Chapitre 1

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-Vous en êtes sûre ? insista Yoan.

-Je suis désolée, mais votre billet n'est ni remboursable, ni échangeable, dit la préposée au guichet SNCF.

Yoan secoua la tête, furieux contre lui-même et prit son billet. Tant pis, il perdrait une petite somme, mais il ne pouvait pas prendre ce train. C'était de sa faute, et il le savait. Il aurait dû dire non dès le début, mais il sentait aussi qu'il blesserait son oncle et sa tante s'il déclinait leur invitation. Depuis le décès de Noah, il n'avait envie de rien, et il avait besoin d'être seul. Et cela, personne ne semblait vouloir l'entendre, le comprendre. Il appela sa tante, lui annonça qu'il ne viendrait pas, pourtant elle fit la sourde oreille :

- Viens, ça te fera du bien de sortir de chez toi ! Il y aura tes cousins, ils reviennent d'Australie et ce sera l'occasion de se réunir tous ... dans d'autres circonstances...

- Je sais, mais, ...

- Lucas te récupérera à la gare, pas besoin de prendre un taxi ...

- Pas la peine, j'ai ...

- Et je vais faire votre ... ton plat préféré, des lasagnes !

- Je ne viens pas !

- J'ai déjà préparé la chambre et ...

Soudain, Yoan éleva la voix, chose qu'il détestait faire, sa tante ne l'écoutait pas :

- STOP !!

Silence. Il sut qu'il avait toute son attention.

- Tu m'entends ? Je-ne-viens-pas ! !

- Comment ça ? Tu ne viens pas ?

- Ecoute-moi, ... s'il te plait ...

- Oui...

- Je ne viens pas, ... je ne peux pas. J'ai rendu mon billet...

- Pourquoi ?

- Parce que je ... c'est trop tôt .... Comprends-moi, s'il-te-plait ...

En disant ces derniers mots, sa voix trembla et il sentit les larmes monter. « Non, pas maintenant ... », il était parvenu à tenir le coup jusqu'à présent, il fallait qu'il continue ainsi.

- Je suis désolé, mais ... revenir, à la maison, c'est trop difficile ... Il est encore trop présent, tu comprends ? Murmura-t-il.

- D'accord. Je comprends, ...

Il ferma les yeux, mais les larmes coulèrent malgré tout. Elle perçut le sanglot qu'il essayait d'étouffer et capitula. Noah n'étant décédé que depuis un mois, son neveu était encore fragile, elle pensait que l'entourer de ses proches lui aurait apporté du réconfort, mais non, il refusait tout contact. Il se débattait seul contre son chagrin et elle enrageait de le voir aussi entêté.

Il y a sept ans, après la mort de sa sœur et de son beau-frère dans un crash d'avion, Liliane et son mari Lucas, avaient accueillis les jumeaux alors qu'ils avaient quinze ans. Très vite, elle s'était attachée à eux, comme une mère, elle qui n'avait pas pu avoir d'enfant. Les garçons, au contraire, n'avaient pas réussi à tisser ce lien. Ils étaient déjà trop grands pour cette substitution et puis, leur fusion était telle qu'ils se suffisaient à eux-mêmes.

Yoan ne se sentait pas le courage de revenir là-bas, et d'y retrouver leurs chambres, leurs affaires, revivre les souvenirs, le voir dans chaque livre ou bande dessinée qu'il aura entre les mains, sentir son odeur. Non, il n'irait pas, un point c'est tout.

- Entendu mon grand, on fait comme ça. Tu viens dès que tu en as envie, tu sais qu'on est là ...

- Merci. Je te rappellerai, c'est promis.

Il raccrocha et essuya les larmes qui inondaient son visage, Dieu que Noah lui manquait. Son rire, sa désinvolture face à tout, son humour, lui, tout simplement. Il essaya de soupirer, mais à la place, ce fut une plainte qui sortit. Il repensait à ce fameux jour où Noah avait eu cet accident mortel. Il ne comprenait toujours pas comment cela avait pu arriver. Il s'était senti si démuni face aux autorités, aux sauveteurs, aux médecins. Il avait tellement espéré que tout ceci ne soit qu'un horrible cauchemar et qu'il retrouverait Noah assis sur le canapé, comme toujours, avec une BD entre les mains. Mais non, il l'avait su à la seconde même où le drame s'était produit, Noah le lui avait dit directement : « Je pars, je te quitte maintenant et pour toujours. Je t'aime ».

La voix de Noah lui était parvenue alors qu'il était en pleine réunion de travail. Claire, distincte, comme s'il avait été là, près de lui.

Quand Yoan l'avait raconté à sa tante, elle lui avait répondu qu'elle connaissait un très bon psy... Personne ne le comprenait, personne ne voulait le comprendre et admettre que Noah et lui pouvaient avoir ce genre de contact

Yoan s'assis sur un banc, éreinté. Il avait mal partout, au dos, à la poitrine, au cœur. Il souffrait et il n'en pouvait plus de cette douleur lancinante qui l'usait.

Il soupira et il eut un haut-le cœur, il devait partir d'ici, rentrer chez lui. En se levant il vacilla et s'effondra.

Evanescence n'eut que le temps de le rattraper avant qu'il ne touche le sol. Les passants alertés demandèrent s'il avait besoin d'aide, mais Evan les rassura. Il battit alors des paupières, figeant le temps et s'envola emportant Yoan dans ses bras. Dès qu'il eut disparu, le temps reprit son cours et les passants se regardèrent hébétés, ne comprenant pas pourquoi ils étaient tous réunis là, autour d'un banc, en pleine gare...

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