Une apparition

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"Pour le dossier qui vient, j’invite Camille KIRN à nous rejoindre."

Le responsable des relation sociales se lève et va vers la porte pour faire entrer… Camille !!

- Oh put…

- Bonjour mesdames et messieurs !

- Bonjour ! répond l’assistance.

Franck me regarde, il a bien vu que mon expression a changé... Discrètement il me donne un coup de pied sous la table.

- Ça va René ?

- Euh, hein, quoi ?

- On dirait que tu as vu un fantôme !

- Mieux que ça Franck, mieux que ça…

Camille vient de m’apercevoir à son tour. Elle ne m’avait d’abord pas calculé comme on dit vulgairement. Ça n’est qu’après avoir salué la direction de l’entreprise qu’elle a regardé son auditoire, comme une one-woman show avant de démarrer son spectacle. En me voyant, son visage aussi s’est figé un – très – court instant. Je crois bien que le temps en a fait de même.
Il est quasi certain que personne n’a remarqué quoique ce soit, peut-être Franck, qui me connait très (trop ?) bien. Nos regards en revanche se sont plus que croisés, ils se sont connectés.

Elle prend place à côté du rétroprojecteur et déballe son ordinateur portable pendant que le préventeur (NDLA : la personne chargée de la prévention des accidents) rappelle le contexte.

Je me fiche complètement du contexte. Je me fiche complètement de ce que dit ensuite le directeur sur le dossier. Je me fiche de tout en fait si ce n’est de cette superbe femme qui cherche à fuir mon regard. Camille a beau faire semblant de chercher ici une télécommande, là le câble pour raccorder son PC au rétroprojecteur, ses notes, je sais que ce sont mes yeux qu’elle ne veut plus croiser.

Sa tête se relève, elle n’a plus d’alibi pour ne pas regarder celles et ceux à qui elle doit maintenant s’adresser.

- Tu vas me dire ce qu’il se passe ? Je te connais René, quelque chose te tracasse… Tu as perdu ton portefeuille ? Tes clefs ?

- Non non, rien de tout cela… Je connais très bien cette Camille…

- C’est une collègue de Strasbourg, je sais oui, joli morceau !

- Je ne la connaissais pas comme collègue non. Elle est montée avec moi dans le train, à Strasbourg mais je ne savais pas... Mais je l’ai découverte intimement pendant notre voyage !

- Tu déconnes !

- …donc comme je vous le disais mesdames et messieurs, la problématique des travailleurs isolés est d’une importance toute particulière ces derniers mois. Imaginons que ce monsieur-là…

Camille tend sa main vers moi pour me désigner comme acteur de son exemple.

- …si vous me permettez monsieur, bien sûr !

- Mais je vous en prie madame, je vous en prie !

- …Imaginons donc que ce monsieur-là soit tout seul dans son bureau et qu’il ait un malaise, ce que je ne lui souhaite surtout pas. À moins que je ne passe par là par le plus pur hasard, il risquerait de mourir tout seul le pauvre !

- Ah non alors ! Passez-donc me voir régulièrement madame, s’il vous plait !

Quelques-uns dans la salle sourient gentiment de notre petite joute verbale bien innocente… vu de l’extérieur !

- Ne vous inquiétez pas, je ne vous laisserais pas comme ça voyons.

Camille reprend plus sérieusement son exposé. Passées en revue les différentes situations des services, exposés les problèmes des responsables d’équipe pour que ces situations n’arrivent pas etc. Elle n’a aucune peine à maîtriser et le dossier et son public. Personnellement j’ai du mal à me concentrer sur le sujet[U3] , quoique, puisque je suis son Roi, elle devient mon sujet non ?

Elle est toujours aussi belle bien sûr. Cette fois elle porte un bien joli pantalon noir qui souligne la forme de son derrière et lui fait de longues jambes. Son t-shirt couleur bronze met en valeur la poitrine que je connais très bien. Heureusement, il est moins largement ouvert que la belle chemise de notre voyage… Si j’en vois un qui la mate de trop près, je... je…

Nouveau coup de pied de Franck.

- Oh René, j’ai pas l’impression que tu écoutes vraiment là, on avait dit qu’on interviendrait sur les managers à qui l’on demande d’être présents si tardivement !

- Oui, je sais, ok, attends !

Les questions fusent et Camille y répond avec une aisance dont je suis fier. Que se passe-t-il ? Je ne la connais que depuis hier, le temps d’un Trajet à Grande Vitesse et déjà je la défendrais face aux collègues ? Le Roi aurait-il baissé la garde ? Tsss

- Si je puis me permettre madame KIRN, les managers, qui sont déjà bien occupés par ailleurs, vont devoir élargir plus encore leurs horaires ?

- Oui, nous sommes bien conscients que cela est une contrainte supplémentaire. En fait cela se pratiquait déjà souvent mais n’était pas formalisé. Là nous voulons en plus instaurer un roulement, pour que cela ne soit pas trop pénalisant.
Je vous donne rendez-vous semaine prochaine sur notre site de Strasbourg, il me semble avoir compris que vous aussi y travaillez, comme moi.

- J’en prends bonne note madame, cela sera un plaisir.

Nous nous sourions et l’exercice des questions-réponses se termine. Camille se lève et nous quitte non sans avoir jeté discrètement un sourire ravageur vers le Roi.

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