Chapitre 9

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Quand ils se réveillèrent, l'après-midi était passée, et Martine terminait de préparer le dîner.

Un peu sonnés, ils la rejoignirent dans la cuisine :

- Ah, les belles au bois dormant, vous voilà ! Dit-elle joyeuse.

- Hello ... répondirent-ils en chœur. Lysandre se cala contre le plan de travail et le frigo américain, Yanel le rejoignit. Collés ainsi l'un à l'autre, ils se maintenaient en équilibre. Martine sourit en les voyants dans cette posture. Les ayant déjà trouvés endormis tout à l'heure, ils avaient enfin fait la paix et cela la soulageait.

- Je suis vraiment fatigué, je crois que je vais m'allonger encore un peu... A peine avait-il dit cela que Lysandre le sentit se laisser aller contre lui, presque de tout son poids.

- Tu ne te sens pas bien ? S'inquiéta-t-il soudain.

- Il très pâle, oui ...remarqua Martine.
- Je ...

Et Yanel s'effondra. Aidé de Martine, Lysandre le transporta sur le canapé. Très vite Yanel ouvrit les yeux :

- Qu'est-ce qui s'est passé ?

- Tu es tombé dans les pommes mon grand, répondit Martine. Comment te sens-tu ?

- Ça va, je crois que ça va ... il se redressa pour s'asseoir. Il avait repris des couleurs et semblait récupérer en effet.

- Tu nous as fait une belle frayeur. Tiens, bois-ça. Fit Lysandre en lui tendant un verre d'eau.

Yanel bu en grimaçant, l'eau était sucrée, mais cela lui fit du bien. Il voulut se lever mais Martine l'en empêcha :

- Tout doux mon grand, reste encore un peu assis, je vais finir de mettre la table et tu vas manger un morceau, OK ? Préviens tes parents, tu es invité ici ce soir !

- Merci, c'est gentil. Et il lui tendit le verre.

Elle partit dans la cuisine, le laissant aux bons soins de Lysandre qui s'installa dans l'angle du canapé. Il n'eut rien à dire, déjà Yanel avait pivoté pour se caler entre ses jambes. Lysandre passa juste un bras autour de sa taille et il le maintint contre lui.

-Il faut que j'appelle mes parents, la voix de Yanel était faible. Il leva le visage vers Lysandre, cherchant son regard. Il le sentit bouger, apparemment il fouillait dans la poche de son jean, puis il l'entendit utiliser son portable.

- Bonsoir, c'est Lysandre. Oui, ça va merci. On est chez Martine et Yanel est invité à dîner... et à passer la nuit ici, si vous êtes d'accord. Oui ? Ok, c'est sympa. Heu, ... il dort, oui, ... ces derniers jours ont été pénibles pour lui aussi. Entendu, je lui dirai. ... Oui sans soucis. Merci, à demain et bonne soirée.
Il raccrocha et dit à l'oreille de Yanel :

- Tu dors ici ce soir...
- Merci ... je n'ai pas la force de prendre le bus ...

Il se redressa un peu et se retrouva nez à nez avec Lysandre. Leurs bouches étaient vraiment proches, leurs lèvres se frôlèrent presque... L'attraction était telle qu'ils succombèrent.

Le baiser qu'ils échangèrent fut empreint d'une infinie tendresse et passionné à la fois. Comme une bouffée d'oxygène, ils eurent l'impression de respirer sans entrave, enfin libérés d'un poids trop longtemps porté, étouffant leur cœur. Tout était en accord, leur rythme, leur souffle, les sensations ressenties.

La voix de Martine les invitant à venir manger résonna depuis la cuisine, ils l'avaient bien entendue et ils s'interrompirent, pratiquement à bout de souffle. Non, ils en voulaient encore. Le second baiser eut un goût de désespoir comme s'ils n'avaient plus que lui pour assouvir ce qu'ils ressentaient l'un pour l'autre.

Un autre appel de Martine ne fit qu'intensifier les choses. Yanel était presque sous Lysandre à ce moment-là, tant leur échange était intense et profond. Il s'abandonna complétement à ses lèvres tellement douces, à sa langue chaude et fiévreuse, à ses mains qui glissaient sous son tee-shirt à la recherche de sa peau. Il adorait tout. Il sentait Lysandre vibrer et il devinait qu'il en voulait encore plus, lui aussi.

Martine posa le plat sur la table et n'entendant rien, se demanda s'ils s'étaient endormis à nouveau. Elle hésita, puis jeta un œil dans le salon. Elle les vit et resta bloquée, fascinée. Elle recula doucement sans bruit et retourna dans la cuisine où elle s'enferma. Encore retournée elle se servit un verre de Martini qu'elle but cul-sec.
Lysandre ne pouvait se résoudre à arrêter, chaque fois qu'il faisait mine de, Yanel reprenait ses lèvres. Il ne cherchait plus à vouloir mettre fin à tout ça, non. Il sentait les doigts de Yanel glisser dans ses cheveux, puis revenir à son visage. Il n'avait jamais remarqué à quel point la peau de ses mains, de ses doigts était aussi douce et pourtant, ils avaient souvent parcouru sa cicatrice à chaque fois que Yanel lui faisait ses soins. Et cette douceur il la retrouvait dans sa manière d'embrasser.

Dès que leurs langues se touchaient, se mêlaient, il gémissait presque de douleur tant c'était bon.

- Pourquoi maintenant, pourquoi on a attendu aussi longtemps...

- Je n'en sais rien, ...

- Je t'aime, souffla Lysandre à son oreille avant de l'embrasser dans le cou. A cela, Yanel répondit en se cambrant et en s'agrippant à lui. D'un mouvement du bassin, il le fit basculer et se retrouva sur lui.

