Chapitre 8

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Aujourd’hui, il faisait plutôt beau. Je profitais qu’Océane était à sa séance de rééducation pour nager un peu avant de rejoindre Emma pour préparer la surprise d’Océane. Au fond du château, dans un couloir que j’avais peu exploré, il y avait une salle vide, un peu plus grande que ma chambre. J’avais demandé à Emma d’y installer une table et deux chaises pour qu’on puisse y déjeuner. Une heure avant le repas, je commençais à me préparer en mettant une robe à fleurs et en bouclant mes cheveux pour les laisser détacher. Dès qu’elle eut fini avec moi, Emma s’occupa d’Océane pendant que je l’attendais dans la pièce, nerveuse.


— Oula, qu’est-ce qu’il se passe ? s’interrogea Océane en entrant

— Est-ce qu’un déjeuner avec moi te plairait ? lui demandais-je en jouant avec mes doigts.

— Avec plaisir, sourit-elle.

— Je vais vous laissez, vous avez tout dans se chariot. Personne ne viendra vous déranger.

— Merci Emma.


Elle sortit de la pièce et ferma la porte. Je m’approchais d’Océane et rapprocha son fauteuil de la chaise. Elle était vêtue d’un jean bleu, d’un tee-shirt rose pâle avec un léger décolleté et une petite veste en cuir. Ses cheveux toujours détachés étaient bouclés au niveau des pointes.


— Besoin d’aide ?

— Ça ira. Je peux faire quelques pas seule maintenant.

— Tu as l’air d’aller beaucoup mieux.

— Une séance tous les deux jours pendant un mois, j’ai pas mal progressé.

— Je suis contente que tu ailles mieux.

— Qu’est-ce que tu nous as préparé de bon alors ?

— Moi rien, c’est Emma qui a tout fait. Mais je crois qu’on a du poulet avec des petites pommes de terre et des fagots de haricot vert.

— Ça m’a l’air bien bon tout ça.


Je nous servis avant de m’asseoir en face d’elle. Tout ce que je demandais pour être heureuse c’était d’être avec elle, comme en ce moment. La regarder sourire, observer le moindre trait de son visage. Entendre le son mélodieux de sa voix, de sa respiration et les battements de son cœur. Sa simple présence m’apaisait. Tout en souriant, elle se servit un morceau de poulet et des haricots.


— Dis-moi si je me trompe Elena mais j’ai l’impression que ton régime alimentaire a beaucoup changé depuis la mort de ta mère.

— En effet. Avant, elle voulait toujours que je mange ce qu’il y avait de plus cher et digne pour une princesse. Mais ce repas, si simple soit-il me suffit amplement et je l’apprécie bien plus que le meilleur steak de tout l’Empire. Et puis à quoi bon payer un steak cent pièces d’or l’unité quand un poulet à dix pièces d’or est tout aussi bon.

— Une Impératrice économe ? Pas mal.


Elle enfourna un morceau de poulet dans sa bouche tout en rigolant. Mon cœur s’accéléra dans ma poitrine en entendant son rire communicatif. Mais cette fois-ci, je réussis à me retenir et à enchaîner.


— Ne te moque pas, je suis juste réaliste. Les Eryenniens ont fait tellement de sacrifices ses dernières années, c’est à moi d’en faire maintenant.

— Au point de manger la même chose que tout le monde ?

— Mais ça me convient très bien ! Même un simple sandwich jambon/beurre me ferait plaisir.

— C’est le fait de manger ce dont tu as envie qui te fait plaisir ?

— Oui. Il y a tellement de choses plus importantes que je ne veux pas que ma nourriture soit un problème supplémentaire.

— Je comprends.

— Et sinon, tu en es où dans tes séances ?

— Encore un mois et ça devraient être bons.

— Ça passe tellement vite, soupirais-je.

— Ce n’est pas parce qu’on se verra moins que je t’oublierais. Je t’aime Elena et ça ne changera pas de sitôt.

— Moi aussi je t’aime.


Elle se leva légèrement de sa chaise pour m’embrasser par-dessus la table. Elle me sourit et piqua sa fourchette dans une pomme de terre et de la manger. J’en fis de même tout en la regardant. Durant tout le reste du repas, on discutait de tout et de rien, oubliant pendant une bonne heure que j’étais Impératrice et qu’elle n’était qu’une simple villageoise.


— Elena, je sais que c’est un sujet qui fâche mais est-ce que tu sais comment est la loi nous concernant ?

— C’est-à-dire ?

— Pour un couple tel que le nôtre.

— Aucune idée. Ça pose vraiment problème ?

— Et bien, ta mère a interdit les couples de femmes ou d’hommes.

— Comme par hasard. Je vais faire changer ça à la prochaine réunion.

— Tu es sûr de pouvoir changer ça comme ça ?

— Je ne sais pas, je verrais bien. Et puis à quoi ça sert d’être impératrice si je ne peux pas changer les lois ?


Comme à chaque fois que je commençais enfin à être heureuse, ma mère trouvait toujours le moyen pour fragiliser mon bonheur. Même morte, elle continuait d’être une menace pour moi, pour ma vie.


— Je ne pense pas que tu puisses changer les lois comme ça t’arrange, surtout si ça te concerne personnellement.

— C’est-à-dire ?

— La loi nous interdisant de nous aimer en public te concerne directement. Changer les lois selon tes convenances, c’est un peu faire comme ta mère tu ne crois pas ?

— Un peu comme si je mettais en place une loi pour tuer qui j’ai envie ?

— En quelque sorte oui.


Pendant plusieurs minutes, je réfléchis à la révélation que venait de me faire Océane. Avais-je vraiment le droit de changer une telle loi sur un coup de tête ? Pour chaque décision que je prenais, le conseil devait valider ou non. Accepterait-il une tel avancé social sans préavis ? À moins que je trouve une affaire judiciaire traitant de ce sujet et que j’en profiter pour faire changer la loi par le biais de cette affaire.


— Tu crois que si j’évoque cette idée en conseil avec comme support une affaire discriminant les couples comme nous, ça passerait ?

— Mais c’est une super idée ça.

— Je ferais ça alors, je me renseignerais. Heureusement que je peux compter sur toi pour me rappeler certaines choses.

— Pour te prévenir, tu veux dire.

— Ça va, j’ai compris, pas la peine de te moquer.

— Mais je ne me moque pas, c’est mignon.

— Tu sais que je t’aime toi.

— Redis-moi ça encore une fois.

— Je t’aime, Océane Luisard. Même si parfois j’ai peur, avouais-je subitement.


Décidément, je ne pouvais rien cacher à Océane, c’était tellement facile de parler avec elle que je lui avais tout sans même y réfléchir. Même mes peurs les plus profondes.


— Peur de quoi ? Pas de moi j’espère.

— Mais non. Ce que je voulais dire c’est que c’est nouveau pour moi tout ça. Et j’ai peu que tu me rejettes juste parce que je ne fais pas ce qu’il faudrait faire ou ce que tu attends de moi.

— Je ne ferais jamais ça Elena, je te le promets. Au contraire, j’aime te voir apprendre à mes côtés et t’aider dans cet apprentissage.

— Tu es mon prof de l’amour en quelque sorte.

— Exactement.


Océane, sourit, retenant un petit rire et se pencha par-dessus la table pour m’embrasser. Par ses paroles, Océane m’avait rassurée. Avant elle, seule Emma m’avait montré la moindre once d’amour. J’avais peur que mon inexpérience finisse par la faire fuir. J’avais peur que l’ombre de ma mère ne soit un frein à notre relation.

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