Chapitre 1 ( Partie 1/2 )

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8 juillet 812

      Le facteur devait encore passer par ce long chemin sinueux et accidenté. Il détestait cela car il ne le faisait que pour livrer des journaux, mais bon, ça payait bien. Il sortit enfin de la forêt pour arriver au petit village, perdu dans de grandes étendues vertes avec plusieurs maisonnettes éloignées les unes des autres, et de superbes paysages avec cette grande montagne et ce merveilleux lac. Pas le temps de niaiser, il s'arrêta et descendit de son vélo pour donner le paquet au maire, s'il y avait vraiment ce genre de statut ici, et repartit avec quelques billets. Ces routes caillouteuses étaient vraiment pénible pour un citadin. Le vieillard le salua et s'apprêta à rentrer chez lui, en attendant que ses voisins ne viennent chercher leur dû.

— Qu'est-ce qu'il nous ramène comme bêtises aujourd'hui... murmura-t-il d'un ton maussade comme à son habitude, il n'aimait pas le monde extérieur, enfin... Oh ! Ils ont sorti une nouvelle cuisinière ! Il me la faut !
— On est fauché papi. Le vieux se retourna immédiatement pour faire face à un jeune adolescent d'une quinzaine d'années. Puis si c'est pour faire des soupes...
— Tais-toi, je fais encore ce que je veux ! Il arrangea son béret et dépassa son petit-fils d'un pas pressé pour retourner chez lui. On a que des fruits et des légumes ici, je ne vois pas ce que tu peux faire d'autre ! Et où est ta camarade ? Elle devrait déjà me manquer de respect...
— Elle déprime au lac, elle dit qu'elle s'ennuie. En même temps à part jouer les paysans, il n'y a pas grand-chose d'autre à faire, comme tu dis. Le jeune blond le suivait les mains dans les poches.
— Oh, c'est étonnant. Il lui donna l'un des journaux en montrant du doigt la couverture. Il y a un article spécial, ça lui redonnera peut-être le sourire.
— Ça la fera juste déprimée encore plus... Bref à tout à l'heure papi.
— Hé, j'aime beaucoup ta salopette, on dirait moi à ton âge ha ha ha ! Le jeune homme s'arrêta quelques secondes.
— ... Cool. J'aime bien ta nouvelle veste bleue, tu ressembles à un détective.

      Il reprit sa marche, et de dos, il lui fit un signe de la main. Son grand-père poussa la porte de chez lui, très heureux d'avoir reçu un compliment du jeune homme qui semblait toujours morose. L'adolescent longea à travers les champs de tomates et de choux, passa à côté des pommiers et des orangers puis franchit un petit bout de forêt avant de parvenir à la parcelle surmontant le calme et brillant lac azur. Le bruit de ses chaussures faisant craquer les vieilles planches alerta la jeune fille assise au bout du petit pont. On ne pouvait pas la manquer non plus avec ses cheveux roses vifs, un caractère très rare chez la population mondiale. Le fils et le petit-fils de paysans s'assit à côté de son amie d'enfance.

— Tiens Ikira, le journal. L'adolescente le saisit sans motivation. Qu'est-ce qu'il y a ?
— Je m'ennuie. J'en ai marre de travailler la terre et de manger la même chose... Elle posa le journal sans le regarder puis jeta un caillou dans la rivière, appâtant quelques poissons.
— Je vois, répondit-il sans savoir quoi lui dire. C'est vrai qu'on ne vit pas dans l'adrénaline permanente, mais notre petite vie est tranquille ici.
— Je ne veux pas d'une vie peinarde, il me faut de la stimulation, des surprises, des imprévus !
— Il y en a des surprises et des imprévus, quand les plantations tombent malades ou qu'on découvre une nouvelle variété intéressante... Ikira lui jeta rapidement un regard de lassitude.
— Tu sais très bien de quoi je parle, Ethedra... On devrait partir d'ici.
— Oui mais pour aller où... ? Et puis je trouve ça dange-

