Un repas complice

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Comme Valentine débarrassait une partie de la table avec Marcelle, cette dernière l’interpella discrètement.

— Dis-moi, Valentine, est ce que ça va, toi ?

— Oui, Marcelle, je vais bien, ne t’inquiète pas pour moi.

Tracassée, elle lui demanda,

— Mais quand même, là tantôt, tu pleurais avec Sébastien, il y a quelque chose qui ne va pas ? Il t’a dit un truc de travers ?

— Oui, j’ai pleuré, mais il s’agissait d’une discussion entre Sébastien et moi, nous avons éclairci certains points.

— Et ça t’a fait pleurer… Dis-moi, ça se passe bien entre lui et toi ? C’est lui qui t’a fait pleurer ?

Marcelle semblait inquiète, Valentine tenta de la rassurer,

— Oui Marcelle, cela se passe bien entre Seb et moi, ce n’est pas à cause de lui que je pleurais.

— Tu ne veux pas en parler, c’est ça ?

— Effectivement, je préfère ne pas t’en parler maintenant, un jour peut-être.

Valentine lui sourit, avec un brin de malice au fond des yeux, ce qui poussa Marcelle à lui poser la question qui lui brûlait les lèvres,

— Valentine, je vais peut-être te sembler abrupte mais je voudrais te poser une question très personnelle.

Valentine haussa les sourcils et lui répondit,

— Euh … Oui, pose toujours, je verrai bien si j’accepte d’y répondre…

— Est-ce que tu es attirée par Sébastien ?

Valentine ouvrit grand les yeux et resta bouche bée, un peu décontenancée par la question de Marcelle.

— C'est-à-dire ? Attirée comment ?

— Attirée par lui, en tant qu’homme.

— Euh… Tu veux dire… Si j’envisage qu’un jour lui et moi… Nous pourrions…

— Etre ensemble !

Marcelle avait répliqué vivement et pleine d’espoir. Valentine était un peu déstabilisée par tant de franchise de la part de Marcelle.

— Ah… Oui, ok ! Et pourquoi songes-tu à ce genre de chose Marcelle ?

— Oh, je suis désolée Valentine, je viens de mettre les pieds dans le plat, c’est ça ?

Valentine la laissa continuer, avec un sourire en coin.

— Je suis désolée, vraiment ! Mais tu sais, je te voyais déjà avec lui, avec un homme qui te respecte et qui est réellement attiré par toi en tant que personne. Tu sais, je suis sûre que vous feriez un très beau couple vous deux, mais bon, si tu n’es pas attirée par lui, cela ne se fera jamais. Désolée, je n’avais pas envie de plomber l’ambiance, mais comme je le voyais si attentionné avec toi à table…

Valentine posa une main sur l’épaule de Marcelle qui sembla se décomposer devant elle.

— Et ça te plairait comme situation ?

Dans ses petits souliers, Marcelle répondit franchement,

— Oui Valentine, ça me plairait, pour lui et pour toi, mais toi, tu penses que je pourrais un jour te voir heureuse dans les bras de quelqu’un que je considère plus comme mon fils que mon propre fils ? Ou est-ce que je suis complètement à côté de la plaque ?

Valentine s’approcha d’elle et lui dit tout bas à l’oreille,

— Je pense que cela pourrait arriver plus tôt que tu ne le penses, mais je ne veux pas mettre la charrue avant les bœufs.

Visiblement soulagée, Marcelle s’emporta,

— Oooh Valentine, c’est vrai ?

Valentine la tempéra.

— Oui, mais pour le moment, chut !

Marcelle la prit dans ses bras et lui chuchota à l’oreille,

— J’espère que cela arrivera bientôt.

Puis, après l’avoir lâchée, elle ajouta,

— Viens, on va leur amener le dessert pour clôturer ce barbecue !

Elles retournèrent à table avec le dessert ; au choix, ou les deux, salade de fruits frais et moelleux au chocolat. Ce dernier sentait divinement bon dans l’échelle d’évaluation olfactive de Valentine.

En revenant auprès des autres convives, Marcelle claironna,

— Et voici le dessert !

