Prologue

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Autour de lui des ruines et des arbres. Les vestiges d’un village fantôme, abandonné à la forêt qui progressivement, a repris ses droits sur les constructions de l’Homme. Des sites comme celui-ci, il y en a de plus en plus à travers le monde, depuis que l’humanité est sur le déclin.

Puis le paysage se met en mouvement, tout défile très vite. Il court, il saute, il trébuche et se rattrape, puis court à nouveau. Le souffle lui manque, il halète, mais il sait qu’il n’y a pas de temps à perdre. Ne pas se retourner, avancer, le plus vite possible et le plus loin d’ici. Il ne sait pas ce qu’il fuit, ce qui le pourchasse, mais ce qu’il sait, ce que lui dicte son instinct, c’est qu’il doit absolument mettre le plus de distance possible entre cette chose et lui. Son réflexe de survie est devenu le vrai maître de son corps, il anesthésie le cerveau, et empli son corps d’adrénaline.

En une fraction de secondes, il n’y a plus de pierres, plus de ruines, uniquement des arbres, de la mousse et l’humidité. Il est toujours dans la forêt et court encore, incapable de s’arrêter tant qu’il ne sera pas certain d’être à l’abri. La peur lui donne la force de continuer, comme une proie chassée.

Il entend soudain un bruit ou plutôt un grognement dans son dos. La chose se rapproche.

Au loin, un halo de lumière jaillit d’un coup de l’obscurité. Continuant d’avancer, il aperçoit bientôt une cabane de chasse d’où proviens le léger bandeau lumineux. Une petite lucarne est éclairée. Il atteint enfin la porte, elle n’est pas verrouillée, il entre et referme aussitôt derrière lui, utilisant la clé présente sur la serrure.

Plié en deux, il reprend son souffle, exténué par sa fuite et sentant son coeur battre à tout rompre dans sa poitrine. Plus aucun son ne parvient à ses oreilles, pas même le bruit de sa respiration, comme s’il porte un casque, ou bien que ses oreilles sont bouchées par du coton.

Au bout de quelques minutes, une fois son coeur calmé, il ouvre les yeux et se redresse. Tout est blanc, du sol au plafond en passant par les murs, partout du carrelage blanc, comme dans un hôpital, ou une morgue.

L’intérieur de la cabane paraît beaucoup plus grand que l’extérieur ne le laissait présager. En effet, il se trouve au milieu d’une grande pièce, totalement vide, sur le mur su sa droite, deux portes, blanches également. Sur sa gauche, un comptoir délimité ce qui devrait être une cuisine, mais là encore, tout est vide et blanc.

Il reconnait l’endroit, l’emplacement des fenêtres et des portes, il est dans son appartement, ou dans une copie de son appartement puisqu’il n’y a aucun meuble et que du sol au plafond, tout est immaculé.

Dehors, plus aucun cri, plus aucun grognement. Il est en sécurité.

Il décide d’ouvrir les portes. La première, dans son appartement, s’ouvre sur sa chambre. Ici, elle ne s’ouvre que sur une nouvelle pièce vide et immaculée. La seconde donne sur la même chose, du vide et du blanc, là où il devrait y avoir une salle de bain.

Quand il ressort, il aperçoit au milieu de la pièce principale un bureau, lui aussi blanc, reflétant une lumière aveuglante. Il est pourtant certain qu’il n’y avait rien il y a encore quelques secondes. Tout comme il a reconnu son appartement, il reconnait son bureau. Mais il manque dessus tout le fatras habituel, dossier, cendrier, et cadavres de bouteille de vodka.

Suivant son instinct, il ouvre les tiroirs, vides. Il aperçoit alors quelque chose, comme un bout de papier posé simplement au centre du bureau. Lorsqu’il se penche pour attraper le morceau de papier, une goutte rouge vient s’écraser juste à côté de celui-ci. Le bruit cette goute explosant contre le plateau absolument lisse du bureau déchire le silence et vrille ses tympans. Le rouge carmin de son sang souille la blancheur pure du meuble. Une autre goutte rejoint la première puis très vite une troisième et enfin un petit filet de sang arrose tout. Son nez coule abondamment, probablement en raison de l’effort qu’il a fournit il y a maintenant quelques minutes.

Bouchant ses narines d’une main, il attrapa le morceau de papier avant qu’il ne soit recouvert de sang. Dans sa main, la sensation du papier n’est pas agréable, il l’examine de plus près et s’aperçoit que ce n’est pas du papier mais plutôt un morceau de peau humaine sur lequel est inscrit de petites lignes, dans une écriture manuscrite soignée et élégante.

Il le lit à voix haute :

"Souviens-toi de moi, Souviens-toi de Longinus"


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Au milieu d’un dédales de ruelles sombres, un homme avance, lentement, prudemment, à l’affut. Quelques réverbères fonctionnent encore par-ci par-là, juste assez pour distinguer l’ombre qu’il poursuit. Son instinct ne le trompe jamais, et avec le temps, il a appris à lui faire confiance. Comme un sixième sens, il détecte quand quelques chose se trame. Et ce soir, lorsqu’en sortant du traiteur chinois, il a croisé le regard de cet homme, son sens s’est tout de suite mit en alerte. Cet homme avait quelques chose dans le regard de froid et terrifiant, comme si une flamme bleue dansait à l’intérieur.

Comme quoi le hasard fait bien les choses, quelques heures supplémentaires au boulot, une conduite d’eau explosée qui l’oblige à changer son trajet de retour et enfin, l’enseigne lumineuse du restaurant qui s’allume juste devant lui, au moment où son estomac crie famine. A croire que Dieu, ou la Vie elle-même voulait lui faire croiser le chemin de cet homme.

