Une alcoolique à l'intérim

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 Lundi matin, il était à peine 10 h du matin et j’éprouvais déjà de la fatigue. Pourtant il fallait tenir jusqu’à vendredi. Le Caracal m’avait attribué la place de RH. Soi-disant, parce que j’avais un talent d’autorité naturel… La bonne blague ! Il voulait juste me punir pour avoir demandé un nouveau vaisseau, en me refilant des putains de dossiers à lire et rapports à rédiger. Tout ce que je détestais !

 Pour moi le canidé qui m’avait précédé faisait un bien meilleur RH, patient, attentif et compréhensif. Et puis il avait l’air de s’y plaire !

 Bon l’académie aussi semble pas mal pour lui, mais moi, j’ai du gérer le dossier de la renarde qu’il remplace ! Aucun souci pour ses références, elle a de petites envies de meurtre sur des enfants… Mais qui n’en a pas ? Par contre, lui trouver un travail bien payé, avec beaucoup de vacances et presque rien à faire de la journée… Bordel le casse-tête !

 Comme si on avait ça à Scribopolis… Non franchement je pouvais lui répondre quoi en dehors de « vous connaissez un politique bien placé ? Parce qu’en dehors d’un emploi fictif, ça n’existe pas ça ».

 Heureusement pour moi, qu’elle était trop feignante pour protester par la force. Le caracal m’a dit que je n’avais pas le droit d’utiliser mes pouvoirs pour incinérer ou faire disparaitre personnages ou auteurs. Pourtant la violence, ça aide à résoudre pas mal de choses quand c’est bien dosé.

   — Madame Sahiane, votre rendez-vous de 10 h 10 vient d’arriver, m’informa la secrétaire en entrant dans le bureau.

   — Germaine, je vous l’ai déjà dit, juste Sahiane. Le madame ça me vieillit.

   — Vu votre âge ça vous rajeunit plutôt, marmonna-t-elle d’un air pincé.

  — J’oublierai mon envie de vous électrocuter pour cette remarque quand vous m’aurez apporté mon verre de liqueur.

  — Mais enfin, il n’est que 10 h 05 !

  — Oui, mais j’ai lu le dossier du 10 h 10 et je vais en avoir fichtrement besoin.

 Germaine soupira en levant les yeux au ciel. Je ne pus m’empêcher de lire dans ses pensées. Elle maudissait le ciel pour lui avoir enlevé Le Corgui. Et moi donc ! J’avais tout de même droit à un peu d’estime de sa part pour me rappeler de son prénom. Deux minutes après elle revenait avec mon verre d’alcool.

  — Merci, Germaine, vous pouvez le faire entrer.

 Un claudiquement et une odeur métallique me firent tourner la tête vers la porte. Le type puait le sang et la sueur et ses habits avaient eux aussi connu des jours meilleurs.

  — Audric je suppose, mais lequel au juste ?

  — Le fils.

  — Lequel ? Le fils du vieux Audric ou du Audric d’âge moyen ?

  — Oh ça va ! Vous allez pas vous y mettre aussi ! Vous croyez que c’est drôle d’avoir le même prénom que deux autres personnages dans la même histoire ? rouspéta le chasseur.

  — Pour vous sans doute pas, mais le lecteur qui ne s’y perd pas doit trouver ça désopilant.

  — Du coup pas la peine que je demande d’en avoir un autre ?

  — Non, les changements de prénoms faut voir ça avec l’état civil de scribopolis et avoir un accord écrit de l’auteur après le délai de réflexion légal de mille ans, lui dis-je.

  — Sérieusement !

  — Oui, si c’était tout, vous pouvez repartir. Je ne sais pas où est l’état civil, voyez avec un des guichets d’accueil.

  — Non, mais j’étais pas venue que pour ça, ronchonna-t-il.

 Moi qui espérais pouvoir siroter mon verre tranquillement avant la prochaine plainte… raté.

