Chapitre 47

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En approche de Médila, Katalonia, Utopia, 8 février 1994

Comme prévu, Jack Lorage demanda à ce qu'on le conduise à Médila, pour y rapporter le corps de son amie. Cette fois-ci, c'est à bord d'une navette aux couleurs de l'entreprise de Wilson qu'il fit son voyage. On pouvait ainsi lire sur les côtés de la navette, "Technobot industries". Jack savait qu'en temps de guerre, on ne ferait pas atterrir n'importe qui, n'importe où. Wilson étant reconnu comme ennemi du Efdéème, les autorités katalonienne autoriserait sûrement son entreprise à faire atterrir les engins de Technobot Industries, sur ses pistes.

Ainsi, lorsque l'engin arriva à proximité de la piste, on l'orienta vers la piste 03. Jack remarquait que de plus en plus, il s'y faisait aux voyages aériens. Autrefois il avait peur de prendre l'avion ou un quelconque aéronef. Aujourd'hui, il reconnaissait qu'ils étaient bien pratiques. Il vainquait ainsi petit à petit l'une de ses peurs.

La navette pouvait, comme la plupart des aéronefs utopiens, décoller et atterrir à la verticale. Cette technologie était à peine naissante sur Exotis, le monde voisin. Ainsi, lorsqu'elle arriva au dessus de l'emplacement qui lui avait été affecté, le pilote entama la manœuvre d'atterrissage en déployant les quatre pieds d'atterrissages tout en descendant lentement l'appareil. Les pieds vinrent toucher le sol et supporter le poids de l'appareil. L'atterrissage était alors terminé.

Après quoi, le pilote ouvrit depuis le cockpit, les portes en appuyant sur une commande. Ainsi, la porte s'ouvrit et se posa au sol de sorte à constituer un petit escalier permettant aux occupants de descendre. Jack fut le premier à descendre.

Une membre du personnel de l'aérodrome vint à sa rencontre. Il s'agissait d'un humain d'une quarantaine d'année, à peu près la même taille que Jack, les cheveux courts grisonnants.

—Bonjour, fit l'agent. Qu'est-ce qui nous vaut la visite d'un représentant des industries technobot ?

Jack trouva ça drôle que la personne en face de lui le prenait pour un collaborateur de Desmond Wilson. En vrai, c'était plutôt l'inverse. Mais Jack se prêta au jeu et improvisa une histoire justifiant sa venue ici.

—Je ne viens pas au nom de Technobot industries, dit-il avant de faire signe au pilote de descendre le cercueil d'Anata. En fait, nous venons de Krios, là où ces ordures d'Efdéèmois ont débarqués. Et nous avons... rencontré une Komitose qui nous a aidé à nous enfuir. Elle a prit une balle et est morte à bord de la navette. Elle portait sur elle un papier avec son adresse. Alors on a voulu la ramener à ses parents.

—Je vois, répondit l'homme en regardant le cercueil. La guerre n'est pas arrivé jusqu'ici... Du moins pas encore. Aux dernières nouvelles, nos troupes et celles envoyées par le Véerème reculent. Mais tout espoir n'est pas perdu pour autant. Il semblerait que les troupes efdéèmes débarquées à Krios sont prises en étau entre nous, les forces véerèmes et les dalkiens qui ont renforcés leurs frontières.

"Ouais" pensa Jack qui était déjà au courant.

—Enfin... Je suis désolé pour elle, reprit l'agent en parlant d'Anata.

—Ouais... Vous n'imaginez même pas à quel point je le suis, lui répondit Jack cachant à peine sa haine envers le Efdéème. Il faut la conduire au centre funéraire le plus proche... Vous pouvez vous en charger ?

—Bien sûr. Nous avons des camionnettes. Normalement, nous ne les prêtons pas. Mais si c'est pour rendre service à la famille de cette fille, on peut au moins faire ça pour honorer son sacrifice.

—Merci, fit le paranormal en sortant de sa poche les plaques militaires d'Anata. Moi je vais aller rendre ça à ses parents.

Jack connaissait le chemin pour se rendre chez les parents de son amie. En effet, il avait déjà effectué le trajet depuis l'aérodrome lorsque les MOCH l'y avait déposé, au lendemain de son intervention lors de la bataille d'Adrième.

***

Jack s'approcha de la maison des parents d'Anata. La dernière fois qu'il était venu, ils n'étaient pas là, Anata était seule. Aujourd'hui, il espérait qu'ils soient présents afin de pouvoir leur remettre le corps de leur fille. Il arriva devant la porte d'entrée et sonna. Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvrit, dévoilant une Komitose d'une cinquantaine d'années que Jack devina être la mère de son amie.

Jack lui tendit les plaques militaires de sa fille, sans dire le moindre mot. La mère les prit et devina ce qui était arrivé à sa fille . Elle se mit à hurler de chagrin et s'effondra. Quelques secondes plus tard, c'est le père qui arriva face à Jack. Il prit sa femme dans ses bras et l'aida à se relever. Les deux parents crurent que leur fille était tombée sous les balles efdéèmes. Ils ignoraient tous les deux qu'ils avaient en face d'eux le véritable assassin de leur fille.

