Chapitre 17

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« Evan, viens me chercher, par pitié ! »

Cet appel fut le dernier. Yoan n'avait plus assez de forces pour crier encore.

Pourtant, cela suffit à maintenir la Faille ouverte. Tant que Yoan y croyait, tant qu'il gardait espoir, la Faille resterait ouverte. De l'autre côté, Novah et Evan la virent s'agrandir.

-Maintenant ! Cria Novah, c'est maintenant ou jamais ! Vas-y, je vous attends ici.

-Et si la Faille se referme, et que ...

-Tu le retrouveras et vous reviendrez ensemble, aies confiance ... Vas mon Fils ...

Mais Evan n'entendit pas ces derniers mots, déjà il avait plongé dans la Faille.

Après s'être faufilé, il avait rabattu ses ailes le long de son corps et s'était laissé aller en chute libre, pour gagner en célérité. Evan cria son nom de toutes ses forces, plusieurs fois, sans obtenir de réponse. Il filait à une allure folle, les parois de la Faille se rapprochant un peu plus de lui, à mesure qu'il avançait.

« Pourvu que j'arrive à temps, pourvu que tu sois encore en vie ... Il le faut, je ne me le pardonnerai jamais si tu venais à mourir .... Où es-tu ?...

« Jamais je n'aurai pensé pouvoir survivre à tout ça et maintenant c'est toi qui disparaît. Non ! Je refuse de te perdre ! J'aurai du rester à ma place, et ne pas tomber amoureux de toi, j'aurai du rester l'Ange Gardien que je suis sensé être, mais je n'ai pas pu, je te demande pardon ... Yoan, je te demande pardon ... »

Novah tournoya longtemps au-dessus de la Faille, et ce qu'il craignait commençait à se produire : la Faille se refermait doucement.

- Mon Dieu non ...

Tempérance et Prudence pouvaient aussi le voir depuis le rebord de la Fenêtre Céleste, désespérés, incapables de pouvoir porter secours à Evan et Yoan, ils se morfondaient littéralement sur place.

- Que peut-on faire ? Murmura Prudence, ils sont perdus, je ne veux pas y croire, mais ...

- Tout n'est pas perdu, tant qu'ils y croient eux !

- Tu le penses vraiment ? J'aimerai avoir ta confiance, mais j'ai peur que cette fois soit la dernière.

- Novah a l'air d'y croire ...

Soudain, ils le virent foncer vers la Faille.
Tempérance exulta le premier, en apercevant une main sortir de l'ouverture lumineuse.

-Là ! Regarde !! Ils reviennent !!

Prudence se pencha et vit également une main se tendre, puis un avant-bras ... celui d'Evanescence.

Novah attrapa l'Ange et le tira en arrière de toutes ses forces, car la Faille en se refermant aspirait tout vers l'intérieur.

-Allons-y ! Fit Prudence Malgré ses blessures et la douleur qu'il ressentait, il s'envola pour aider Novah.

Tempérance le rejoignit d'un battement d'ailes et à trois, ils parvinrent à extirper Evan et Yoan de la Faille.

****

L'Ange garda le Mortel dans ses bras, comme un trésor, un bien précieux. Il le berça doucement, en lui caressant le visage, essuyant ses propres larmes qui l'inondaient.

La peau bleuie par le manque d'oxygène donnait à Yoan un aspect irréel. Comment avait-il pu maintenir la Faille ouverte dans cet état ?

Novah resta silencieux, cherchant une réponse. Tous étaient atterrés par la situation dramatique, ne voulant pas y croire.

Evan était sous le choc, complètement déconnecté de la réalité. Il continuait de bercer le corps inerte du jeune Mortel, comme si ce dernier faisait un somme.

-Ev... fit Prudence à voix basse en lui touchant l'épaule. Il faut le laisser...

-Non, ... jamais !

Il leva les yeux et regarda les autres. Sa peine était immense face à la tragédie et tous le couvaient d'un regard bienveillant. Les Sages du Temps s'étaient déplacés et avaient décidé de lever le sortilège qui empêchait l'Ange Evanescence de retourner sur Terre.

Réalisant que rien n'y personne ne pouvait sauver Yoan, il se résigna et emporta le jeune Mortel dans son monde.

Il vola le cœur lourd, les larmes l'aveuglaient et il avait presque du mal à s'orienter. Chaque battement d'ailes qui le rapprochait de la Terre était comme une torture, une horrible douleur. Il craignait tant de le laisser là-bas.

Le jour s'était levé, et le soleil commençait à illuminer une grande partie de la chambre à coucher de Yoan. La Faille s'était refermée de ce côté-ci également. Rien ne pouvait laisser imaginer un seul instant qu'il ait pu y avoir un passage entre deux mondes ici, sauf peut-être les débris du miroir de l'armoire qui jonchaient toujours le sol...

