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Comme d’habitude, la soirée avait train jusqu’à la fermeture du café-librairie. Certains préféraient passer leur soirées sur la place Sainte-Anne ou dans rue Saint Michel. Mais moi et mes comparses, nous aimions le cadre qu’offrait le Papier Timbré. Nous n’allions pas souvent ailleurs, bien que ça arrivait.

Il faut dire que le frère d’un de mes amis était serveur là-bas. C’était le bon plan pour nous, de plus le patron était sympa et le reste de l’équipe aussi. J’y passais aussi assez souvent en journée pour regarder les livres qu’ils avaient. C’est là que se trouvaient exposés de nombreux ouvrages de la maisons d’édition Goater. Le patron de ces éditions était d’ailleurs propriétaire du bar.

Pour rentrer à ma demeure, trois choix s’offraient à moi. Le premier était de remonter la rue d’Échange, de prendre le métro et descendre à l’arrêt suivant. Mais je pouvais aussi descendre cette même rue, j’arrivais alors Boulevard de Chézy. Et de là, je longeais L’Ille jusqu’à arriver à l’immeuble où se trouvait mon appartement.

Enfin, je pouvais prendre tout droit, Rue de Dinan et la remonter jusqu’à la Rue Saint-Martin. Il ne me resterait alors plus qu’à descendre, et je serais tout près de chez moi. C’est cette solution là que je pris. Il faisait froid et je n’avais aucune envie de traîner. La neige s’était manifestée en ce début de soirée pour le plus grand plaisir des plus jeunes.

Je laissais passer deux rues sur ma gauche, la rue Jacques Cassard et la rue Robelin. Une envie pressante me vint et j’allais me soulager dans un coin sombre de la rue Gaston Tardiff. Si je ne prêtais pas attention à cela plus tôt, j’entendis un bruit en repartant, ma besogne accomplie. Quelqu’un semblait pleurer, je m’approchais vers le haut de la rue.

C’est là que je la vis, une jeune femme de quinze ans, brune avec les yeux noirs. Elle était assise par terre, et le goudron devant elle avait déjà été bien arrosé par ses larmes. Quand elle sembla notifier ma présence, elle replia un peu plus ses jambes contre elle. Et plaça ses mains devant son visage, par réflexe.

« Ne m’approchez pas !» cria t-elle

« Doucement, mademoiselle, je ne vous veux aucun mal. Je suis là pour vous aider, si je le peux. Tenez, prenez ça.» dis-je en sortant de l’une de mes poches un paquet de mouchoirs.

- Merci, maintenant allez vous-en !» reprit l’inconnue en s’emparant du paquet.

- Je suis désolé, ma petite, mais il n’est pas dans mon habitude de laisser des gens ainsi. Vous semblez être en difficulté, laissez moi vous aider, je m’appelle Jérémy.» dis-je.

Soudain, mon portable sonna, je m’éloignais, le sortais de ma poche et regardait. Il s’agissait d’un message, celui qui me l’avait envoyé n’avait pas été un mystère du tout. Il s’agissait de Jenny, ma compagne. Alors que j’étais en soirée, elle travaillait, dans un restaurant près de Chantepie. Elle venait de finir et me demandait si elle devait passer me prendre.

« J’étais sur la route pour rentrer,donc ça devrait aller !» dit-je

« Alors à tout de suite, je t’aime!» dit-elle avant de raccrocher.

J’aurais pu lui parler de la fille,là au téléphone, mais je ne le fis pas. Je lui envoyais un message où je lui expliquais la situation. Je la connaissais bien, elle me connaissait très bien elle aussi,huit ans que l’on était ensemble. Et je n’avais jamais été voir ailleurs, je n’avais jamais cherché à le faire, je lui étais fidèle.

La jeune femme se confierait peut être plus à une femme. C’est l’idée qui m’avait traversé l’esprit quand elle m’avait appelée. Je continuais ma route vers le lieu où nous vivions elle et moi. J’entrais et allais directement dans notre chambre. J’entendis Jenny rentrer un quart d’heure,plus tard mais elle n’était pas seule,je le compris rapidement.

Je ne bougeais pas, j’avais retiré mes vêtements et m’étais glissé sous la couette, lumières éteintes. Je sentis qu’il y avait un peu de remue ménage en bas, et ne mis pas longtemps à comprendre. Ma dulcinée avait déplié le clic-clac,j’entendis des pas qui montaient l’escalier. Jenny venait chercher des draps, je le sus, car elle redescendit rapidement après.

Et aussi parce que j’avais appris à reconnaître chaque bruit de cet appartement. Et le placard où on stockait les draps venait de s’ouvrir et se refermer. Une bonne demie-heure plus tard, la porte de la chambre s’ouvrit et comme le placard,se referma. Je sentis une présence familière, et un corps vint se blottir contre moi. J’enserrais sa taille de mes bras.

« Tu as bien fait de me prévenir, elle était dans un sale état. Et j’ai du m’y prendre à plusieurs fois pour qu’elle vienne avec moi.» me murmura t-elle.

« Qui est t-elle ?» demandais-je

- Elle ne m’a pas donné beaucoup d’éléments à ce sujet. Je sais qu’elle s’appelle Leslie,qu’elle a quinze ans ,c’est tout. Tu peux me raconter un peu, ce qu’il s’est passé ? » répondit Jenny.

- Je remontais vers l’appartement et allais arriver rue Gaston Tardiff. J’avais bu et ai profité de l’obscurité de la rue pour me soulager. C’est alors que j’allais partir, que j’ai entendu pleurer. Je suis monté jusqu’au bout de la rue. Et je l’ai vu,elle était toute seule dans cette ruelle sombre. J’ai pensé aux gens qui buvaient plus que moi et qui passais là. J’allais lui proposer de m’aider mais elle m’a demandé de ne pas m’approcher. Je lui ai donné mes mouchoirs puis elle m’a demandé de partir. J’ai obtempéré et c’est là que tu m’as appelé. La suite, tu la connais. » dit-je.

- Je l’ai installé sur le clip-clap, pour la nuit ! » dit-elle avant de m’embrasser et de se blottir contre moi.

Si elle trouva le sommeil rapidement, ce ne fut pas mon cas. Savoir qu'il y avait quelqu'un dans l'appartement en plus de nous deux ne me plaisait pas. Certes, elle était au plus mal quand je l'avais vue et je ne doutais pas qu'il en soit encore ainsi. Mais même en sachant tout ça, je n'étais pas vraiment serein. Une brune,prénommée Leslie,un prénom commençant par L.E.S.

Me levant, je gagnais les toilettes, vérifiant qu’elle ne se trouvait pas là. Je regardais les messages que j’avais reçu, notamment ceux de mon beau-père. Le père de Jenny était un lieutenant de police officiant au commissariat de Rennes-Sud, au Blosne. Il nous était arrivé d’échanger régulièrement lui et moi. Quand j’eus trouvé ce que je cherchais, je retournais me coucher.

A peine avais-je regagné le lit que la lumière s’alluma, Jenny me regardait. Elle semblait inquiète et suspicieuse. Non pas qu’elle pensait que j’avais pu faire quoi que ce soit avec la jeune femme en bas. Mais elle avait le don de savoir quand quelque chose me travaillait, et c’était indéniablement le cas.

« C’est à cause d’elle, tu veux en parler ?» demanda t-elle

« La fille qui dort en bas, c’est la fameuse LES, que recherche ton père ! » dit-je

- Quoi, comment ça, comment en es-tu venu à ça ?» demanda t-elle

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