Chapitre 1 : la scène de l'auteure [Léanne]

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Je suis arrachée de mon doux rêve par mon horrible réveil. J’agrippe mon oreiller, le replie contre mes oreilles et laisse mes paupières se refermer.

– LÉANNE !

Pourquoi la voix de ma mère peut traverser mon coussin ? !

Il m’ait sauvagement arraché. En contestation, je grogne et me réfugie sous ma couette. J’entends maman soupirer et sens mon matelas s’affaisser sous un nouveau poids. Elle a dû s’asseoir au bord.

– Dois-je te rappeler que Raphaël va bientôt se lever ? Tu sais très bien ce qu’il fera en premier…

Toute trace de fatigue quitte mon corps en un éclair. Je tente de quitter mon lit mais me retrouve coincé dans mon propre cocon.

FOUTU TISSU DE MÉDEUX ! LAISSES-MOI SORTIR !

Je me débats comme une folle, réussis à de me dépêtrer, manque de me rétamer sur le sol en mettant un pied au sol et me précipite sur mon dressing. J’étudie rapidement son contenu, choisit la tenue parfaite pour une rentrée et sors en trombe.

– Pas plus de dix minutes ma puce ! me rappelle ma mère.

Je m’élance dans le couloir au moment où mon demi-frère sort de sa chambre. Nos regards se croisent.

– OH LA…

Je me mets à sprinter, ses pas précipités précédent les miens.

– N’Y PENSE MÊME PAS !

J’ouvre la porte de la salle de bain, balance mes affaires sur le carrelage et me plaque juste à temps contre celle-ci. Raphaël secoue la poignée comme un malade tout en poussant de toutes ses forces dessus. J’ai du mal à le retenir. Il n’existe qu’une solution : fermer la pièce à « clé ». Ma main droite tente maladroitement de l’actionner mais la faible ouverture qu’à gagner mon demi-frère m’en empêche.

– Fiston, elle est déjà à l’intérieur, tente de le raisonner son père. Maintenant, tu dois attendre ton tour.
– Hors de question ! Elle va prendre toute l’eau chaude cette conna…
– Raphaël, surveilles ton langage !

J’appuie sur mes jambes dans un dernier effort. L’effet de surprise fonctionne et je peux enfin utiliser le verrou. Je souffle de soulagement, me redresse, attrape mes vêtements alors que des noms d’oiseaux résonnent dans le couloir et que Carter tente en vain de calmer son fils.

•○•○•○•

Après une préparation catastrophique, nous sommes enfin dehors… et pas partit. Raphaël et moi sommes debout devant la porte, soumis à l’étude nostalgique de nos parents.
Honnêtement, je commence à trouver le temps long.

– Ça grandit si vite… murmure ma mère émue.
– Eh oui Elizabeth, confirme mon beau-père. Un jour ils sont dans un berceau et le lendemain ils entrent en terminale.
– Ouais, bon, entre « un jour » et « le lendemain », il y a quand même dix-sept ans, leur fis-je remarquer.

Cependant aucun des deux ne semblent le soulever. Je vais pour le répéter quand mon demi-frère m’arrête :

– Laisses-tomber, rien ne peut les sortir de leur état de niaiserie.

Il quitte le perron, je l’imite tout en annonçant :

– À ce soir !

Une fois assez éloignés de la maison, il sort une pièce de sa poche. Il m’adresse une œillade que je décode sans mal.

– Pile, déclaré-je.
– Donc je prends face.

Avec son pouce, il la fait voler puis la rattrape aisément. Quand il enlève sa paume pour découvrir le résultat, je laisse échapper un cri de victoire.

– Pile ! m’exclamé-je. Je vais donc sur le trottoir de droite !

Je me dépêche de traverser le passage piéton, contente d’éviter tous ces obstacles. Quelqu’un devrait vraiment empêcher cette grand-mère de mettre ces pots de fleurs au bord de sa fenêtre au cinquième.

– On se revoit au bahut ! proclamé-je.

Je ne prête même pas attention à sa réponse, enjouée par cette journée qui s’annonce radieuse. Je sors mon portable et mes écouteurs de la poche de mon blazer, permettant aux osts épiques de divers jeux vidéos, mêlés à certaines de mes compositions, d’accompagner mes pas vers le lycée.

Beaucoup de jeunes de mon âge se consolent de la rentrée en se disant, qu’au moins, ils retrouvent leurs copains. Bah moi c’est pas mon cas. C’est assez simple en fait : plus la popularité de Raphaël augmente et plus la mienne chute. Difficile de se faire des amis quand tout le monde vous regarde de travers, car vous avez le malheur de ne pas vénérer un des meilleurs joueurs de tennis de l’établissement et, même, vous crêpez le chignon avec H24.

M’enfin, l’important pour l’instant c’est de dénicher un club qui puisse m’aider à retrouver mon inspiration. En espérant que ce soit suffisant…

Le brouhaha des élèves devant le portail m’assaille et m’oblige à augmenter le son pour pouvoir profiter du piano et du violon qui créent une musique digne d’un combat de titans. Je me faufile dans la foule pour atteindre l’entrée. Le passage d’un coup se vide et je l’atteins avec un facilité déconcertante à laquelle je ne prête pas plus attention. Je pose mes doigts sur la poignée et va pour l’actionner quand une mélodie complètement différente s’impose. Je pousse un juron, sors mon portable de ma poche, le déverrouille et fais défiler ma longue liste en quête d’une autre.

Ah ! En voilà u…

Un de mes écouteurs m’ait arrachés avec violence. Il me faut un instant pour me rendre compte que l’on me hurle dessus.
Mes chers camarades n’ont pas l’air très content… Qu’est-ce que j’ai encore fait pour les énerver comme ça ?

– J’aimerais passer, m’interpelle une voix derrière moi.

Je me retourne et tombe nez-à-nez avec elle, la reine du lycée.
Toujours habillé d’une sorte d’uniforme tiré par quatre épingles, même ses cheveux paille hideux sont coupés de manière parfaite et organisés sur ces épaules ! Cette meuf est adulée de tous. Je ne vois vraiment pas pourquoi ! Ses yeux verts délavés n’expriment aucune sympathie et SURTOUT elle a un PUTAIN de regard HAUNTAIN ! Comme…

Tu te rends compte de l’horreur que tu as commise ?!

lui.

Je sens mes poings se serrer.

N’y pense pas. N’y pense pas. N’y pense pas. N’y pense pas. N’y pense pas…

– Reste pas planté là ! m’ordonne une brute en me poussant.

Je recouvre mon équilibre de justesse. Mon côté borné se rajoute à ce désagréable souvenir que je tente de chasser. On m’a toujours dit c’est un défaut, je le reconnais moi-même. Hurlez-moi d’exécuter quelque chose et je n’obéirais pas. Je soutiendrais votre regard avec un air de défis et demanderais :

– Elle va faire quoi la pauvre chou si je ne bouge pas ?

La colère contre moi s’élève avec les cris de contestations qui s’entremêlent :

– Comment ose-t-elle rester sur le chemin d’une Hector ?
– Elle n’a aucune éducation !
– Qu’elle ne s’étonne pas après que personne ne l’apprécie !
– Je vais lui casser la gueule !

J’aurais pu rester comme ça toute la matinée si cette blonde arrêtait d’avoir ce SATANÉ regarde condescendant !

Tu es une HONTE ! Tu es…

Les mauvais souvenirs reviennent à l’assaut. Tout ça à cause de cette putain de gosse de riche !

– Apprend la politesse, Iris Hector, grogné-je en entrant dans la cour.

– … contre nature !

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