Genre

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 Je suis tombé, cet après-midi, sur un ami qui se donnait un genre « je ne me donne pas de genre » ; ce sont mes genres préférés, ces James Bond de la simplicité, avec leurs Walther PP qui t'abattent des ego à tire-larigot... quel héroïsme, quelle belle humilité nœud-papillonnée de transparence ! Après être tombé, m'estimant trop pénétrant pour mon ami je me suis relevé, boiteux comme un canard mis en boîte, et j'ai réfléchi au genre que je me donne. Je me laisse un paragraphe – le suivant – pour en saisir la forme, informer mon genre de lui-même ; cela pourrait un jour m'être utile : si d'aventure, à l'angle d'un trottoir ou d'un instinct bizarre, un zinzin me mégenre, j'aimerais au moins m'en rendre compte.

  Je me donne l'air malin, voilà un fait qu'on ne peut pas rater. Je me donne l'air métamalin également, pour prendre les devants sur les paradoxes de la question d'être malin ou non. En soulignant ces derniers, les devants ou les paradoxes, je me donne l'air de celui qui suggère qu'il fait semblant de se savoir malin tout en sachant qu'il n'est pas malin, et qui par conséquent se sait malin ; je me transcende donc d'un genre supramalin. Puisque j'ai, en premier lieu de cet écrit, voulu transpercer le genre « je ne me donne pas de genre », je me donne le genre de quelqu'un n'aimant pas ceux qui se donnent un genre, en même temps que le genre assumant de se donner un genre. Ici même, je me donne le genre joueur, le subtil genre lourdingue pas subtil – ou le lourdingue genre pas subtil subtil, allez savoir. Et de jour en jour, je masturbe mon genre nébuleux, menteur et bulleux, comme un Pinocchio d'eau.

  Je suis définitivement du genre à me donner un genre ; est-ce grave ? Sûrement, si j'en crois mon ami. Mais entre vous et moi, j'estime que les humilités affirmées sont presque toujours d'une immodestie pitoyable. En l'estimant je me vois m'attribuer un genre plus modeste, c'est immodeste ; j'aimerais cependant éviter le genre soulignant son immodestie pour se suggérer modeste. Et voilà que vous intervenez – pas vraiment, mais vous vous donnez un genre à intervenir – pour me qualifier d'un genre à trop réfléchir aux genres. Moi, franchement ? genre... Vous voyez bien, pourtant, que tout cela n'est qu'une répétition de « genre ».

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