      Il n'eut pas le temps de finir sa phrase qu'il se fit sauvagement arroser d'eau. Surpris par cette attaque, il se mit debout, trempé de la tête à la chemise. Les tireurs étaient des Archers, des poissons serpentins capables d'émerger à la surface grâce à leur long cou et de cracher de l'eau. Or si cela avait d'abord pour but d'étourdir des insectes pour ensuite les grignoter dans l'eau, le faire sur des humains étaient plus de l'ordre du jeu. Ethedra partit sans demander son reste après un rapide au revoir, il bégaya, irrité par ces stupides poissons : "On se retrouve au déjeuner". La jeune fille soupira, elle n'avait jamais été dérangée par les animaux de son village, et elle avait même pu en approcher certains pour les caresser. Son regard se posa sur le journal, elle se demandait si elle avait vraiment envie de le lire et de jalouser davantage le monde extérieur. Ce fut dans une légère brise que le papier se souleva doucement et qu'elle aperçut le mot spécial écrit sur l'une des feuilles. De nature curieuse, rien n'échappait à ces yeux roses, ainsi elle ne put s'empêcher de lire l'article correspondant.

      "Article spécial ! La région des Îles Flottantes va vous ébahir !" était-il écrit en haut de la page. Ikira avait déjà lu des articles à propos de cet endroit, qui n'était pas si loin que ça d'ailleurs, mais il y avait peu d'informations à chaque fois. Elle adorait ce nom et se demandait s'il y avait vraiment des morceaux de terres volant dans le ciel, peut-être qu'elle pourrait les voir si elle grimpait la montagne. Elle commença à lire la chronique, parcourant les mots et les photos sur plusieurs pages. Ses yeux s'écarquillèrent au fur et à mesure, elle n'avait jamais été aussi impressionnée. Les îles volantes existaient bien, elles étaient toutes différentes, représentant un biome particulier. Chaque île était reliée à des îlots artificiels eux-mêmes reliés par d'immenses routes traversant le ciel. Au sol comme en l'air vivait une population de millions d'habitants composés du plus haut pourcentage d'aventuriers et de combattants du continent. Les paysages étaient fantastiques, beaucoup mieux que son petit village. Là-bas, elle pourrait vivre de véritables péripéties en découvrant le monde extérieur. Elle devait partir, là tout de suite avant qu'elle ne gaspille encore plus de temps et tant pis si ses parents ou Ethedra essayaient de l'en empêcher. Elle était si excitée qu'elle avait du mal à retenir toutes les informations. Elle se leva et fit quelques relectures sur le chemin de la maison.

— Impossible ! Les îles se régénèrent toutes les nuits, c'est incroyable ! Il faut que je rencontre les héros de cette région, ils doivent être des légendes ! Et peut-être des beaux gosses... Elle s'arrêta subitement au milieu de la route, en pleine forêt. J'ai cru entendre un bruit... Elle scruta les alentours et aperçut entre les buissons, à quelques mètres de là, le maître des lieux. Toujours à nous fixer, ce grand monstre me donne la chair de poule...

      Le seul de son espèce, le maître des lieux ressemblait à un ange à l'apparence vaguement humanoïde. En fait, on aurait pu dire qu'il sortait tout droit d'un cauchemar avec sa bouche manquante, ses dix longues queues à plume et sa manie à tout regarder fixement en tournant légèrement la tête. De plus il était toujours accompagné d'une impression étrange qui vous hypnotisait comme s'il scrutait au fin fond de votre âme. Les villageois s'en méfiaient beaucoup même s'il n'avait jamais rien fait de mal, il devait seulement vivre en paix dans ce coin reculé où aucun fou ne tenterait de l'attaquer pour une fausse gloire. Il repartit assez vite, cette fois-ci, et Ikira reprit sa marche. Pendant qu'elle côtoyait les cultures, elle imaginait ce que ça ferait de tomber d'un îlot en allant au marché. Elle rit de cette image avant de se dire qu'elle devait être vraiment stupide de penser qu'on installerait un marché à côté du bord... Bref, si tout se passait bien à la maison, elle pourrait le découvrir de ses propres yeux. Elle monta le petit escalier en bois et ouvra la porte de chez elle.