Evan ferma les yeux et soupira pour tenter d'évacuer le poids qu'il avait sur le cœur, mais rien n'y fit. « Non ... jamais je ne te laisserai, je t'en fais la promesse ... je te le jure, je ne te laisserai pas seul... ».

Il allongea Yoan sur son lit, et intentionnellement fit du bruit en donnant un coup au sol avec son pied. Il attendit jusqu'à ce qu'il entende frapper à la porte. La mort dans l'âme, il s'envola par la fenêtre mais ne s'éloigna pas.

Après l'avoir appelé plusieurs fois et n'ayant obtenu aucune réponse de la part, Liliane entra dans la chambre de son neveu. Elle avait bien entendu un bruit sourd et inquiète était montée pour voir si tout allait bien. Mais en le voyant ainsi, allongé sur son lit, inerte et surtout le visage d'une couleur à faire peur, elle poussa un hurlement.

Alertés par ses cris, Lucas, Camille et Alex arrivèrent.

-Vite les secours ! Fit Lucas en se précipitant hors de la chambre.

-Qu'est-ce qui se passe ? Il a ... va bien ? Camille se pencha au-dessus de l'épaule de Liliane, qui vérifiait le pouls de Yoan.

-Je ne sais pas, je ne comprends pas ... Mon Dieu, ...

-Ils arrivent ! L'ambulance va arriver dans quelques minutes ... comment il va ? Demanda Lucas presque hors d'haleine.

- Je... je ne trouve pas son pouls ... murmura Liliane la voix tremblante ... c'est horrible ... je ne sens rien ...

Elle leva les yeux vers tout le monde, complètement paniquée.

Alex s'était agenouillé près du lit et il s'était penché tout près du visage de son cousin.

-Il respire ... je crois ...

Tous attendirent qu'il confirme, soudain on sonna à la porte d'entrée.

-L'ambulance ! Lucas descendit en trombe les escaliers.

Les ambulanciers et le médecin secouriste entrèrent dans la chambre. Alex leur donna le peu d'information qu'ils avaient constaté et tout alla très vite.

Yoan fut évacué au Centre Hospitalier de la ville.

                                   ****

-Comment va-t-il ? Demanda Lucas en voyant le médecin arriver vers eux.

-Son état est préoccupant. Nous avons pu relancer son cœur... Il est resté apparemment longtemps sans oxygène, pourtant, aussi incroyable que cela puisse paraître il est encore en vie. Tout va dépendre de lui et de sa volonté à vivre, il doit se battre maintenant.

-Il peut s'en sortir alors ?

-A ce stade tout est envisageable, mais je ne peux pas me prononcer. Son cerveau fonctionne, il réagit positivement aux stimuli mais comme je vous l'ai dit, il faut qu'il se batte. Est-ce que vous savez ce qui l'a mis dans cet état ? Une activité sportive intensive ou autre chose qui aurait pu le choquer ?

-Il est vrai qu'il a vécu un grand traumatisme, son frère jumeau est décédé il y a trois mois... Expliqua Lucas.

-Oui, c'est un choc non négligeable ... Mais cet état d'asphyxie ... c'est étrange...

- Mais il va s'en remettre n'est-ce pas ? Demanda Liliane.

- Pour le moment, il est stable, alors je vous propose de vous reposer un peu. Nous vous contactons si quoi que ce soit se passe.

-Peut-on le voir ?

-Oui bien sûr.

Lucas et Liliane remercièrent le médecin et retournèrent auprès de Camille et Alex. Ils se rendirent à tour de rôle au chevet de Yoan, puis, durent se faire à l'idée de rentrer à la maison.

Evan, sous sa forme humaine, se glissa hors de sa cachette et remonta le col de la blouse bleue qu'il avait enfilée pour passer inaperçu parmi le personnel hospitalier.
Il entra dans la chambre, et s'approcha du lit où Yoan était étendu. La machine qui l'aidait à respirer était impressionnante, mais ce qui le touchait le plus, c'était de voir le beau visage du jeune homme recouvert par le masque à oxygène. Son cœur se serra encore plus, lorsqu'il sentit entre ses doigts sa main inerte et gelée. Il la garda dans une de ses mains pour tenter de la réchauffer tandis que l'autre lui caressait le front, le dégageant de quelques mèches de cheveux rebelles et se pencha pour y déposer un baiser léger. Puis, du bout des doigts, il redessina le contour de son visage, suivant la ligne de ses mâchoires, évitant de toucher au masque à oxygène.

- Oh Yoan, ... je t'en prie, reste avec moi ... Reviens-moi ... Je ne t'abandonnerai plus, c'est promis, je reste auprès de toi, mais je t'en supplie, reviens ... tu me manques tellement ...

Incapable de prononcer ces mots à haute voix, il les pensa, comme si cela pouvait mieux parvenir à l'esprit de Yoan, à son cœur, à son âme.

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