—Vous êtes dans l'armée katalonienne ? demanda le père au bord des larmes.

—Simplement l'un de ses amis.

—C'est le Efdéème qui a fait ça ?

En entendant cette question, Jack se repassa la scène en tête. Celle où il avait tué son amie. Bien entendu, il ne pouvait pas raconter aux parents d'Anata ce qu'il s'était vraiment passé. Il se contenta de confirmer au père de son amie que sa fille était bien tombée sous les balles efdéèmes.

—Oui, répondit-il, en reculant pour prendre congé. Elle devrait arriver dans le centre funéraire de la ville. Le Efdéème paiera pour ça. Je vous le promet.

—Merci... Merci de l'avoir ramenée, termina le père d'Anata avant de laisser Lorage s'en aller.

Jack ne supportait plus d'entendre la mère d'Anata pleurer. Ça lui faisait mal. Très mal. Il s'en voulait pour ce qu'il s'était passé. Il mit sa capuche et tourna le dos aux parents puis s'en alla les larmes aux yeux. Il savait pourtant que pour ce qu'il s'apprêtait à faire, il allait devoir mettre ses sentiments de côté. Des sentiments qu'il ressentait de plus en plus comme une faiblesse, un obstacle entre lui et son projet.

***

Véerème-City, Véerème, Utopia, 10 février 1994, environ 20h50 heure locale

Le circuit de Véerème-City était réputé être l'un des plus difficiles, en raison de ses virages surélevés et inclinés. Même les meilleurs pilotes de l'histoire de la HotRace ont connu des déconvenues sur ce circuit. Chase Crow lui-même, avait connu une troisième place lors de l'édition précédente. Mais cette fois-ci, il ne comptait pas laisser la victoire lui échapper.

Ainsi, cette année, il avait très bien commencé la course, réussissant à s'emparer de la première place dès le premier tour tout en arrivant à la conserver.

—Il ne reste plus que trois tours et Crow est en pôle position, suivit de près par Shayla Leona, la prodigieuse pilote Elfe ! Cria le commentateur très enthousiaste, comme d'habitude. Il faisait sentir sa passion pour les courses de Karts.

Le temps était couvert et l'orage se mit à gronder, sans pour autant qu'il pleuve.

—Ah... fit le commentateur, le ciel a décidé de craquer. Et c'est donc sous l'orage que les pilotes devront boucler la course.

Chase Crow, acclamé par le public, arriva à l'un de ses virages difficiles. Il le prit sans trop de difficulté, sans même ralentir. Shayla le suivit en faisant de même. Ce qui n'était pas le cas des autres concurrents chez qui on pouvait sentir une légère méfiance. Tous ralentirent légèrement dans ce virage pour ré-accélérer de plus belle à sa sortie.

La foudre s'abattit à plusieurs endroits du circuits. Les spectateurs comme les coureurs devinèrent qu'il ne s'agissait pas d'une phénomène naturel. Ou du moins que quelque chose attirait les éclairs et faisait en sorte qu'ils tombaient à ces endroits précis. Comment la foudre aurait-elle pu s'acharner de la sorte sur le circuit sinon ?

Le public commençait à se poser des questions. Les cris d'encouragement avaient cédé leur place à un silence total.

Jack arriva au dessus du circuit, debout sur une plaque de métal qu'il faisait léviter. il atterrit en plein milieu du circuit. L'un des pilotes de kart qui passait à ce moment-là, dut l'éviter.

—On me signale la présence d'un individu sur la piste ! Fit le commentateur. Mais il est fou ?!

Jack était équipé d'un micro. L'un des agents de Wilson présent à quelques dizaines de mètre de l'enceinte, dans un petit fourgon, utilisa ses compétences de hacker pour pirater le système et connecter le micro que portait Jack aux haut parleurs. Une fois que s'eut été fait, il prévint Lorage pour lui annoncer qu'il pouvait commencer son discours. Après quoi, Jack fit à nouveau léviter la plaque sur laquelle il était, à une vingtaine de mètre autour du sol.

—La Hot Race, commença Jack. L'un des événements les plus médiatisés, les plus diffusés et les plus suivis d'Utopia. C'est la raison de ma présence ici. Le monde connait la guerre. Des gens se battent et tous les jours certains d'entre-eux meurent. Et pourtant, vous êtes là à admirer une course sans vous soucier de ce qu'il se passe ailleurs. J'ai connu la guerre et je continu de la connaître. Il y a quelque jours, j'y ai même perdu une amie. Et il y a un an, j'ai découvert la véritable intention des dirigeants de ce monde. Ecoutez moi mes amis, bientôt vous vivrez dans la tyrannie, cette guerre anéantira les grandes puissances utopiennes. Et naîtra de leurs cendres un Nouvel Ordre qui vous prendra tout ! Allez vous rester sans rien faire le jour où on vous volera vos libertés ?! Et s'il y a des paranormaux qui m'écoutent... je sais qu'il y en a... Je les sens... Rejoignez-moi ou vous serez les premières victimes de la tyrannie...