— En parlant du loup-garou ! s'exprima avec joie le père d'Ikira, un homme simple qui avait eu le courage d'épouser sa femme. Viens t'asseoir, on mange une salade de fruits avec un bon jus d'orange. Sans montrer son dégoût, la jeune fille se plaça entre son père et Ethedra, invité à prendre le repas.
— J'ai... Une faveur à vous demander, balbutia-t-elle en priant pour qu'ils acceptent sa demande. Pas loin d'ici, il y a une région que je voudrais visiter... Enfin, je veux dire, partir à l'aventu- 
— Quoi ?! Qu'est-ce que c'est que cette idée à la noix, tu es folle ! la coupa vivement son géniteur. Tu veux finir comme ton grand-père et mourir dans une stupide quête aux sensations ?! Ikira se tut de honte, elle ne savait pas quoi lui répondre. Ethedra lui regardait la scène, impuissant.
— Chéri, tu ne parles pas de mon père de cette façon. Elle se tourna vers sa fille. Si grand-mère était réveillée, elle lui aurait donné une bonne gifle, puis une autre, pour le plaisir. Elle s'assit face à elle, regardant son mari bouillonnait de stress et sa fille baissait la tête de honte. Ikira, tu veux voyager ? Soit, après tout, ta mamie et moi-même l'avons fait et ce fut la meilleure chose qui ait pu nous arriver, puisque c'est de cette façon que nous avons rencontrée l'amour. Elle fit un petit clin d'œil à son bien-aimé. Convainc moi que tu es prête à parcourir ce monde, toi qui n'est encore qu'une enfant bien naïve.
— Hein ?! s'exclama-t-elle surprise, elle n'avait jamais réussi à persuader sa mère. Je... Cet endroit n'est pas fait pour moi...

      C'était vrai, elle n'était qu'une enfant en pleine crise d'adolescence, tout le monde sans exception la voyait comme telle. Son père se rongeait les ongles de peur de voir sa petite fille s'éloignait dans un monde inconnu et très dangereux. Ethedra non plus n'était pas rassuré, lui était plutôt tranquille dans ce beau village, pourquoi voudrait-elle partir de ce petit paradis ? Si grand-mère était réveillée, elle lui aurait rétorquée que ce n'était qu'un caprice et qu'elle ne savait pas ce que signifiait partir à l'aventure. Elle n'aurait pas tort, en fait, mais c'est justement pour ça qu'elle voulait voyager, pour apprendre. Trouver les mots pour rassurer ses proches était dur, mais trouver ceux pour prouver qu'elle méritait de vivre sa vie coulait de source. Sa mère était l'obstacle à franchir, toujours à la tester parce qu'évidemment, la fille d'une ancienne aventurière se devait d'être forte et ingénieuse, parfaite en somme. Mais là où elle se trompait, c'est qu'Ikira ne voulait pas lui ressembler, seul lui importait sa propre route et c'est en partant d'elle-même en réalisant ses propres choix qu'elle pourrait la suivre. Elle prit une grande inspiration afin de se concentrer, après tout elle n'avait qu'à exprimer ce qu'elle ressentait.

