Il faut que je me réveille ! Je suis en plein rêve, ou en pleine hallucination ce n’est pas possible autrement. Comment peut-elle... ? Mais... qui est-elle ?

Lys me regarde d’un air gêné, comprenant sûrement les centaines de questions qui affluent à mon cerveau en cet instant.

Je l’ai vue, devenir rouge étincelante, comme entourée de feu, en train de parler en latin à une tempête ! Ces yeux sont encore d’un bleu vert scintillant, dont l’intensité faiblit doucement jusqu’à redevenir normaux.

Je voudrais partir en courant mais je suis tétanisé ! Je ne comprends rien, mais je comprends tout. J’ai l’impression d’être fou ! Mes yeux ont vu des choses que mon for intérieur assimile mais que mon cerveau ne peut croire possibles.

– Adam...

– HA !

– Adam calme-toi s’il te plaît. Je peux t’expliquer...

– Mais qui es-tu ?

– Adam s’il te plaît, nous ne sommes pas vraiment dans un endroit approprié.

Je regarde autour de moi et admets qu’elle a raison, les gens sont sortis de leurs abris et le parc est à nouveau rempli, comme si rien ne s’était passé.

- Adam je…

Je tente de reculer d’un geste brusque et dans ma maladresse glisse sur le bord du bassin près à rejoindre les canards qui s’y baignent. Je ferme les yeux et mon corps se crispe attendant l’impact avec l’eau mais rien ne se passe. Je rouvre les yeux et m’aperçois que je lévite au-dessus de la surface, un courant d’air me maintenant à quelques centimètres d’un bain non mérité.

Le courant d’air me pousse légèrement pour me remettre sur pied et je reprends contact avec le sol en regardant la main tendue de Lys qui manipule ledit courant d’air.

Elle n’est peut-être pas si effrayante finalement, je devrais sûrement prendre le temps de l’écouter.

Elle décide de m’inviter chez elle pour en parler plus au calme mais que je me sente tout de même libre de partir si je le souhaite.

Je crois que n’importe qui d’à peu près sain d’esprit serait rentré chez lui s’enfermer à double tour mais pas moi. Moi qui, justement, voulais tout connaître de cette déesse entrée dans ma vie il y a une semaine, comme par magie.

Nous arrivons chez Lys, dans un petit appartement situé dans le 15e.

Au centre de la pièce se trouve un coin salon assez cosy avec un petit canapé et un fauteuil. Sur la droite une petite cuisine et sur la gauche une porte avec ce que je devine un couloir, menant sûrement à sa chambre et la salle de bain.

Sur le canapé, roulé en boule, imperturbable, siège un chat blanc. Le même que dans mon rêve. Je suis à deux doigts de fuir quand Lys interrompt mes pensées.

– Assieds-toi, je t’en prie. Álfur va se pousser.

Le chat, répondant à un étrange nom, grogne comme s’il lui manifestait sa désapprobation et me regarde d’un air dédaigneux. Est-ce qu’un chat peut avoir un air dédaigneux ?

– Tu veux boire quelque chose ? Café, thé...

– Alcool ?

– Euh... oui bien sûr. Je, je vais regarder ce que j’ai, dit-elle gênée.

Elle s’assoit sur le petit fauteuil face à moi et me tend une bière d’un air confus.

– Je suis désolée, je n’ai pas encore expérimenté toute l’euphorie de l’alcool et il n’y a que cette boisson à bulle qui me plaît…

– Lys ? la coupé-je.

– Oui.

– Qui… Es… Tu… Bordel ?

Mon ton est un peu froid, et mes paroles très détachées. J’essaye de rassembler le peu de stabilité émotionnelle qu’il me reste pour me préparer à une réponse qui, je le sais, je le sens, ne va pas être commune.

– Je suis une sorcière.

Je reste silencieux un instant. Mon cerveau tourne dans tous les sens. Je suis surpris mais après tout ce que j’ai vu, pas tant que ça finalement.

– Adam...

– Non, non, non. Ne dis rien s’il te plaît ! Tel que tu me vois je fais un schéma mental de tout ce qui s’est passé ces 7 derniers jours. Alors je vais te raconter ce qui s’est passé dans ma vie, comme ça tu vas peut-être comprendre ! Tout d’abord il y a cette jeune femme, que je trouve très jolie mais j’admets que notre rencontre est un peu... étrange. Ensuite, je me confie à cette personne. J’ai même peur qu’elle me croie fou quand je lui parle de mes espèces de rêves prémonitoires. Et là tout à l’heure, elle se met à briller, comme ça d’un coup et parler latin face à une tempête éclair qui est sortie de nulle part !

Je m’arrête pour boire une gorgée de bière.

– Ad...

– Tout va bien ! mon ton frôle la folie. J’ai juste quelques petites questions en revanche si tu permets ?

– Oui... balbutie-t-elle.

– Tu es une sorcière ?

– Oui.

– Gentille sorcière ?

– Oui.

– Tss ! Dans tous les cas, tu ne me dirais pas l’inverse même si c’était le cas. Que suis-je bête. Notre rencontre n’était pas anodine n’est-ce pas ?

– Non.

– Pourquoi ?

– Pourquoi quoi ?

– Pourquoi tu es là ? Pourquoi tu es entrée dans ma vie ?

– C’est délicat...

– Ha ! Ha ! Ha ! C’est merveilleux...

– Adam est-ce que je peux parler s’il te plaît ?

– Mais je t’en prie !

Après tout, je suis venu pour l’écouter s’expliquer. Il faut juste que je me calme un peu.

– Je suis une jeune sorcière, je n’ai pas encore mon diplôme et c’est la raison de ma présence parmi les humains. Le jour de notre rencontre, j’essayais de jeter des sorts et c’est ce qui a fait tomber le skate-bordeur.

– Mais pourquoi j’ai rêvé de toi ?

– Je ne sais pas Adam, c’est ce que j’essaye de comprendre. Maintenant tu sais tout, tu sais pourquoi je ne te prends pas pour un fou, tu sais pourquoi je ne parlais pas de moi.

– Est-ce que tu m’as déjà jeté un sort ?

– Grand Dieu non !

– Comment puis-je en être sûr ?

– Eh bien tu es là de ton plein gré, il me semble.

Elle marque un point, je peux bouger chacun de mes membres et je n’ai pas la sensation d’être prisonnier. Elle m’a peut-être envoûté mais pas de façon surnaturelle. Cette fille me déstabilise de plus en plus. Je n’ai pas peur d’elle étonnamment mais c’est l’une des rares personnes que je ne ressens pas.

Tout au long de ma vie, j’ai toujours eu une espèce de radar en moi. Je pouvais sentir les gens, sentir leur caractère, connaître leurs pensées sincères ou non... mais pas Lys. Elle je ne sais pas, je ne ressens rien au fond de moi. Comme si mon radar était brouillé.

Je comprends aujourd’hui que cela est sûrement dû à sa magie.

– Adam, je comprendrais que tu ne veuilles plus me voir. Mais sache que j’aimerais vraiment t’aider.

– Laisse-moi le temps de... de digérer... tout ça s’il te plaît.

Je repose ma bière vide, me lève et me dirige vers la porte. Avant d’en franchir le seuil, je jette un dernier coup d’œil à Lys qui, toujours assise dans son fauteuil, me regarde partir, l’air désemparé.

J’ai besoin d’être chez moi, dans mon cocon, dans un lieu rassurant.

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