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Le TGV entre en gare de Toulouse-Matabiau. La tension monte d'un cran.
Sur le parcours qui mène au hall d'arrivée, mes yeux fouillent la foule. A tout moment je m'attends à la voir.

Arrivé dans le hall c'est une voix reconnaissable entre toute qui m'interpelle.

Un appel :

— Théo !

Et des bras qui s'agitent.

C'est Romain qui m'accueille. Pas de Bintou. Soulagement et déception.

C'est confus dans ma tête.
Romain a le sourire heureux et franc et me serre dans ses bras, me bise. Il est exhubérant. Il n'a que faire des regards.

— Salut mon pote. Bienvenue au pays.

Il est ému. Moi aussi.

— Tu as changé.

— Tu trouves ?

— Oui. Un je ne sais quoi dans le regard.

— Je suis mal rasé.

— Le regard je te dis.

— La fatigue du voyage.

— Non. Plus de profondeur, un truc comme ça.

— Tu veux dire qu'il y a dix mois j'étais immature.

Il rigole.

— Sans doute les expériences que tu a vécues pendant ces dix mois. Et le bronzage aussi.

— Oui, c'est peut-être ça.
J'enchaine :

— Bintou n'est pas là ?

— Elle t'attend à l'appart. Elle est excitée comme une puce et elle a tenu à te préparer un bon repas.

Nous récupérons sa voiture au parking.

Je retrouve ma ville avec bonheur. Ses batiments, ses rues, son accent, ses odeurs... Nous n'échangeons que peu de mots avec Romain.

Il respecte mon silence. Il a compris mon état d'ame et je devine qu'il prend le temps de sillonner les rues.

Il me laisse respirer.

Je savoure ce retour au pays.

Toulouse, je pensais souvent à toi, si loin de moi et si proche pourtant. Je t'associais à Bintou et il arrivait à mon cœur de pleurer.

Depuis que je suis loin de toi
Je suis comme loin de moi
Et je pense à toi tout bas
Tu es à six heures de moi
Je suis à des années de toi
C'est ça être là-bas
La différence
C'est ce silence parfois au fond de moi


Romain, Romain, ne comprends-tu pas que nous sommes en danger !

Les premiers temps après mon départ, Bintou m'appelait régulièrement pour prendre de mes nouvelles. Romain, plus occasionnellement. Le téléphone devenait un boulet.

Je fus obligé de leur demander de ne plus m'appeler. De me laisser l'initiative des contacts éventuels.

Ils cédèrent devant mon insistance.

Je ne fus pas comme certains qui tiennent à jour un blog tout au long de leur voyage. Non, je voulais une immersion la plus complète possible. Une coupure.

Une rupture...

Les contacts alors se raréfièrent.

Dans l'ascenseur qui nous mène à l'étage, la fébrilité me gagne. Le moment que je redoute et que je désire approche.
Mon cœur est en branle bas. Romain me parle mais je n'écoute que distraitement. Il me précède dans l'appartement et mine un roulement de tambour et crie :

— Oyé oyé, mademoiselle Bintou, voici Théo l'enfant prodige.

J'ai à peine le temps de poser mon sac que déjà elle se précipite dans mes bras :

— Oh Théo ! comme je suis heureuse.

Et moi donc ! Je l'enlace.
Quelle est adorable dans sa petite robe rouge à fleurs, boutonnée par devant. Je lui avais raconté mon fantasme sur ce type de robe. Est-ce un hasard ? D'autant qu'elle ne semble pas porter de soutien-gorge.

Elle me bise les deux joues et ce corps désiré tout contre moi me donne envie de le baiser.
Elle colle son visage dans mon cou. Elle me caresse le visage. J'en reste muet de sidération.
— Tu es beau Théo. — Toi aussi Bintou. Elle est rayonnante.
— ho ho ! les tourtereaux, n'oubliez pas que je suis encore là. Romain est hilare et il comprend l'importance de ces attouchements. Comme avec lui à la gare. Un trio de potes trop longtemps séparés. Il connaît mon affection pour Bintou mais imagine-t-il que je suis au delà de l'affection ? Et il a une confiance totale en elle et moi.
J'ai mal !
Je me tourne vers lui et je les serre tout les deux dans mes bras. Une grosse bouffée d'émotions monte dans ma gorge.
— Allez trève d'embrassades. Théo veux-tu prendre une douche et te reposer avant d'arroser ton retour ?

— Une douche n'est pas de refus Romain.

— Viens poser tes affaires dans la chambre, me propose Bintou

— Je te suis.

— Tu trouveras de quoi dans la salle de bain.

— J'ai ce qu'il faut dans mon sac.

— Non non non. Tu es notre invité.

— Ok, ok.
Leur appartement est spacieux et encore meublé au minimum. Les connaissant, « Le Bon Coin » doit être leur source d'approvisionnement préférée.

Elle me précède et me montre ma chambre. Je pose le sac à coté du lit.

— Je suis heureuse que tu sois là, Théo.

Elle me caresse le bras avec un sourire confondant.

Regarde ma vie tu la vois face à face
Dis-moi ton avis que veux-tu que j’y fasse
Nous n’avons plus que ça au bout de notre impasse
Le moment viendra tout changera de place

Il suffira d’un signe, un matin
Un matin tout tranquille et serein


Avant que j'aie le temps d'esquisser un geste, elle fait déjà demi-tour.

— Je te laisse. Fais comme chez toi.

Je suis perplexe. Mon cerveau tente d'analyser ces événements. Est-ce que je me fais un film ? J'ai sans doute un peu oublié le comportement libéré et naturel de Bintou à mon égard.

Tous ces mois d'absence...

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