Tout le monde choisit et se servit, Valentine demanda à Sébastien ;

— Et toi, tu prends quoi ?

— Un morceau de moelleux s’il te plait.

— Il sent super bon, il doit être délicieux.

— Tu en prends aussi ?

— Oui, je ne le laisserai pas passer celui-là !

— J’ai une idée ! Attends.

Il se leva, parla à l’oreille de sa tante qui acquiesça à ce qu’il disait ou demandait puis Valentine le vit revenir avec, dans les mains, deux bouteilles de vin blanc avec une belle robe dorée.

Il ouvrit les deux bouteilles, en prit une pour se rasseoir aux côtés de Valentine et laissa la deuxième au restant de la tablée.

— Un bon petit Sauternes pour accompagner le moelleux au chocolat, ça te dit ?

— Avec plaisir Seb, tu commences à me connaître.

Ils trinquèrent à deux et sirotèrent le vin entre deux bouchées de moelleux.

Marcelle les observa du coin de l’œil… Oui, il lui semblait bien que quelque chose se passait entre eux deux. Elle sourit.

Le repas se termina, Vanessa débarrassa la table avec Fabrice, Marcelle massa les épaules de François qui se plaignit de ne plus avoir vingt ans et d’être crevé par une journée de débroussaillage de jardin. Vanessa passa à côté de sa mère et lui glissa à l’oreille ;

— Eh bien, ils sont dans leur bulle ces deux-là !

— Moi ça me plait de les voir comme ça.

— Oui, ils sont mignons, mais dans leur bulle !

François intervint,

— Dans leur bulle, oui ! Mais Seb ne perd pas le nord, il a réservé une bouteille entière pour eux deux ! Il sait ce qui est bon.

Entre deux rires, Vanessa lui retroqua,

— Aha François, tu crois qu’il la saoule ou qu’il se saoule pour pouvoir lui déclarer sa flamme ?

— En tous les cas, ça roucoule ferme !

Voyant son compagnon et sa fille sur le point d’engager des paris sur l’existence hypothétique du couple, elle les coupa,

— Oh mais arrêtez, vous tous, laissez-les se rapprocher à leur rythme, allez, venez faire la vaisselle !

Marcelle regarda sa fille et son compagnon de travers en tentant de les pousser vers la cuisine. Vanessa renchérit,

— Ok ! Allez, on y va, comme cela nous aurons fini plus vite … et comme ça, les deux tourtereaux seront tous seuls.

François la relança,

— Tu crois qu’ils en profiteront pour finalement s’embrasser ?

— Aucune idée ! Dis, maman, là où ils sont, on les voit depuis la cuisine ?

En levant les yeux au ciel, elle leur rétorqua,

— Mais enfin, foutez-leur la paix !

Puis, tous trois sursautèrent en entendant Sébastien leur dire calmement ;

— Oui, c’est ça, foutez-nous la paix les gars, laissez-nous siroter notre bouteille de vin à deux !

Valentine était écroulée de rire à côté de lui, elle se reprit puis leur dit,

— En fait, comme on vous entendait très bien, nous nous sommes demandé si vous comptiez applaudir en cas de bisou ?

Valentine pouffa à nouveau, Sébastien aussi. Marcelle intervint,

— Eh bien voilà, bravo tout le monde… Moi qui voulais que ces choses-là se passent à votre rythme, je suis désolée.

Elle regarda son compagnon et sa fille avec de gros yeux. Valentine la rassura en lui lançant, sur un ton plein d’humour,

— Mais ce n’est rien Marcelle… Je trouve même cela plutôt mignon que tout le monde s’inquiète de notre potentielle relation à Seb et moi.

En la prenant par les épaules Sébastien en rajouta,

— Meuh tu trouves ça mignon toi ?

— Oui, je trouve ça mignon Seb, mais ce que je trouve encore plus mignon c’est qu’ils vont tous faire la vaisselle pour aider ta tante !

Marcelle éclata de rire.