— Maman, je suis peut-être bête, naïve ou folle, mais c'est là que se situe tout l'intérêt de suivre ses rêves. Si je voyage, c'est pour donner du sens à ma vie, je n'ai jamais voulu devenir fermière ou maraîchère ! Et dois-je te rappeler quel est le rôle d'une mère ? De m'encourager à suivre ma voie, alors tu n'as pas le droit de m'interdire de partir de ce village !
— Oooh ma petite choupinette ! s'exclafa-t-elle gaiement. Tu as tellement grandi, tu ne dois même pas te souvenir des cauchemars que tu faisais quand je te racontais de quelle façon je massacrais les monstres qui voulaient me dévorer ! Ha ha, je suis très fière de toi, allez prépare tes bagages !
— M-maintenant ?! protesta son mari. Il est à peine midi e-et on a rien préparé ! 
— Prend mon ancienne valise, oh et Ethedra, tu l'accompagnes. Le jeune adolescent ouvrit grand les yeux, puis accepta son sort avec indifférence.
— D'accord. Je vais prévenir mes parents, en fait j'ai toujours voulu partir, je viens de le réaliser.
— T'es sérieux ?! s'écria la fillette aux cheveux rosâtres. Pourquoi tu me faisais la morale alors ?! Le garçon lui répondit avec un haussement d'épaule.
— Bien, rendez-vous à l'entrée du village dans vingt minutes. Je prépare l'argent pour les billets et la voiture pour aller à la gare. Oh tout ceci est terriblement excitant !

      La vie d'Ikira emprunta un virage à quatre-vingt-dix degrés. Tout s'enchaîna à une vitesse folle. La mère d'Ikira, qui partait parfois à la ville d'en bas, connaissait l'ensemble des horaires et trajets de bus, notamment ceux de la superbe entreprise Expert Voyage. Ethedra dit rapidement au revoir à ses parents puis à son grand-père. Ce dernier lui offrit une paire de bretelle doré réservé pour son anniversaire qu'il adora. Cette nouvelle était trop soudaine, mais ils l'encouragèrent tout de même. Les deux adolescents prirent place dans une étrange voiture que seule la mère d'Ikira était capable de piloter.

— Vous êtes prêts les enfants ? Nous avons une heure pour faire soixante-dix kilomètres !
— Maman, c'est impossible ! Aucune voiture ne peut aller suffisamment vite !
— Et la route jusqu'à la ville est graveleuse et très accidenté, intervient le blondinet à bretelle.
— Ne vous inquiétez pas mes petits, je sais ce que je fais ! Oh et laisse une place à ta mamie, elle veut aller voir papy.
— Mais, il est mort... rappela Ikira, juste avant que sa grand-mère ne rentre dans le véhicule.
— Tu me prends pour une idiote ?! grommela cette dernière. Je le sais bien qu'il n'est plus de ce monde ! Et qu'est-ce que tu attends Nathalie ?! Roule, bon de diou, roule !
— Oui maman, j'y arrive...
— Donc, vous allez voyager ? demanda ironiquement la vieille. Enfin quelque chose de sensé ! Rien ne tourne rond dans ce stupide monde, ils devraient réagir plus vite ces cons !
"Mais de qui parle-t-elle, cette cinglée... ?" pensa Ethedra, qui était déjà agacé par ce voyage.
— Allez, c'est parti !

      La voiture démarrait lentement mais le bruit aigu qui montait en puissance ne disait rien qui vaille. Cependant ceci laissait le temps à un dernier au revoir à tous les membres du village venus assister au départ des petits. Le grand-père d'Ethedra pleurait avec le sourire quand le père d'Ikira vint lui donner des mouchoirs pour sangloter avec lui. Il était normal d'être inquiet quand son enfant partait dans un lieu inconnu et dangereux, on entendait plein d'histoires sur des jeunes, ou vieux, morts attaqués par des monstres ou des criminels. Ce monde n'était pas du tout joyeux, et pourtant la société était bien développée. Ce village paisible était simplement en dehors de tous les problèmes. La mère appuya finalement sur l'accélérateur et ce fut la dernière fois avant de très longues années que les deux adolescents virent leur petit hameau adoré, ils n'en étaient jamais sortis auparavant. Le bolide allait vraiment vite mais on ne ressentait pas vraiment de secousses, ce qui était vraiment étrange compte tenu de la technologie de l'époque. En fait, la voiture était un cadeau de mamie qu'elle avait obtenu vers ses dernières années d'aventures. Sortant de la forêt, Ikira put apercevoir du haut de sa montagne la ville située plus bas, puis elle regarda à travers la vitre de gauche pour apercevoir encore plus loin d'immenses chaînes de montagnes qui délimitaient la fameuse région des îles Flottantes. C'était sa destination, et elle ressentit pour la première fois de sa vie l'embrasement de ses émotions. Elle ne s'était jamais sentie plus vivante que maintenant.