- Je t'aime, chuchota Yanel quand les lèvres de Lysandre embrassèrent la commissure des siennes. Le fait de prononcer ces trois mots le bouleversa tant qu'il en eut les larmes aux yeux. Lysandre le vit et il murmura :

- J'ai cru que tu ne le dirais jamais... j'étais tellement désespéré quand tu m'as dit à l'hôpital que tu me détestais... Dis-le encore...

-Je t'aime, je t'aime... Je crois que je t'aime depuis toujours... « Et dire qu'on a failli passer à côté... »

Il glissa sur le côté libérant enfin Lysandre.

Martine en était à son troisième Martini, et cela commençait à se voir. Les joues rosies par l'alcool, elle les accueilli avec un large sourire, pompette !

-Alors les amoureux, on est disposé à passer à la casserole ? Lança-t-elle sur un ton enjoué, appuyé d'un clin d'œil.

Les garçons se regardèrent d'un air entendu :
- Heu oui ... commença timidement Lysandre. Tu vas bien ? Tu as bu... un ... apéro ? Hasarda-t-il en cherchant une bouteille d'alcool du regard.

-Un apéro ? Meuh non ! Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? Hoqueta-t-elle alors.

-Ici. Fit Yanel en indiquant d'un signe de tête une bouteille de Martini sur le plan de travail, entre celle d'huile et du vinaigre. J'espère qu'elle ne s'est pas trompée ...

- Mince alors ... Elle est choquée tu crois ?

- Dites-voir tous les deux ! Je vous entends ! Martine avait les poings sur les hanches, affublée de son tablier et de ses joues roses, elle était comique à voir, d'ailleurs les deux amis se mordirent les lèvres pour ne pas éclater de rire. Et ne voulant pas être désobligeants, ils s'installèrent à table, sans rechigner.

Au fur et à mesure du repas, elle décuva, ce qui permit de parler de la situation.

- Je ne suis pas choquée ! Dit-elle presque outrée, c'est juste que ... je ne m'y attendais pas, là, comme ça, ici ... enfin, ... vous comprenez ?

- Oui, acquiesça Lysandre.

- Désolé, pour ça... Ajouta Yanel. Pourtant, il ne se sentait pas coupable ou honteux. Il aimait Lysandre et c'était tout, c'était simple. Il se moquait que ce soit un garçon, quelle importance cela pouvait bien avoir ? Il coula un regard à Lysandre qui rassurait Martine. Il le voyait un peu préoccupé par sa réaction et il ne voulait surtout pas la braquer ou lui imposer quoi que ce soit.

- Ne t'en fais pas, nous n'allons pas te gêner, nous resterons discrets...

- Je ne m'en fais pas, je ne veux pas non plus vous interdire quoi que ce soit vous êtes majeurs après tout... Elle leva les deux index et majeurs pour simuler les guillemets en disant cela. Elle soupira et se servit un grand verre d'eau, l'alcool déshydratait décidément beaucoup ...

Yanel soupira, elle comprenait et c'était une bonne chose. Lysandre avait aussi l'air soulagé. Il passa sa main machinalement sur son visage et toucha sa cicatrice. Elle avait commencé à guérir au point qu'elle disparaissait presque. Pourtant, Yanel lui trouvait quelque chose de beau, de charmant. Le visage de Lysandre était parfait selon lui. Il avait souvent trouvé qu'ils se ressemblaient, comme s'ils étaient frères, et cette cicatrice les différenciait une fois pour toutes. Mais pour lui, Lysandre restait beau. Il avait si souvent touché la peau de son visage, si douce et si fine, comment n'avait-il pas été bouleversé alors à ce contact ? Peut-être parce qu'il ne voulait pas admettre ce qu'il ressentait, ou qu'il ne le comprenait pas. En tout cas, assis à côté de lui, il le regardait parler à Martine et il se disait qu'il en était désespérément amoureux.

Après le dîner, les garçons sortirent faire un tour. Martine avait besoin d'espace. Les prochains jours, il faudrait s'organiser autrement pour ne pas trop imposer leur présence. Ils passèrent par le parc, et ne résistèrent pas à un tendre câlin, à l'abri des regards, sous les saules pleureurs.

-Il faudrait rester discrets, comme tu le disais tout à l'heure, dit Yanel.

- Oui, c'est vrai... Ils relâchèrent leur étreinte et reprirent leur promenade sur le sentier du parc.

- On fait comment demain ? On va chez moi ? Proposa Yanel.

- Pourquoi pas. Je me dis que c'est pareil pour tes parents... ne pas s'imposer et tout ça...
- J'en viens à me dire qu'en classe au moins on serait tranquilles, soupira Yanel.

Lysandre ne répondit pas, il hocha juste la tête. Il était soudainement dans ses pensées. Il se demandait comment ses parents auraient pris la chose, Yanel et lui, ensembles ...

- Je pense qu'ils l'auraient bien pris. Dit à haute voix Yanel, qui perspicace, avait deviné ce qui le tracassait.

- Tu es incroyable ! Comment as-tu deviné ?

- Je pourrai te l'expliquer mais cela ferait perdre tout son charme à mon intervention !

Ils rirent. Cela faisait longtemps, depuis le jeudi précédent, le fameux jour où Lysandre tentait de se suicider.

Tout comme Yanel sut lire dans les pensées de Lysandre, ce dernier vit le sourire qu'arborait son ami s'effacer pour laisser place à un air triste et inquiet.

- Je ne vais pas recommencer.

- Promets-le-moi.

- Je te le promets. Et il lui prit la main pour la serrer fort. Ils marchèrent un peu main dans la main puis, en quittant le parc, ils les relâchèrent.

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