— Je t’adore Valentine ! Allez, ouste, tous à la vaisselle ! Sauf vous deux, bien sûr…

Une fois que tout le monde eut le dos tourné, Valentine fit face à Sébastien et lui caressa la joue, il prit sa main, y déposa un baiser et lui chuchota ;

— Je rêve de t’embrasser à pleine bouche, là maintenant, que tu viennes sur mes genoux, face à moi et que tu m’embrasses et me caresses… Je te caresserais aussi, le dos, la croupe, les fesses…

Elle le regarda en s’humectant les lèvres et en se rapprochant de lui, elle glissa,

— Et je te caresserais le torse en passant les mains sous le t-shirt pour remonter… Puis redescendre. Tu sais pendant que tu me caresserais le bas du dos, moi je pourrais caresser autre chose…

Sébastien prit une grande respiration, ferma les yeux, souffla et bougea un peu sur le petit banc qu’ils partageaient.

— Ouf… Euh, soit je te saute dessus, soit on arrête d’en parler.

— Mmh, oui, c’est vrai, cela ferait mauvais genre sur la terrasse de ta tante.

Valentine se décolla de lui en prenant les mains de Sébastien dans ses mains à elle. Comme il se redressa, elle ne put passer à côté de la bosse que donnait son érection dans son pantalon. Le regard de Valentine passa de son bas-ventre à ses yeux, elle sourit.

Un peu gêné, Sébastien lui dit,

— Ah oui, la nature se manifeste comme elle peut…

— Elle se manifeste bien je trouve…

Valentine jeta un coup d’œil vers la cuisine. Voyant les autres encore bien occupés à la vaisselle, elle prit la tête de Sébastien entre ses mains et l’embrassa goulûment puis le relâcha et le freina lorsqu’il voulut lui aussi l’embrasser. Elle lui fit signe de se taire en se mettant l’index devant la bouche, elle chuchota,

— Ils reviennent…

Il se rassit « comme si de rien n’était » et lui souffla ;

— J’ai envie de toi Valentine… De te caresser, de te découvrir…

En le couvant du regard, elle avoua,

— Moi aussi Sébastien.

— Est-ce que…

— Quoi ?

Il se montra hésitant, elle l’incita à aller au bout de sa pensée,

— Allez, dis-moi.

— Tu comptais repartir en train ce soir ?

— Oui, pourquoi ?

Sébastien prit une grande inspiration puis, toujours en chuchotant, lui dit ;

— Ok, je me lance ; est-ce que tu serais tentée de venir visiter mon appartement… Ce soir ?

Valentine sourit,

— Pour voir ta collection de dvd de science-fiction ou pour tenter d’atteindre le septième ciel ?

— Au choix…

Un sourire se dessina sur leurs deux visages, Valentine passa son index sur la lèvre inférieure de Sébastien tout en lui répondant,

— Ok, je prends, Sébastien… Mais je n’ai ni pyjama ni brosse à dent.

— Le premier ne sera pas nécessaire je crois et pour la deuxième, j’en ai en stock.

— Je n’ai pas de préservatifs non plus… Si on va plus loin…

— Euh… Je suis clean, je peux te montrer mes résultats.

— Personnellement, à la base je suis clean aussi, mais vu les coucheries parallèles de l’autre, je préfère refaire des tests, ils sont prévus dans 2 semaines, ceux que j’ai fait juste après sont nickel, mais je préfèrerais éviter de te refiler quelque chose malgré moi.

Il acquiesça du regard puis ajouta,

— Je crois que je dois avoir une boîte de préservatifs quelque part, sinon, sur le chemin, il y aura bien un magasin ouvert, il n’est pas encore 18h.

— Oui, il y en a en vente dans les supermarchés.

Ils se regardèrent puis éclatèrent de rire. Il finit par avouer,

— Ça fait un peu checklist, non ?

— Oui, mais au moins, on est au clair. Ça ne fait pas très romantique, je te l’accorde, mais je préfère qu’on soit sur la même longueur d’ondes, toi et moi.

— Je te rejoins parfaitement, Val. Tu connais mon côté pragmatique…

— Oui, je sais, et je l’apprécie, ce côté-là, tu le sais, Seb.

