et très jovial, son sourire semblable à celui d’un chat, qui était à dos d’un cheval. Il descendit, aidé par un soldat, et il le remercia d’un signe de tête. Toujours son sourire étiré, il avança fièrement jusqu’à l’intérieur du palais.

Lissandru savait où il allait, par instinct : la salle du trône. Etait-il d’un royaume voisin ? Ou un frère de sang, une histoire du genre ? Pour le savoir, Lissandru n’avait qu’à aller espionner. Sa curiosité grimpait de plus en plus, et il quitta sa chambre en courant, sans fermer la porte derrière lui. Il oublia de demander à sa sœur de l’accompagner, et puis, de toute façon, il ne savait pas où était sa chambre. Il galopa dans les couloirs, faillit bousculer deux ou trois domestiques au passage, et s’excusa très rapidement, avant de disparaitre par les escaliers du palais.

Enfin, il arriva rapidement, sans embûche et avec malignité, à la salle du trône.

De derrière un mur, Lissandru put assister à la cérémonie. L’homme entrait dans la salle, escorté par plusieurs hommes qui portaient une bannière. Le dessin d’un serpent mythique et de foudre étaient gravés sur les tissus épais. Lissandru reconnaissait ce symbole : sa mère avait un dessin similaire à la maison comme « tissu de table ». Lissandru lui avait une fois demandé d’où venait ce dessin, et elle lui avait répondu que :

« Le serpent représenté fait partie d’un culte, ou ses fidèles sont nommés « Les Etoiles ». Ils sont peu nombreux car ce sont des Elus de l’Etoile la plus brillante du ciel. Celle que je vous montre, à toi et ta sœur, à chaque nuit de pleine lune. »

L’homme fort serait donc un Elu de cette fameuse étoile. En quelque sorte, cela excitait la curiosité du garçon de rencontrer une figure unique et que sa mère « connaitrait ».

Ce dernier se prosterna devant le trône ou siégeait le roi. Le roi lui demanda de se relever, mais l’autre resta prosterner.

- Cher roi, je ne dois pas offenser ceux qui vous protègent des Elus, lui expliqua l’homme fort avec un sourire de chat sur le visage.

- Voyons, cher Maxime, tu le sais très bien que toi seul comme Elu est acceptée par Heléo !

- Je le sais très bien mon roi, mais sachez qu’Heléo est plus malin que vous ne le pensiez. Les Seigneurs sont maitres de tout, et manipulent qui ils veulent.

Le garçon se rappelait d’avoir déjà entendu le nom « Heléo », mais là cette fois, il ne se rappelait pas ce qu’il signifiait. Il continua d’écouter la conversation des deux personnages avec attention.

- Si je t’ai invité ici Maxime, c’est pour que tu puisses avoir l’honneur d’assister au prochain tournois, qui se déroulera dans peu de temps, lui avoua le roi avec un grand sourire fier.

- Ce serait un honneur en effet, mon roi, de pouvoir constater la force de vos troupes face aux plus puissantes créatures de ce monde.

- Cette fois-ci, mon fils participera. Il sera seul face à son adversaire, et sans les pouvoirs conféré par le Di…

- Excusez-moi mon roi, puis-je vous interrompre un moment ?

Le roi fut surpris, mais il accepta. Soudain, le regard de Maxime se tourna vers la cachette de Lissandru. Il l’avait repéré !

- Jeune garçon, si tu veux bien sortir de ta cachette, prononça-t-il à l’attention de Lissandru.

Le petit garçon se sentit honteux d’avoir épié la conversation de deux adultes. Il sentait ses joues chauffées, mais il prit son courage à deux mains, et sortit de sa cachette la tête haute. Mais il avança les jambes tendues, qui trahissait sa peur et sa honte. Lissandru fut face à Maxime en cinq enjambées. L’homme fort le fixa longuement, comme le roi, qui le scrutait d’un regard malveillant. Etait-ce parce qu’il les avait espionné ? Ou parce que c’était un total inconnu et qu’il avait fait bonne figure devant son fils, le prince ? Lissandru ne put le savoir.

Maxime s’accroupit face à Lissandru, et lui offrit un sourire félin.

- Tu es nouveau ici, petit ? Lui demanda-t-il en lui caressant ses cheveux poussiéreux, tu es dans un état lamentable.

- C’est un garçon qui a été amené avec sa sœur par mon fils ici, le temps qu’ils se reposent, lui expliqua le roi, détestant se faire ignorer dans la salle du trône.

