du côté de Krasnoïarsk

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Quelque part, peut-être du côté de Krasnoïarsk - ce mot imprononçable, claquant à la force de ses occlusives, s’éraillant, s’écorchant  à la rudesse de ses vibrantes - quelque part dans un coin reculé de campagne - les ilots de l’Ienisseï s’aperçoivent dans le lointain -, dans une bicoque de bois et de ciment par où s’infiltre l’air sec de la Sibérie, vit un couple de retraités - la « retraite de Russie » ? -, dans le plus pur des dénuements qui se puisse imaginer. La saison, quelle est-elle, sinon celle d’hiver avec sa bise rigoureuse ? Chute infinie d’un fin grésil, jour avare qui peine à franchir la vitre, rampe à l’intérieur, pareil à un animal blessé à la recherche de son dernier refuge. L’air, au dehors, a la densité d’un lourd chagrin, la texture serrée d’un destin qui ne connaîtrait le lieu de sa prochaine aporie. Parfois, lorsque le temps se radoucit, des épingles de pluie percutent la dalle de verre, y semant le lourd lacis de l’ennui. Dedans, l’air est à peine plus chaud. Un genre de langueur, d’atonie, qui figent et contraignent à demeure. Ne pas bouger est supplice. Bouger est donner corps à une atmosphère glacée qui étreint les corps, les désespère, les conduit à l’inertie pierreuse des momies.

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