Valentine déposa un baiser sur ses lèvres puis chuchota, au creux de son oreille,

— Je vais enfin découvrir ton « chez toi » … J’espère que j’apprécierais ta literie…

Sébastien chatouilla Valentine qui se retrouva sur ses genoux, collée à lui. Lorsqu’ils entendirent les autres convives revenir vers la terrasse, ils se ressaisirent et s’assirent sagement sur le banc qu’ils occupaient toujours. Tentant de retrouver un air sérieux, Sébastien glissa à Valentine :

— On dirait deux ados qui préparent une escapade en catimini !

— Une escapade improvisée qui me tente énormément…

— Moi aussi…

Il se tut, lui caressa la joue, puis reprit, dans un soupir,

— Tu comptais partir vers quelle heure ?

— Vers 18h justement…

— Et si je leur disais que je compte t’accompagner jusqu’à la gare ? Ils n’ont pas besoin de savoir que tu passeras la nuit chez moi.

— Effectivement, ils n’ont pas à savoir, pas pour le moment, surtout au vu de l’engouement qu’ils ont actuellement par rapport à nous deux.

— De fait, dis… Tu crois qu’ils ont pris des paris ?

— Je ne sais pas, ils sont du style ?

— Oh oui !

C’est à ce moment que les autres les rejoignirent, Marcelle en tête.

— Mais que vous avez l’air sérieux vous deux !

— Oui, on s’organise pour le retour de Valentine, on est samedi, il y a moins de train.

— Oh mais tu peux dormir ici Valentine !

Valentine rétorqua gentiment,

— Je crois que la chambre d’ami est déjà réquisitionnée, non ?

— Ah oui maman, c’est pour Fabrice et moi !

— Si on y va d’ici une grosse demi-heure, Valentine sera dans les temps, tantine, je suis venu en scooter, ce sera plus rapide.

— Est-ce que tu as un second casque ?

— Oui, j’en ai un, pas d’inquiétude.

— Mais, tu n’as pas bu trop de vin ? Tu ne peux pas conduire …

Sébastien leva les yeux au ciel et rétorqua,

— Malgré ce que vous semblez croire, Val et moi n’avons pas consommé tant que ça ; on n’a même pas vidé la moitié de la bouteille de vin à deux ! Et l’apéro date de ce midi. Je suis parfaitement en état de conduire.

Le début de soirée annonça donc le départ de Valentine qui s’y affaira tout doucement ; de son côté Sébastien prépara son scooter avec Fabrice qui voulut absolument voir la qualité du deuxième casque.

— Alors Sébastien, tu as avancé dans ta quête du Graal avec elle ?

Pragmatique, mais souriant, connaissant bien sa famille, il demanda,

— Il y a des paris lancés ?

— Bah oui hein !

— Et ?

— Il y en a qui pensent que cela ira vite et d’autres qui pensent que ça prendra du temps.

— Eh bien, tu leur diras que cela prendra le temps qu’il faudra.

— Ah mais attends, Marcelle a prévu de te questionner avec Vanessa dès que tu reviendras de la gare !

Surprit et un peu inquiet sur le coup, il rétorqua vivement,

— Ah mais non, je ne reviendrai pas, je rentrerai chez moi après… Je suis crevé moi !

— Parce qu’elle t’a chauffé ?

Sébastien leva les yeux au ciel

— Parce que j’ai débroussaillé le jardin !

— Oh, je rigole !

— Allez, viens, on va voir si madame est prête.

Les deux retrouvèrent Valentine en pleine discussion avec Marcelle, Vanessa et François.

— Ok, je suis prête, Sébastien.

— Moi, aussi, viens alors, on y va sur mon super bolide !

Marcelle, François, Vanessa et Fabrice les regardèrent partir et firent des signes de la main.

— Ils couchent ensemble ce soir dit Vanessa,

— Non, ce ne sera pas avant la semaine prochaine, chez elle à Bruxelles après un bon resto, affirma Marcelle

— Non, il n’est pas encore prêt, dit Fabrice

— Et si ça se fait, ils sont déjà ensemble et s’amusent bien de nos paris… Conclut François.

Le groupe se tourna vers lui, trois paires d’yeux interrogateurs.

— Hé mais non, je ne sais rien, j’ai lancé ça comme ça !

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