      Avant de se perdre dans les immeubles de la cité, notre aventurière débutante lança un dernier regard sur son lieu de naissance. Un éclat de lumière jaillit subitement sur le plus haut sommet de son village, attirant tout de suite l'œil de la jeune fille. Elle se cramponna à la banquette arrière pour s'avancer et essayer de distinguer ce que cachait ce point lumineux. Une forme se dessinait, mais elle semblait faire une dizaine de mètres de haut, c'était insensé. Elle plissa les yeux et se figea instantanément. C'était le monstre, l'ange à dix queues, beaucoup plus grand que la normale qui la fixait encore. Or, malgré la distance, elle pouvait voir son œil la scrutait, mais ce n'était pas comme d'habitude... Il avait maintenant un iris, une pupille qui venait compléter le blanc uniforme. Ce n'était pas une simple observation animale, mais une surveillance divine. L'ange envoyait un message qu'elle ne comprenait pas, mais elle ressentait de la peur, des frissons le long de sa colonne vertébrale. Elle n'osa en parler à personne, cela n'était sûrement que son imagination, un petit reflet que son cerveau traduirait par une image immobile d'un phénomène effrayant et inconnu... Ce moment stressant passé, la voiture ralentit considérablement en s'approchant de la ville. La mère d'Ikira se rendait au centre pour apporter les enfants et sa mère à la gare, lieu de leur séparation.

— Nous sommes arrivés, n'oubliez pas l'argent pour les billets, annonça-t-elle avec une certaine peine.
— À la revoyure les pouilleux, cracha-t-elle excédée de sa longue vie.
— Bref... Merci madame, c'est gentil de nous avoir amené jusqu'ici, s'exprima Ethedra dans toute sa politesse. Et pour l'argent, aussi...
— Ne sois pas aussi réservé ! elle entoura sa mère avec ses bras à travers le siège. Je t'aime maman, et fais un bisou à papa aussi !
— C'est bien ma fille ça, toujours attentionnée ! Tu sais, je trouve aussi que ton pote a un balai dans le cul.
— Quoi ?! cria-t-il affreusement gêné pendant qu'Ikira riait aux éclats avec sa mère. Est-ce qu'on peut y aller maintenant ?!
— Je vous écrirai tous les mois, j'espère que papa ne pleurera pas trop !
— Il tiendra le coup, faites attention à vous, d'accord ?
— Bah oui maman, qu'est-ce que tu crois, on est responsable !

      Ils refermèrent les portes et s'éloignèrent vers la gare avec de grands gestes, s'engouffrant dans la foule. La mère fit de même mais dès le contact perdu, son sourire s'effaça pour montrer un visage accablé. Son regard se perdit dans le vide puis elle posa son front sur le volant, les larmes aux yeux avant de se relâcher et de pleurer : "Je n'aurais pas pu la dégoûter de ma voie, finalement... Ma fille, tu ne sais pas ce qui t'attend...". Elle s'arrêta de sangloter et agrippa fortement le volant. Une subite détermination ressortit à travers des yeux rouges et une mâchoire crispée, à la limite de l'éclatement : "Oh mais je sais que tu réussiras, ce monde ne t'aura pas !". Elle démarra la voiture et s'en alla. Elle se demandait à quoi ressemblerait sa fille quand elle reviendrait dans plusieurs années car évidemment, elle s'en sortirait.

      Seul à être concentré, Ethedra suivait les panneaux et les instructions précédemment données pour acheter les billets et s'installer dans le bon train. Ikira ne faisait qu'observer les gens, il y en avait tellement qu'elle en perdait la tête. Ils étaient tous bien habillés et très respectueux les uns des autres, ce qui surprenait Ikira qui se comportait d'habitude sans retenu dans la mesure où elle connaissait tous les autres villageois. Le départ du train lui fit bizarre, mais elle adorait la vitesse de cette machine électrique et silencieuse.

