Chapitre 2 - Le nouveau

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Enfin mon premier poste ! Après tant de sacrifices me voilà juriste d'entreprise !

Cyril admira quelques secondes le siège de Demeurer Habitat qui trônait face au principal carrefour de la ville. Cette embauche était une victoire, surtout après l'entretien final...

Un mois plus tôt

« Et bien félicitations, conclut Madame Marchand. Vous êtes pris !

_ Merci beaucoup, répondit timidement Cyril.

_ Laissez, Géraldine, déclara Madame Marchand à sa voisine. Je vais chercher le contrat de travail. »

Ravie, elle quitta la pièce. Cyril était maintenant seul avec la responsable des ressources humaines au visage impassible et au regard glacial.

Mais c'est quoi son problème à celle-là ? Déjà au premier entretien elle m'avait sauté à la gorge. Il faut que je dise quelque chose. Un truc sympa.

« Merci de me faire confiance, je...

_ Ne me remerciez pas, trancha-t-elle. Personnellement je ne vous aurai jamais choisi, je préférais de loin un autre candidat, beaucoup plus sympathique que vous. »

Oh non...

« Je vous précise que vous avez encore tout à nous prouver, continua-t-elle. Ne croyez pas que votre place est assurée, ce serait une erreur... »

Le retour de Madame Marchand coupa la diatribe de la responsable RH qui se reprit aussitôt.

« Ah, Madame Marchand ! Votre nouveau collaborateur nous remerciait pour son embauche. Je lui ai évidemment rappelé qu'il n'avait pas encore fait ses preuves et qu'il était inutile de se montrer présompteux. »

Ohlala elle ne s'arrête plus...

« Merci Géraldine, temporisa Madame Marchand. L'embauche est dans un mois, un délai plus que raisonnable pour se préparer à ce poste.»

Et un mois plus tard me voilà prêt. Je vais leur montrer ce que je vaux !

Cyril entra, la chargée d'accueil était au téléphone.

« Oui c'était dans les logements sur l'avenue du château, disait-elle d'un ton morne. Oui le mois dernier... Non c'est pas ça, il s'était trompé d'appart mais la petite vieille qui y habitait lui a indiqué le bon... Ah ba oui ça fait deux portes cassées à coups de hache du coup, J-C fait la gueule, il galère pour récupérer les assurances des portes... Oui... Bon je te laisse, j'ai quelqu'un là. Allez à plus tard.

_ Bonjour, salua Cyril, c'est mon premier jour, j'ai été embauché au juridique, je...

_ D'accord, le coupa-t-elle, je les appelle, vous pouvez monter au 2e étage. »


« JCéééééé ! appela Flavie. Le nouveau arrive ! »

« J'arrive ! » Il quitta son bureau, prêt à accueillir son nouveau collègue.

Bienvenue dans le service ! Oui les couleurs sont dégueulasses mais Madame Marchand adore le marron et le jaune. Elle c'est Flavie, le cancer du service, elle ne fait jamais son travail, oui c'est ça, jamais. Elle pleure pour fuir ses responsabilités et est persudée d'être débordée. Ah mais si elle est sincère ! Non, non, elle n'est pas manipulatrice, elle n'en est pas capable. J'ai tellement à dire sur elle mais je n'en dirai pas plus, je te laisse la joie de la découvrir par toi-même ! Moi ? Je crois que je bois pour tenir mais sinon tout va bien. Je déconne évidemment ! Je fume presque un paquet par jour, c'est beaucoup plus corporate comme addiction.

Un timide coup à la porte l'extirpa de ses élucubrations, puis le nouveau entra.

« Enchanté, je suis Jean-Christophe, ici on se tutoie sauf pour Madame Marchand, mais elle n'est pas là ce matin, elle revient dans l'après-midi. »

C'est à cause de ses problèmes d'ego, c'est important pour elle de se placer au-dessus des autres. Mets toi en position d'infériorité ou elle te rabaissera. Tout le monde passe par là, t'inquiète.

« Ah merci pour l'info ! Je suis Cyril, enchanté. »

Mon radar à débile ne s'active pas. Madame Marchand aurait-elle vraiment embauché quelqu'un de normal ? Ou Flavie le brouille-t-il ?

« Et moi je suis Flavie ! »

Ton pire cauchemar.

Jean-Christophe et Flavie montrèrent à Cyril son bureau, et plus particulièrement l'armoire où se trouvait pêle-mêle tous les dossiers concernant le droit des sociétés.

Tu vois ce bordel ? C'est à toi, félicitations. Madame Marchand a laissé Flavie s'occuper du droit des sociétés pendant presque 8 ans et voilà le résultat. Franchement j'aimerais pas être à ta place !

« Voici les dossiers de droit des sociétés, présenta Jean-Christophe. On a déjà fait un tri avec Madame Marchand, il te reste à faire les choses à ta sauce. »

En fait on a pas trop eu le temps et Flavie s'était mise à chialée quand on lui a fait comprendre qu'elle était incompétente. Tu vas mettre des semaines à en venir à bout.

« J'ai géré le droit des sociétés pendant 10 ans, se vanta-t-elle. Maintenant je suis sur les ventes alors je ne peux pas tout faire ! »

Le pire c'est qu'elle croit vraiment ce qu'elle dit.

« N'hésite pas à me demander de l'aide, continua-t-elle. Je suis un peu débordée mais je trouverai du temps, il faut se soutenir entre collègues ! »

Il comprendra par lui-même à qui il a affaire. Mais en combien de temps ? J'ai hâte de l'observer se débattre vainement. Ou il trouvera tout parfaitement normal et je devrais me barricader dans mon bureau, me préparer pour le dernier des combats, l'apocalyspse selon Saint Jean.

« Merci. J'ai hâte de commencer en tout cas. Mon travail précédent n'était pas très captivant vous savez. Alors avoir décroché ce poste est une sorte de résurrection ! »

Quand tu auras fini de ranger cet armoire il ne te restera que des powerpoints à faire. Tu seras la serpillère qui passe après Flavie. Madame Marchand te laissera sécher au fond d'un placard et elle ne te jetera jamais, tu seras condamné à t'assécher lentement, couvert d'immondices.

« C'est vrai qu'on a beaucoup de travail, répondit Flavie. Tu ne vas pas t'ennuyer ici !

_ C'est tout ce que je demande ! »

Toutes mes condoléances.

« Bon, intervint Jean-Christophe. Il nous reste du temps avant midi, je vais te montrer notre base de données et la préparation du prochain conseil d'administration. »

Dégage Flavie. C'est bon, tu as déjà dit deux fois que tu étais débordée, il a compris.

« Ah oui, insistat-elle. Tu manges à la cantine Cyril ? »

« Oui, Madame Marchand m'avait dit durant l'entretien qu'elle était très bonne. »

Sans déconner ? Toi tu vas être à 10 sur l'échelle de la désillusion. Ils passent ta viande au micro-ondes pour qu'elle soit saignante. Hier c'était kebab de la mer, non tu ne comprendras pas, personne ne le peut.

Flavie, gênée, se contenta de glousser avant de retourner dans son bureau. Jean-Christophe feinta d'être trop concentré sur l'ordinateur de Cyril pour répondre.

Ça va être trop dur pour toi. Tu es un chevreau, innocent et plein d'espoirs, et cette société est un loup, certes complètement débile, mais néanmoins un prédateur qui... Mais qu'est-ce que je raconte ? Bon sang, vivement ce soir, j'en ai déjà ma claque !

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