Deux deniers, deux euros, deux dollars, deux câlins :
C'est tout ce qu'on demande à qui est dans le lin.
On croirait bien les morts hagards alors ravis,
En vérité ils sont perturbés par la vie.
Pathétique squelette, ayant perdu ma force,
Sur mon piteux esquif, pauvre arbre sans écorce,
Je subis de plein fouet la cruauté d'un monde,
Toujours dévalisé, sans passant à la ronde.
Pourtant je préviens, moi, l'oublié, tabassé :
De l'argent dans la mort, on en a plus qu'assez.
Qui donc se doutera que je ne suis qu'un test ?
Le vertueux s'envole, et le truand se leste.
Qu'ai-je fait dans la vie pour avoir cette mort ?
Ai-je commis un crime, ai-je eu si souvent tort ?
Je ne me souviens plus, pourtant pas de pardon :
S'il y a un enfer, il s'appelle « abandon »...
Deux deniers, deux euros, deux dollars, deux câlins :
C'est tout ce qu'on demande à qui est dans le lin ;
Et pourtant j'ai pu craindre, en tout temps, toute époque,
La balle et le bâton, le boulet et le roc.
Mais à quoi bon chanter, sur ces eaux insipides ?
Si jamais on m'entend, bien portant ou livide,
Écoute enfin le souhait d'un cadavre en devis :
Humain, fais-moi des morts pensant moins à la vie.