— La ville est tellement grande, regarde Ethedra, il y a des grattes-ciels et des routes partout ! Elle collait son visage à la vitre en contemplant le manège orchestrait par les innombrables véhicules. Tiens les voitures d'ici vont vraiment pas vite.
— Elles fonctionnent grâce à des agro-carburants, ils sont peu efficaces mais c'est le seul combustible autorisé, expliqua-t-il tout simplement en lui décollant la face de la fenêtre pleine  de microbe devant les regards curieux des passagers.
— Comment tu sais ça ?
— Quand j'ai acheté les tickets, un homme m'a demandé où j'allais. Il s'est avéré qu'il va prendre le même bus que nous, et il m'a expliqué quelques trucs. Par exemple, le voyage vers la région s'effectue par voie souterraine, on passe sous les canyons pour éviter le danger.
— Dans un tunnel ? C'est... balbutia-t-elle en essayant de s'imaginer le contexte. Oh, je sens que je vais adorer ! On sera ensemble dans un endroit effrayant et tout, faudrait pas être claustrophobe ! Ha ha ha ! Ikira s'excitait encore toute seule quand une question jaillit dans sa folle imagination. Pourquoi les canyons sont si dangereux ?!
— Mmh, ils sont impossibles à contourner, puisqu'ils entourent la région entière, et à survoler à cause de certains monstres très puissants. Je ne sais pas pourquoi cet homme m'a parlé de tout cela... ajouta-t-il avec un certain ennui.
— D-des monstres sont capables de détruire des engins volants ?! Oh mais oui, maman m'avait déjà raconté plein d'histoires comme ça !
— Tu es sûre que tu veux toujours voyager... ? Je veux dire, c'est vraiment dangereux.
— Justement Ethedra, nous ne devons pas avoir peur !
— Si tu le dis.

      Il n'était pas d'accord avec les propos de son amie. Elle ne se rendait absolument pas compte de ce qui les attendait, comme si elle n'avait écouté qu'à moitié les aventures de sa mère. Au pire, elle en serait témoin et déciderait de son propre chef de revenir au village pour vivre tranquillement... C'est vrai, ils n'étaient que des enfants, pourquoi prendre de tels risques... ? Il ne la comprenait pas, mais il ne l'abandonnerait jamais pour autant et surtout, il ne chercherait pas à détruire ses rêves. Le train atteignit la dernière station située dans un lieu peu peuplé. Ethedra ne perdit pas de temps pour se procurer les billets de transports, fidèle à ses responsabilités étant donné l'absence de celle-ci chez son amie. Cette dernière était hypnotisée par la phénoménale rangée de montagnes qui délimitaient les canyons. De loin, on aurait pu les confondre avec un alignement de couteaux rouillés. L'exceptionnel ciel nuageux d'été qui planait au-dessus d'elles ne faisait qu'accentuer l'effroi et l'atrocité que ces montagnes présentaient. Le blondinet sortit Ikira de sa torpeur afin de se rendre sur le quai d'embarquement. Le quart des gens étaient musclés, stylés ou encore terrifiant de part leurs vêtements excentriques ou leur visage exagérément sérieux. L'autre quart ressemblait à des employés de bureaux, sûrement muté, et à des intellectuels. Enfin la moitié n'était que des touristes, comme eux, avec tous types de personnes mais peu d'adolescent et aucun enfant. Malgré le style peu commun d'Ethedra et les cheveux roses d'Ikira, ils n'attiraient pas l'attention ici.

      Ils n'étaient pas les seuls à voyager, à parcourir ce monde. Ikira en était ravie, elle pourrait faire des rencontres formidables. Cependant, sa joie était contrebalancée par la peur de la découverte, elle se demandait si elle avait fait le bon choix...

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