Au fur et à mesure qu’il avance dans le dédale de ruelles, il commence à se demander s’il saura retrouver sa voiture. La pénombre, le brouillard froid et humide qui flotte, auraient mit n’importe qui mal à l’aise. Mais pas lui, et pour la bonne raison qu’il a son SIG SAUER SP 2022 9mm qui l’accompagne partout. Et c’est donc avec la main droite fixer sur la crosse qu’il continue d’avancer.

- Qu’est-ce que tu fous dans ces ruelles à cette heure-ci mon gars. Rien de bien légal à mon avis. Dommage pour toi que tu ai croisé le meilleur flic de la ville

Quand il est en filature, le Capitaine Frichter Daniel se parle, ça le rassure et lui permet de rester focus sur l’objectif. Et l’objectif devant lui n’est plus qu’une ombre, il doit se concentrer pour réussir à le suivre sans se faire repérer. Eviter les poubelles, ne pas glisser sur la pierre humide et poisseuse, ne pas shooter dans une canette qui traine ici ou là. Dans ce coin de la ville, les cheminées des usines des aciéries laissent partout une couche de crasse huileuse et noire.

Arrivant à une intersection, l’homme s’arrête net. Le policier se faufile alors rapidement derrière un tas d’ordure et s’aplatit le plus possible, espérant qu’aucune partie de son corps ne dépasse.

- Surtout, ne pas se faire repérer.

Après quelques seconde, Frichter lève doucement la tête, l’homme au regard froid n’est plus là. Le policier bondit de sa cachette, et sans toutefois courir, accélère le pas.

- Ne le perd pas abruti, ou tu t’en voudras

A l’intersection, coup d’oeil à gauche, coup d’oeil à droite. Une grande respiration, et son instinct lui dit à droite. Le Capitaine se met à trottiner pour essayer de rattraper l’homme.

La ruelle s’agrandit de plus en plus, et il y a de plus en plus de lumière. Et soudain, une voix retentit.

- Lachez-moi !

- Ferme-la gamin ou je t’en recolle une. La première t’as pas suffit.

- Tu devrais le bâillonner ou alors lui arracher la langue, il va réussir à attirer du monde ce merdeux.

Frichter sort son arme, et vérifie qu’il y a bien une cartouche de chambrer. Il a entendu trois voix, dont celle d’un enfant, ou plutôt d’un adolescent en pleine mue. Décidément, c’était sa journée, il enquêtait justement sur des disparitions d’enfants dans toute la ville. Et dire qu’il piétinait dans cette affaire était un euphémisme. Déjà deux adolescentes sont portés disparus, sans n’avoir laissé aucune traces, aucun indice, pas une lettre de fugue, rien. Elles se sont tout simplement volatilisées. N’importe quel flic aurait traité les cas indépendamment les uns des autres, mais pas le capitaine Frichter, il avait découvert que les enfants disparues étaient toutes deux nées le même jour dans la même maternité. Cela ne pouvait pas être une coïncidence.

Encore une fois, la preuve que Dieu, ou la Vie était de son côté. Finalement il n’aura pas besoin de l’aide de son vieil ami.

Il s’approche doucement de l’angle, passe un oeil, et fait une reconnaissance rapide de la placette. L’enfant est allongé face contre le sol, derrière lui se tient un homme. Ce n’est pas celui qu’il suivait.

Son oeil de flic enregistra immédiatement toutes les informations importantes, comme la description de l’adolescente, jean, basket blanche, sweat gris, elle avait les cheveux longs et bruns. L’homme qui se tient devant l’enfant est grand, de corpulence assez fine, il doit mesurer environ un mètre quatre-vingt pour environ soixante-dix kilos. Les cheveux blonds et courts également il était vêtu d’un long manteau de laine noir et chose surprenante, il porte des lunettes de soleil en pleine nuit.

L’homme tient dans sa main un objet que Frichter ne parvient à discerner jusqu’à ce qu’il le brandisse devant l’enfant. Une seringue. Le policier, s’apercevant que l’homme parle toujours tente de comprendre ce qu’il dit. Mais impossible d’entendre les mots qu’il marmonne, mis à part sa dernière phrase.

- Il est là.

Frichter ne comprend pas à qui se type s’adresse, peut-être à la jeune fille ou peut-être à l’homme qu’il suivait mais impossible de voir cet homme.

Le policier tente un nouveau regarde discrètement quand tout à coup il aperçoit de nouveau ces flammes bleues qui dansent, mais cette fois à quelques centimètre de lui.

- Alors Ducon, tu pensais me suivre sans que je te repère. Je t’ai senti me suivre, je t’ai senti approcher. Je t’ai amené là où je voulais que tu sois. Ici, face à moi. C’est la fin pour toi.

Incapable de détourner ses yeux de ceux de l’homme qui se tient à quelques centimètres de lui, le Capitaine Frichter n’a pas le temps de lever son arme que le froid s’abat sur lui. Il sent sa vie et même son âme le quitter, comme aspirées à l’extérieur de son corps. Il attrape sa gorge à pleine main, le sang s’écoulant par jet en rythme avec les battements de son coeur.

Face à se spectacle monstrueux l’enfant se met à hurler, le type en manteau noir à ses côté lui assène un coup de botte en plein visage. Frichter voit l’enfant s’écrouler, puis tombe au sol, mort dans une flaque de sang.

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