Deux hommes se trouvaient dans une immense salle, entièrement vide. La pièce blanche était faite autour de deux tables, comportant une cinquantaine de chaises. Mais les deux personnes étaient tête à tête, sans le moindre spectateur. Il régnait une ambiance froide, la tension se sentait dans tous les environs. Leur petite réunion était improvisée, elle n’aurait jamais dû avoir lieu. Pourtant, les vies de plusieurs centaines de personnes étaient en jeu.
 — C’est inenvisageable, déclara fermement un homme à la chevelure brune, sais-tu combien de personnes finiraient par mourir ?

 Les deux hommes étaient des personnalités importantes de la station spatiale. Le premier, l’homme brun aux yeux clairs se nommait Emmett Henderson. Il n’était nul autre, que le dirigeant en chef du comité scientifique de l’Orion. La personne en face de lui, était Harris Caïn. Depuis plus d’une vingtaine d’années, désormais, il était dirigeant de la station. Il avait les pleins pouvoirs, ce qui faisait de lui, l’homme le plus redoutait du nouveau monde. Il était assez petit, mais imposant, ses cheveux blancs témoignant du temps qu’il mettait dans son travail.
 — Le monde a simplement besoin de nouveauté Emmett. Si nous restons constamment à ce point de non-retour, nous ne pourrons jamais avancer. Il faut couper les liens, se détacher de l'Ancien Monde. Tu l'as toi-même dit, les progrès de sauvetage de la Terre sont moindres. Pourquoi donc s'obstiner à aider quelque chose qui ne peut être sauvé ? rétorqua le dirigeant de l'Orion.
 — Mais soit réaliste ! protesta-t-il. Si tu arrêtes l'activité de nos navettes, tu briseras des familles. Sans parler de toutes les personnes qui travaillent sur l'Orion en vivant sur Terre. As-tu pensé à eux ? Des personnes vont mourir, et beaucoup. Cette décision ne sera jamais acceptée par peuple !
 — Ces parasites de Terriens n'ont pas besoin de nous. Ne penses-tu pas que leurs petites manifestations ne le montrent pas suffisamment ? questionna M. Caïn. De plus, l’avis du peuple ne vaut rien. Si aucune décision des prises, les habitants de Détroit finiront par nous tuer un à un. Je ne peux pas tolérer cela, quelques vies misérables valent moins que l’humanité tout entière.

 À ce stade, les deux collègues s'étaient relevés. Emmett passa une main dans ses cheveux, exaspérés. Il n'allait donc jamais comprendre. Autour d'eux, la pièce semblait de plus en plus étroite tant la tension montait. Les murs d'un blanc très pur se rapprochaient, alors que les deux grandes tables qui les séparés venaient à se resserrer. La station semblait s’être arrêtée, le temps lui, ne suivait plus les mouvements des hommes politiques.
 — Nous pouvons, et devons, les aider, exigea le scientifique. N'as-tu pas la moindre pitié pour eux ? Ma femme est morte des contaminations que l'on trouve là-bas, car ils ont refusé de la faire entrer dans l'Orion plus tôt ! Des milliers de personnes pourraient être sauvés si nous ouvrions nos portes un peu plus et toi, tu veux seulement les fermer.
Depuis des années, l’hôpital de la station avait fermé ses portes à tous les étrangers. Ils ne voulaient plus accueillir ces gens. Alors les malades restaient sur Terre, condamnés à une mort certaine.
 — Ta femme est le parfait exemple, osa déclarer son associé, ils peuvent nous apporter des maladies et bien plus. Dans une semaine, je ferais passer une loi qui interdira toute circulation, même professionnelle entre la Terre et l'Orion. Et il n'y a aucune contestation possible, conclut-il avant de s’avancer vers la sortie de la pièce, laissant l'autre homme seul avec ses requêtes.

  À la suite de ces mots, Harris Caïn se leva et sortit de la pièce, ne laissant derrière lui qu’un silence sans fin, et une décision qui ne plairait à personne.