J’y go

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Un tintement discret me tire de mon sommeil, encore tout embrumé dans le subtil mélange des plaisirs de la journée, de la fatigue du voyage, et l’idée de devoir affronter la réunion du lendemain. Un SMS…

- Tu dînes où ce soir ?

Le message est envoyé par Franck, un collègue de Clermont que j’apprécie particulièrement.
Nous avons eu l’occasion de vivre quelques aventures ensemble lors de précédentes rencontres, réunions ou formations. Il est marié, trois enfants mais depuis quelques années son couple est, comme cela se dit et voit souvent, dans une période de turbulences.
Ce qui se passe lors de déplacements professionnels reste dans le secret du monde pro… et ce d’autant plus entre deux bons et loyaux amis !

Je saisis mon téléphone et lui réponds que pour l’heure je vais tenter de sortir de ma torpeur, de me préparer ensuite. Je lui avoue n’avoir pas encore réfléchi au lieu. Re-tintement :

- En bas de l’hôtel dans une demi-heure !

Quel con ce Franck, il sait très bien que je déteste que l’on me fasse courir ; c’est plutôt moi qui m’en charge généralement de mettre de gentils petits coups de stress.
C’est bien parce que c’est un bon pote que je lui pardonne une fois de plus, et puis, comme je vous le disais, je suis persuadé que l’on va passer une bonne soirée.

Je jette à terre la serviette blanche qui recouvrait encore une partie de mon bassin et file prendre une douche ultra rapide, me rhabille, prends le badge de ma chambre et hop, ascenseur vers le hall d’entrée.

- Salut Franck ! Comment vas-tu vieux con ! lui dis-je en lui faisant l’accolade

- Aussi bien que toi trou duc !

- En forme je vois !

- Toujours ! Bon, on va bouffer où cette-fois ? Tu as déjà une idée ? Je te connais tu aimes la bonne chair, sans doute as-tu repéré un bon restau.

- On m’a dit du bien d’un bouiboui du côté du port, pas juste au bord des quais, ça sent trop la morue et le touriste là-bas, mais quelques rues en retrait, un repaire de brigands mal famés…

- Mais c’est tout à fait pour nous ça alors ! dit-il d’un air coquin.

Nous sortons de l’immeuble, tout joyeux de nous retrouver. Nous échangeons des banalités : famille, santé, boulot, son voisin qui lui casse les pieds avec des travaux qui empiètent sur son terrain sous prétexte de droit de passage. Je lui parle de mon désir de construire une porte-fenêtre pour accéder à l’arrière de ma maison depuis la cuisine, de récente passion pour l’écriture de nouvelles, inspirées de certaines rencontres…

- J’ai toujours su que tu avais l’âme d’un artiste : tu fais de la photo, tu écoutes de la musique de vieux, tu es un romantique et maintenant tu écris ! Putain, toi t’edit-s fichu mon pauvre !

- Je sais, mais j’arrive à pécho ! Les femmes sont maintenant sapiosexuelles : c’est nouveau, c’est à la mode !

- Sape eau sexuelles ? C’est quoi ça ?

- Ce sont les femmes qui aiment les mecs qui ont de l’intelligence, de la culture, du verbe…

- Les chiants quoi ! Moi je préfère baiser et voilà, on n’est pas là pour taper la discut’ mais pour taper l’fond, merde !

- Tu ne changeras jamais Franck ! dis-je en riant.

Nous nous marrons bruyamment dans les rues de Marseille et la vie est belle.
Là-bas, le soleil se meurt dans la méditerranée, le ciel prend de jolies couleurs rougeâtres que magnifient les nuages dans un camaïeux incroyable. Je sors mon portable de ma poche et prends une jolie photo de cette vue.

On peut bouffer maintenant l’homo sapio machin ? dit-il d’un air moqueur.

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