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Je me réveille, nous sommes le lendemain. Un réveil vient de sonner; enfin une chose ressemble à ce qui se trouve d'où je viens !

Quelques heures plus tard, j'emboîte le pas à Penny à travers la ville. Nous allons vers le lycée dont elle m'a parlé la veille. J'ai quelques appréhensions mais je n'ai pas le choix de toute manière. Penny désigne un grand bâtiment :

- C'est ici.

Je passe avec elle la grande grille qui nous sépare de la cours de l'établissement. Penny m'a prêté des habits, soutenant que je ne pouvais pas passer inaperçue avec ma robe du dix-neuvième siècle.

- Ne me perds pas de vue, me dit-elle.

Je regarde les gens autour de moi, ils sont tellement différents de ceux que j'ai connus de mon siècle, et pourtant au final tous sont des humains, comme ceux que j'ai connus.

Je me retourne, Penny n'est plus là. Je la cherche du regard mais je comprends que je l'ai perdue quelque part dans la foule. Je m'avance, au hasard, sans vraiment regarder où je mets les pieds. Je heurte quelque chose, ou plutôt quelqu'un. Je lève la tête. Devant moi, ce tiens un jeune homme noir du même âge que moi. Il est habillé comme les autres gens de ce monde, il me sourit; il me fait penser à Fido. C'est étrange quand même qu'il soit ici. Je lui demande :

- De qui es-tu le domestique ?

- Le domestique ?

- Tu t'es enfui ?

- Enfui d'où ?

- Tu es un esclave, non ?

Le jeune homme ne semble pas comprendre ce que je dis. Il semble même choqué par cette dernière question. Comprenant qu'il puisse être blessé, j'ajoute :

- Je n'ai rien contre les esclaves, mon meilleur ami en était un. Il s'appelait Fido et était domestique.

- L'esclavage a été aboli depuis des siècles tu sais, même la guerre de sécession est terminée depuis bien longtemps.

- Les noirs ne sont plus inférieurs aux blancs ? Comme les femmes ne sont plus inférieures aux hommes ?

Penny arrive à ce moment précis et soupire :

- Ah, te voilà Nicole !

- Tu la connais ? demande le garçon noir. Elle est étrange ton amie, elle pense que je suis un esclave.

- Oui, oublie ça Neil. Nicole est une cousine, elle a eu un grave accident et a un peu perdu la tête. Excuse-la.

Penny m'entraine à l'écart.

- Tu te rends compte de ce que tu viens de lui dire ?

- Personne ne m'a prévenu que l'esclavage avait été aboli.

Une jeune fille passe devant nous, la moitié de son crâne est démuni de cheveux. Je demande, si peu discrètement que celle que je désigne l'entend :

- Qu'a-t-elle a à la tête ? Est-t-elle malade ?

Penny me lance un air paniqué. La fille à l'étrange coiffure se retourne vers moi, me fusillant du regard. Elle porte d'étranges bijoux, d'étranges vêtements, elle ressemble à... Une pensée me traverse l'esprit et, involontairement, je l'exprime à haute voix.

- C'est une sorcière !

Le regard de la fille devient plus noir encore et je crois qu'elle est prête à me bondir dessus. Mais Penny s'interpose entre nous et dit :

- Excuse mon amie, Madison, elle n'a jamais vu de gothique.

Puis se tournant vers moi, elle chuchote :

- C'est un style, c'est tout.

Une nouvelle fois, Penny m'entraîne plus loin.

- Évite de penser tout haut et fais attention à ce que tu dis, m'explique-t-elle.

Je me jure de faire plus attention à l'avenir. Mais dans ce monde je ne connais pas encore grand chose et je m'y perds un peu. Nous traversons la cours vers le bâtiment principal. Soudain, mes yeux s'écarquillent. Je montre du doigt deux jeune filles à Penny, mais je n'arrive pas à poser de questions. Penny pousse mon doigt de sa main pour m'obliger à le baisser, puis suit mon regard. Elle considère de nouveau mon expression déconcertée et éclate de rire. Elle se penche vers moi et demande :

- Ça te choque ?

- Normalement... ce n'est pas...

Je regarde de nouveau en direction des deux filles. Non, je n'ai pas mal vu, elles sont pratiquement enlacées, elles s'embrassent même. Ne saurais-je plus reconnaître une femme d'un homme ?

Penny m'explique :

- Depuis ton époque, ils arrivent que deux hommes ou deux femmes s'aiment au point de faire leur vie ensemble. C'est normal.

- Il s'est passé beaucoup de choses depuis mon époque, j'ai l'impression !

- Ça peut choquer au début mais on s'habitue vite au changement. Dans la société on est tous différents, mais on vit ensemble.

C'est une belle idée ce que vient de dire Penny, un tas de gens différents qui s'aiment et se respectent malgré qu'ils n'aient pas la même couleur, pas le même style, pas les mêmes attirances. Finalement le monde du futur a quelques avantages. Peut-être aurai-je enfin le droit de m'exprimer librement, parmi toutes ces femmes libres du vingt et unième siècle.

La journée passe, je ne quitte plus Penny, de peur de me perdre encore parmi tous ces inconnus. La plupart des élèves du lycée semblent ne pas aimer les cours qui s'y déroulent, moi je trouve cela magnifique, j'aurais tant aimé étudier avant dans mon monde. Les gens de ce siècle ne savent pas la chance qu'ils ont ! J'ai envie d'apprendre, de tout découvrir, et maintenant j'en ai enfin l'occasion. Je suis aux anges !

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