« Vous vouliez me voir, Madame Marchand ? »

Jean-Christophe ferma soigneusement la porte du bureau afin d'empêcher Flavie d'écouter en douce.

« Géraldine va passer, soupira Madame Marchand. Pour le marché de la mutuelle.

_ Oh non, elle va encore rien foutre comme la dernière fois...

_ On va se taper ce dossier jusqu'à la fin de l'année, vous pouvez en être sûre et... »

QUAND TE REVERRAIIIIIIIIIIIS-JE

« Vous n'avez pas dit à Albin que vous l'entendez chanter depuis votre bureau ? interrogea Jean-Chistophe.

_ Hélas si. »

PAYS MERVEILLEUUUUUUUX

« La vraie question est : quand reverrons-nous les plans qu'il a mis à la benne ? railla Madame Marchand.

_ C'est une question rhétorique ? »

QUAND TE REVERR...

Madame Marchand avait déjà saisi son téléphone et appelait son voisin du dessus.

« Albin ? Oui c'est moi. Je suis en réunion là... Oui justement... Je t'entends oui... Non là je n'ai pas le temps, je suis prise... Allez salut. »

Le combiné retrouva sa base aussi brutalement qu'il en avait été arraché.

« Simplet ne nous dérangera plus, où en étions-nous ?

_ Vous m'annonciez que Géraldine était sur le point de nous harceler pour les trois prochains mois.

_ Ah oui... elle devrait passer vous voir dans la journée. Venez me voir tout de suite après, que je mesure l'étendue des dégâts. Et sinon, comment trouvez-vous Cyril ?

_ Il est sympa et il a l'air motivé. L'armoire lui pose encore quelques problèmes, encore hier il m'a dit qu'il ne retrouvait pas les registres de la filiale pour les 5 dernières années.

_ Il n'a pas demandé à Flavie ? »

Elle me pose vraiment cette question ?

« Si. Mais elle ne lui a pas réellement répondu.

_ Ah. »

Pourquoi être déçue ?

« J'ai regardé avec lui et en effet je n'ai pas trouvé non plus. D'ailleurs je n'ai pas le souvenir d'avoir déjà vu ces registres pour être franc.

_ Non mais ils sont forcément quelque part. Flavie ! Cyril ! »

Flavie ouvrit la porte du bureau immédiatement, Cyril arriva à son tour.

« Oui, Madame Marchand ? demanda Flavie crispée par le stress.

_ Vous rappelez-vous où sont les registres de la filiale ? Ceux des 5 dernières années.

_ Je ne sais plus, tenta Flavie. C'est Cyril qui s'occupe de ça maintenant. »

Que le spectacle commence ! Regarde bien, Cyril.

« Oui enfin Cyril est avec nous depuis seulement trois jours. Vous devez bien vous souvenir où vous les avez rangés.

_ Oui mais vous avez trié l'armoire avec Jean-Christophe. Vous avez dû les mettre ailleurs.

_ Voyons Flavie, nous avons pris le soin de rassembler tous les registres.

_ Exact, intervient Jean-Christophe. Je me rappelle les avoir montrés à Cyril. Il les a justement vérifiés et c'est là qu'il a remarqué l'absence de certains d'entre eux. »

Voyez Madame Marchand, la proie est rabattue. Voici votre arme. Oui, je l'ai chargé moi-même.

« Quelles sont les années manquantes ? interrogea Madame Marchand qui commençait à s'agacer.

_ Depuis 2013 compris, répondit Cyril.

_ Ah mais c'est différent alors ! s'exclama Flavie.

_ Comment ça ?

_ Ba ils ne sont pas rédigés. J'attends encore que vous validiez mes projets de délibérations. »

Oh putain c'est génial !

« Que quoi ? balbutia la responsable. Vous attendez depuis 2013 ?

_ Oui, les projets sont prêts. Enfin pas tous, il faudrait vérifier. »

Oui bonne idée, Flavie. Vérifions aussi ton QI.

« Je... tenta Madame Marchand. J'ai besoin d'une cigarette. Nous en discuterons ce midi, Flavie.»

Oh non, on assistera pas à l'exécution...

Désabusée, Madame Marchand quitta le bureau.

« Mais ce n'est pas de ma faute... geint Flavie.»

Elle jeta un regard de reproche à Cyril qui n'était pas en mesure de le comprendre. Les règles absurdes de ce nouvel univers étaient encore inconnues pour lui.

« Je n'aurai jamais le temps de tout faire toute seule, continua-t-elle. Pas avec tout le travail que j'ai...

_ Ah je dois y aller, mentit Jean-Christophe. J'ai un rendez-vous dans 5 minutes. »

Désolé Cyril, tu vas tout te taper. Madame Marchand va détruire Flavie ce midi. Elle va chialer. Et comme tu es le nouveau on va te refiler le bordel. Flavie t'aidera la première journée, au mieux, puis tu seras livré à toi-même. Parce qu'elle est débordée, évidemment. Ah et tout sera de ta faute.

Soulagé, il regagna son bureau.

« Bonjour, Jean-Christophe, justement je vous attendais.»

Merde. Géraldine.

« Ah oui, Madame Marchand m'a parlé du marché de la mutuelle.

_ Oui, ça sera une formalité comme la dernière fois. Il faut avouer que nous formons une belle équipe.»

Oui, une belle équipe de 1.

« Donc pour le marché, il faudrait identifier les besoins...

_ Vous savez ce qu'à fait Roxanne encore ? »

Bordel.

« Non, pourquoi ?

_ Je l'ai suivi pendant l'une de ses missions.»

Mais quelle malade.

« Et je l'ai retrouvé chez la manucure. Vous auriez dû voir sa tête quand je suis entrée ! Elle s'est décomposée ! Demain je m'occupe d'Aline, elle est censée passer à l'agence du centre. Nous verrons si c'est la vérité.

_ Oui d'accord. Pour la mutuelle...

_ Roxanne ne vas pas s'en remettre de sitôt ! J'ai hâte de remettre Aline à sa place. Vous savez ce qu'elle a osé dire au comité d'entreprise ? »

Seigneur, aidez-moi.

45 minutes plus tard

La sonnerie de son téléphone coupa la diatribe de la responsable des ressources humaines.

« Oui ? répondit Jean-Christophe avec espoir.

_ Elle est toujours avec vous ? demanda Madame Marchand.

_ Oui.

_ Vous avez pu parler de la mutuelle au moins ?

_ Non.

_ Bon. Vous pouvez lui dire que vous avez un rendez-vous. Je vous couvre.

_ Très bien, j'arrive. »

Dissimulant sa joie, il raccrocha le combiné.

« Désolé, j'avais oublié mais mon rendez-vous est arrivé.

_ C'est vrai qu'on ne voit pas le temps passer quand on discute ! »

Oui oui, allez dégage.

« Du coup nous n'avons pas eu le temps de parler du marché de la mutuelle ! Je vous recontacte bientôt Jean-Christophe !

_ Pas de problème, ma porte est toujours ouverte.»

Il n'est même pas 11h que je suis déjà mort. Vivement que Flavie se fasse défoncer, ça me requinquera !