Le câlin du Yoshi

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— Il est 8h du matin. Bonjour monsieur.

Tout va bien, la voix délicate d'Amanda sélectionnée parmi une trentaine d'enregistrements me ranimait toujours de mes nuits barbituriques.

D'un sommeil sans trouble ni songe, je me levai malgré mes muscles engourdis ; claquant ma langue collée au palais par ma léthargie. C'était un coma qui permettait de tirer un trait sur la veille, une véritable aubaine ; pouvoir jouir pleinement d'une toute nouvelle journée sans passif était une chance. Cette perspective agrafa durablement sur mon visage encore paresseux un rictus radieux. Je m'en réjouissais tellement que je me précipitai vers le costume sous blister ; vert pomme, serré au corps, parfait.

— Un verre d'eau au lever, c'est la santé assurée, me dit Amanda tout en s'affairant à la cuisine dans une musicalité qui ne m'était pas étrangère.

Un verre qui se gorgeait d'eau, une coupe de fruits qui exécutait une lente et gracieuse rotation sur son plateau en blanc nacré et une tranche de pain qui, avec joie, se grillait la croûte. C'était comme mon opéra préféré, inlassablement écouté, duquel je pouvais dire " Voilà l'ouverture... Là c'est l'intermède, ici le récitatif ". Je fis donc mon entrée sur scène en soliste averti sous les premières notes de ma playlist en lecture séquentielle qui expirait, paisiblement, du Lo-fi jazzy.

— Je vous suggère un choix de nouveaux morceaux, du genre Chill-out, afin de compléter votre liste.

Devant mon toast et moi-même, les propositions apparurent sur écran vitré. Elles étaient toutes excellentes et parfaitement adaptées à mes envies. Des musiques d'une tiédeur relaxante, harmonieuses.

— Bien, je valide vos achats et les ajoute à votre sélection.

Je pris une gorgée d'eau pour faire passer la pilule.

— Je tiens à vous informer que je viens de commander du sel de lithium et qu'il arrivera demain. La réception se fera à 9h.

Cette annonce ne voulait dire qu'une seule chose. Je venais d'avaler l'une des dernières dragées... Amanda était d'une nature tellement prévoyante; elle allait s'occuper de la réception.

— Encore une journée qui commence du bon pied, me déclara-t-elle avant d'ajouter: vous êtes parfaitement dans les temps. Si vous partez dans les vingt minutes qui suivent, vous serez en avance pour votre projet collaboratif.

L'idée était bonne et je sortis enflammé. De mon palier je pouvais entendre les cliquetis qui orchestraient le verrouillage automatique des portes d'entrées. Devant moi, un espace joliment pavé cerné par trois autres accès. Mangés par mes joues, mes yeux n'avaient pas d'autre choix que de plisser sous l'émotion qui me suivait depuis ; étirant sur mes lèvres l'imperturbable joie. Revoir mes agréables collègues ne pouvait qu’amplifier celle-ci. Nous fûmes quatre à nous saluer de nos sourires respectifs. Nous descendîmes ensemble comme chaque matin en donnant nos avis, dans une franche camaraderie, sur la dernière vidéo de chat qui avait littéralement enflammée le net. Une surchauffe des serveurs, sans gravité, nous avaient-ils certifiés aux informations; la prétention de ces chats d'être des lions avec leurs crinières de pain de mie était à se tordre de rire jusqu'à l'urine. Nos fous rires se perdirent dans la rue devant nous.


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