  — Ah, pourquoi donc ? demandai-je.

 Je fis semblant de chercher dans son dossier informatique, mais en réalité je supprimais les mails publicitaires pour des cafés d’exception, ou des demandes philosophiques au puissant Ao.

  — Je voudrais négocier une réécriture.

  — J’ai vu votre dossier si vous espérez ne pas mourir à la fin… Faites une croix dessus ! Droit ultime de l’auteur les personnages qui meurent ils n’ont pas le droit de s’en plaindre. Je suis bien placée pour le savoir.

  — Hey ! Vous branlez pas grand-chose en dehors de picoler !

  — Je reconnais bien le représentant syndical CGT Chasseurs de monstres ! Toujours à demander des trucs qu’ils ne peuvent pas avoir, gueuler et se plaindre des lustres jusqu’à obtenir un truc accessoire avant de s’en vanter.

  — Comment vous savez que je suis encarté ? s’étonna-t-il avec des yeux grands ouverts.

  — Pff, je vous ai dit j’ai lu votre dossier ! Une heure trente de tergiversation avant de courir après sa cible et vous vous déplacez pas via la SNCF. La CGT c’était le choix le plus évident.

  — D’accord, d’accord. Je dois crever, mais… y a pas moyen d’avoir l’air moins con dans cette histoire ?

  — Moins cons ? Vous voulez dire ?

  — Ben je veux être un vrai chasseur pro ! Un dont mon fils Audric sera fier de reprendre le flambeau !

  — Encore un Audric…

  — Oui ben… faut suivre la tradition.

  — Vous voulez dire, de la discrétion à l’approche de la cible, pas la laisser filer en s’en rendant compte le lendemain, etc ?

  — Voilà !

 Je pris une expression embarrassée ! En réalité intérieurement j’étais morte de rire. Parce que là, entre une promo pour grains de café du Kenya et un nouvel Organigramme du Faucon se trouvait un mail de l’autrice d’Audric ! Et cette dernière envisageait justement une réécriture moins humoristique que la première version. Le coup de bol.

  — Ah, vous savez… ça ne va pas être simple. Une réécriture à votre avantage, c’est des négociations de plusieurs jours au moins ! Et puis le budget ! Vous y pensez au budget ? Vu le travail, c’est une formation de chasseur pro de six mois minimum.

  — Et si j’organisais un piquet de grève de chasseurs sous vos fenêtres ?

  — Pas la peine de me menacer, une petite formule et j’insonorise la pièce ! Je vais transmettre votre requête à l’auteur. Je compte sur vous pour dissuader vos adhérents de venir me trouver quand vous aurez obtenu gain de cause.

  — Vous ne voulez pas de bonne publicité ?

  — Surtout pas ! affirmai-je en tamponnant la requête. On est d’accord ?

  — Ok.

 Et une bonne chose de fait, il me suffisait de dire à Germaine que je serais absente pour quelques jours et je pourrais être pénarde sans plaintes !

  — Madame Sahiane ! Votre rendez-vous de 9 h est arrivé.

 Qu’est-ce qu’elle me chantait celle-là, il n’y avait rien pour 9 h et puis c’était plus de 10 h 15 !

  — Germaine, je n’ai rien d’autre aujourd’hui.

  — Si c’est votre rendez-vous de mardi dernier.

  — Vous vous moquez de moi ?

  — Non, elle s’est perdue pour venir jusqu’ici.

  — Elle s’était perdue ? répétai-je agacée remontant le temps dans l’agenda.

  — Oui, et pourtant… Je lui avais envoyé un plan à cette petite Jeanne.

  — Germaine, allez me chercher la bouteille de liqueur…

  — Encore !

Avec la participation d’Audric

https://www.scribay.com/text/413798002/petites-nouvelles-de-nulle-part-

Et de Jeanne

https://www.scribay.com/text/2079919616/voleur-malgre-lui

Sahiane

https://www.scribay.com/text/235178241/antya--terminee-

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