Solal

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C’était un jour du mois de Juillet, le quatorze. Cela faisait trois ans exactement. Une belle journée d’été, le soleil était au zénith et Mathide s’affairait aux derniers préparatifs pendant que Vadim procrastinait, encore en caleçon sur le canapé. Avec toute la nonchalance qui caractérise l’adolescence, il s’étirait, comme un chat au soleil, devant une série télévisée.

- Vadim chéri, vas t’habiller, je t’ai déjà dit cent fois que nous n’allions pas tarder à partir ! lança Mathilde, tout en garnissant la glacière en guise de musette prévue pour le déjeuner.

- Mwhouai bougonna le jeune homme dans sa barbe au duvet encore naissant. Il s’extirpa du sofa aussi difficilement que s’il avait eu cent ans, jeta un coup d’œil à sa mère qui ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel à la fois amusée et dépitée de l’attitude de ce grand dadais acnéique qui l’exaspérait autant qu’elle l’aimait.

- Tu pourrais montrer un peu plus d’enthousiasme quand même ! Ça fait cinq ans que nous ne sommes pas partis tous les trois avec ton père. Tu devrais être content !

Solal était dehors et vérifiait les derniers détails du voyage, inspectant le véhicule sous tous les angles. Huile, liquide de refroidissement, pression des pneus…Tout était prêt.

Cet homme n’avait jamais rien laissé au hasard. Tout dans sa vie était orchestré comme Le vol du bourdon de Korsakov, avec vélocité, mais rien qui ne soit mélodieux ne laissait libre court à une quelconque fantaisie. Il était trader pour une banque Suisse à Genève où il avait fini par s’installer avec Mathilde à la sortie de ses études de commerce qu'il avait faites en France.

Nonobstant quelques coucheries d’un soir sans lendemain, il n’avait véritablement fréquenté qu’elle dont il était tombé amoureux dès la première seconde.

Elle était tout ce qu’il n’était pas. Légère, drôle, fantasque, énigmatique, spirituelle. Elle avait été pianiste et depuis la naissance de Vadim avait mis ses ambitions professionnelles en sommeil pour donner des cours dans un conservatoire. Elle avait depuis longtemps sacrifié sa vie de femme pour celle de mère et de parfaite épouse mais n’aurait refait pour rien au monde des choix différents tant l’amour que lui portait Solal était profond et pure. Leurs différences semblaient venir combler chez elle toutes les carences. Elle était parvenue dès le début à faire de leur vie de couple une cours de récréation, si bien que même le quotidien ressemblait à la nouvelle page d’un livre dont on se languit de connaître la suite. Mathilde était sa magicienne. Puis le temps et la routine s’étaient finalement invités dans leur vie jouant à leur tour leur petite ritournelle. Tout avait pris une tournure moins improvisée, plus paramétrée et conformiste. Mais l’arrivée de Vadim avait été le cadeau qu’ils n’attendaient plus, la manifestation de leur amour. Il était l’enfant de l’amour et leur miracle.

Vadim avait remis de la fantaisie dans le ronronnement de leur quotidien et Mathilde aimait ce fils comme s’il était la suite parfaite de cette œuvre qu’elle avait élaborée des années durant. Cet enfant était le parfait mélange de leur être et de ce que Mathilde considérait être sa plus belle composition.

Ce matin-là, en prenant la route, la radio annonça, la frontière passée, un Samedi rouge sur les autoroutes du Sud. Le chassé-croisé du quatorze juillet. Solal s’était enfin décidé deux mois plus tôt à prendre une semaine de vacances depuis cinq ans et c’est tout naturellement qu’ils choisirent la France pour destination, comme pour célébrer le lieu de leur première rencontre.

A dix heures, après un dernier inventaire des choses à ne pas oublier, des dernières consignes à donner aux voisins et des lumières à éteindre, ils fermèrent la porte derrière eux.

Solal conduisait depuis un moment quand Mathilde proposa de faire une halte pour se dégourdir les jambes et manger un bout.


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