L'événement était retransmis dans de nombreux pays. Sur les chaines sportives dans un premier temps, puis sur les chaines d'infos depuis l'arrivée de Jack. Il ignorait qu'à plusieurs milliers de kilomètres de Véerème-City, les parents d'Anata le reconnurent et comprirent qu'il leur avait sans doute caché des choses sur les circonstances de la mort de leur fille, à Dalkia, Olympe qui préparait à manger devant sa télé, vit celui qu'elle aimait autrefois, le père de sa fille envoyée sur Exotis, commettre une fois de plus un acte dont elle ne l'imaginait pas capable il y a encore un peu plus d'un an.

Jack remarqua la venue d'une douzaine d'hommes armés de fusils automatiques. Tous le braquèrent.

—Si arrogants... fit Jack en parlant de ces hommes.

—Rendez vous ! hurla l'un d'entre-eux.

Lorage n'avait pas l'intention de se rendre. Il savait donc ce qui allait se passer. Les forces de police véerèmes allaient devoir tirer, et lui, devrait riposter en les tuant. Il s'agirait alors de la première fois qu'il assassinerait des véerèmois.

—Et que ferez-vous si je refuse ?! Vous allez me tirer dessus ?! Voyons vous ne faites pas le poids face à moi... Et puis, regardez autour de vous... Est-ce que j'ai tué quelqu'un dans ce circuit ?

Les policiers ne voulaient rien savoir.

—Dernière sommation ! Rendez-vous ou nous ouvrirons le feu !

L'événement était toujours retransmis. Le monde entier retenait son souffle devant cette scène. Olympe était figée devant son écran. "Ne fait pas ça Jack... Je t'en supplie", se disait-elle.

Jack fit atterrir la petite plaque sur laquelle il volait. Et s'avança de quelques pas vers les policiers.

—Eh bien allez-y... tirez.

Les policiers ouvrirent le feu. Jack dévia les premières balles et toucha trois d'entre-eux qui s'effondrèrent au sol. Il arrêta d'autres balles avant de les faire tomber au sol puis fit un saut en arrière tout en dressant la plaque de métal sur laquelle il venait de faire son discours, afin de se cacher derrière. Heureusement pour lui, elle résistait aux balles.

Il attendit quelques secondes derrière la plaque avant de l'envoyer valser sur trois autres policiers qui se retrouvèrent écrasés sous celle-ci. "Plus que six" se dit Jack.

Les spectateurs et les pilotes étaient en panique. Tous étaient en train d'évacuer les lieux sous un brouhaha peu répandu.

Le paranormal utilisa ses dons pour ramener l'un des six policiers restant, en face de lui afin de s'en servir comme bouclier humain, comme il l'avait déjà fait auparavant. Le pauvre représentant de l'ordre se prit une rafale de balles de la part de l'un de ses collègues et mourut sur le coup.

—Attention où vous tirez ! cria un autre.

Jack envoya le corps vers un policier qui eut le temps de l'esquiver en faisant une roulade sur le côté. Après quoi, il envoya une salve d'éclairs pour éliminer les quatre autres policiers.

Le dernier, celui qui venait d'éviter le corps de l'un de ses collègues, garda son sang froid. Il savait qu'il allait mourir. Le paranormal était bien trop puissant. Il retira le chargeur entamé de son fusil pour y engager un autre chargeur, plein. Dans un élan de courage, il sortit de sa couverture et vida son chargeur sur sa cible, sans succès. Le paranormal les arrêta toutes.

Jack regarda le policier en lui envoyant un léger sourire.

—Stupide... fit-il. Mais courageux.

Il l'immobilisa via ses dons et l'amena vers lui.

—Tu as le choix, lui dit-il. Soit tu vis tes derniers instants... Soit tu vis ton jour de chance. Choisis.

—Mon... mon jour de chance, fit le policier, la voix tremblotante. Mon jour de chance.

—Alors allons-y pour ton jour de chance, dit Jack tout en prenant par la pensée, l'arme de poing du policier encore rangée dans son holster, avant de le jeter hors de sa portée. Je vais te laisser la vie sauve. Tu vas faire comme les spectateurs actuellement... c'est à dire fuir. Et puis tu raconteras à tes collègues, je parle bien entendu de ce qui sont encore en vie, ce que tu viens de vivre. Tu vas témoigner devant les journalistes et leur dire qu'aucune force sur cette planète ne pourra m'arrêter. Et enfin, pour terminer... Tu diras que c'est à cause de ton supérieur que tous ces pauvres policiers sont...morts... C'est vous qui avez tirés les premiers.

Lorage relâcha son emprise et libéra le policier qui se mit à courir pour quitter la piste. Jack estima qu'il était temps pour lui également, de partir et de regagner son QG secret et de préparer la suite de son plan. A présent, le monde le connaissait et avait peur de la menace qu'il pouvait représenter. Mais Jack espérait aussi qu'un jour, les paranormaux le voit comme leur unique chance de survit et que le monde en proie à la tyrannie du Nouvel Ordre, le voit comme l'unique chance de le faire tomber.

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