- Je comprends. On croirait qu’il est jeune, déclara Maxime, un œil sur le roi.

Croirait ? Par hasard il saurait que je…

En réponse, Maxime mit un index à ses lèvres et murmura un « chut » discret. Il lui fit un clin d’œil.

- Qui t’as appris à écouter aux portes, petit ?

- Mais il n’y a pas de porte… marmonna Lissandru qui ne comprenait pas l’expression.

- Ce n’est pas grave. Tu sais, ce n’est pas bien. Nous discutons sérieusement, le roi et moi.

- Je sais… pardon.

- Bien, gentil garçon.

Une idée traversa l’esprit de Maxime.

- Si tu veux, comme monnaie d’échange, je peux te donner l’information que tu veux, lui suggéra-t-il.

- C’est vrai ? N’importe quelle information ?

- Oui.

Lissandru savait exactement quoi demander.

- Est-ce que… vous connaissez ma maman ?

- Tu pourrais me la décrire, petit ?

- C’est un…

Il se rapprocha de l’oreille de Maxime pour lui murmure :

- C’est un vampire et… ma maman a une tapisserie du serpent qui est similaire à la bannière.

Maxime acquiesça, et sourit mystérieusement.

- La réponse se trouvera entre ses murs petits. Si je la connaissais, je ne saurais en revanche pas ou elle se trouverait. Peut-être a-t-elle disparue.

- Ma maman peut pas être morte ! S’emporta le petit garçon, brusqué par le propos de l’Etoile, ma maman est invincible, rien ne peut la tuer !

- Je te crois, garçon. Maintenant, si tu veux bien… oh ! Attends.

Il fouilla dans sa poche et sortit un ornement, un collier en or et argent. Lissandru le prit entre ses mains. L’accessoire du collier était rond, avec comme symbole le serpent des Etoiles. Lissandru appuya sur un bouton au-dessus, et un clapet s’ouvrit. Le garçon sursauta, et s’aperçut d’un nombre de douze chiffres répartis équitablement autour de la rondeur de l’accessoire. Deux aiguilles, une moyenne et une grande, était accroché au centre, et une plus fine, tournait à un rythme d’un tic par seconde. En dessous du centre, était affiché un symbole de soleil. Il fronça les sourcils. Maxime sourit.

- C’est une technologie offerte par mon Seigneur. Cela s’appelle une montre à gousset. Elle t’indique l’heure qu’il est, et s’il fait jour ou nuit. C’est un présent pour un enfant sage.

Il lui frotta à nouveau la tête, et lui ordonna de la tête de filer. Lissandru acquiesça, et courut, la montre à la main, sous les yeux d’aigle du roi. Il s’arrêta de courir quand il fut à une bonne distance de la salle du trône. Le garçon reprit sa respiration, et regarda de nouveau la montre à gousset. C’est alors qu’un élément l’interpella : un petit bout de papier était coincé entre le mécanisme et l’extérieur de la montre. Prudemment, il le retira, et curieux, ouvrit le papier.

« Les réponses seront pendant le tournois. Participe, ta sœur et toi, et vous aurez enfin la réponse de ou se trouve votre mère. Signé : Maxime, Elu de l’Etoile. »

Il savait qui était sa mère, il la connaissait ; mais face au roi, il a feint l’ignorance. Etait-ce pour le protéger ? Cela voudrait dire qu’il était en danger entre ces murs. Sa mère avait une étroite relation avec ce royaume, vraisemblablement. Il resserra le papier : il tenait une autre piste !

Lissandru ferma le clapet de la montre, la mit à son cou, et partit pour se reposer à sa chambre. Quand il arriva dans le couloir ou il séjournait, il croisa le prince, qui attendait sagement devant la porte de la chambre du garçon. Il se méfia : que lui voulait-il ?

Le prince l’aperçut, et se dirigea vers lui a pas lent. Il lui tendit une main, sincère.

- Je ne me suis pas présenté et j’en excuse : je suis Karma, le prince de ce royaume. Mais ça, tu le sais.

- Lissandru.

- Hein ?

- Moi, c’est Lissandru, répéta le garçon en lui attrapant la main fermement, bref, c’est tout ce que tu veux me dire.

- Tu es plutôt agressif, enfin… c’est compréhensif. Non, j’aimerais te parler seul à seul.

Lissandru haussa un sourcil, interloqué. Le prince Karma semblait chercher ses mots, avant de finalement les choisir :

- J’aimerais… que tu m’en dises un peu plus sur ce… Seigneur des Sacres. Si cela ne te dérange pas.

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