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Corentin avait immédiatement sympathisé avec Ludo et ils se fréquentaient avec plaisir. Ludovic, un twink très mignon, avait cependant quelque chose dans le regard qui vous tenait éloigné. Cela tombait bien, empêchant Corentin de développer une affection dangereuse.

Un soir, contrairement à son habitude, Ludovic avait suivi un client, un inconnu introduit par un autre membre. Corentin l’avait trouvé bizarre en partant. Puis il avait fait défaut, sans explication.

Il avait réapparu deux semaines plus tard, accompagné d’une baraque, pendant qu’un autre discutait avec Joe en le désignant. Corentin avait voulu s’approcher pour prendre de ses nouvelles. Ludo lui avait lancé un regard terrifié qui l’avait fait reculer. Puis tout ce groupe s’était dispersé.

Corentin était troublé par cet incident. En discutant avec Fred, il découvrit le drame qui avait dû se dérouler sous leurs yeux. Le premier soir, Fred lui expliqua que Ludo avait dû absorber du GBH, la drogue de l’oubli, du viol. Dépourvu de sa volonté, il avait suivi ces hommes. Le pire était à venir. Fred l’avait observé avec soin : Ludo avait été battu. Il était presque sûr qu’il était ligoté. Devant la stupéfaction de Corentin, il dit qu’il soupçonnait un trafic. Ludo avait été l’objet d’une transaction. Corentin le regarda horrifié. Il se rappela la disparition soudaine et tout aussi mystérieuse du serveur que Ludo avait remplacé. Et celle du précédent. Chaque fois, Joe avait avancé une explication crédible. Se pouvait-il qu’ils aient été aussi victimes d’un enlèvement ? Curieusement, Kevin, l’autre twink, semblait intouchable.

Corentin ne dormit pas de la nuit. Le lendemain, il avait pris sur lui pour aller au commissariat. C’était un club privé, il ne connaissait que le prénom, le vrai, de Ludovic. Le policier confirma l’hypothèse de Fred, tout en déplorant l’impossibilité de lancer une recherche. Corentin, effondré, avait partagé cette information avec ses camarades.

Corentin eut un frisson. Cet épisode datait d’une dizaine de jours. Ludo avait été remplacé par Lucas, qui se trouvait donc en danger. Il n’était pas question de le laisser l’affronter. Depuis un certain temps, il avait de plus en plus de mal à supporter ces tripotages. Il était de plus en plus distant avec les clients, ce qui diminuait les récompenses. La veille au soir, il s’était excité sans raison. Il refusait de voir que l’apparition de Lucas l’avait transformé. Il s’était laissé aller. Embrasser ainsi sur la bouche, se laisser tripoter aussi fortement n’était pas dans ses habitudes. Il avait voulu apparaître comme maitre de la situation aux yeux de Lucas.

Il devait le protéger. Corentin se promit, dès ce soir, de raconter cette histoire à Lucas, en lui ordonnant de ne jamais boire une consommation qui ne venait pas directement du bar !

Corentin décida de quitter ce job très vite, en emmenant Lucas. Il en avait assez. Il ne pensa pas un instant parler de cette décision à l’intéressé.

De toute façon, il avait approché un labo de recherche. Il montait son plan pour poursuivre vers une thèse. Il avait le sujet, un accord de principe pour sa direction. En fait, sa véritable passion, il la trouvait dans ses études et ses recherches. En regardant bien, ses camarades étudiants étaient tous un peu fondus, chacun à sa façon. On sentait chez certains des traits autistiques plus ou moins prononcés, chez d’autres une sorte de folie chez lui, cette ambiguïté physique et sexuelle. Mais quand ils débattaient entre eux, plus rien ne comptait que cette communion dans les idées, ce transport vers l’extraordinaire. Sa vraie passion !

Sa vie devait prendre un nouveau tournant, comme s’il avait enfin décidé de devenir adulte. L’apparition de Lucas bouleversait la donne. Il s’était passé quelque chose d’inexplicable, car il faisait entièrement partie du futur. Derrière cet agneau perdu dans une horde de loups, on devinait un garçon sage, élevé dans l’amour et la facilité. Il avait été sensible à la fellation, ne paraissait pas choqué par l’homosexualité prégnante du club. Il paraissait attiré fortement par lui. Pourtant, Corentin doutait fortement que Lucas soit gay. Une forte, très forte, affection était apparue. Il retenait encore le mot d’amour. Corentin ne pouvait s’attacher à ce trop aimable et trop beau garçon. Il se devait de l’épargner. Il décida de l’accompagner doucement et gentiment vers la sortie. C’était le mieux pour chacun d’eux.

Corentin fut pris d’une frayeur ! Ils n’avaient rien fixé, rien précisé pour la soirée. Lucas ignorait certainement l’existence du planning sur lequel chacun des serveurs fixait sa présence : deux en semaine, sauf le lundi, trois les vendredis, samedis et dimanches.

Si sa mémoire était bonne, c’est avec Kevin qu’il devait travailler ce soir. Kevin était l’autre twink, un petit minet à l’air déluré. Comme eux tous, il n’était pas question de partager la recette : ils en avaient tous besoin. De plus, Kevin était un coureur agressif, fondant sur tous les autres minets de son horizon. Lucas allait se rendre au club, faute d’instruction. Devant Lucas, soit Kevin le défonçait physiquement pour l’empêcher de travailler, soit il le défonçait sexuellement. Lucas allait trinquer ! Ils n’avaient même pas échangé leur phone ! Pour Corentin, il était hors de question que quiconque touche à Lucas. Il s’en sentait responsable. Il décida d’arriver tôt au Club pour intercepter Lucas. Kevin était toujours à la bourre.

Corentin tenta de se remettre au boulot, perturbé par toutes ces questions. Le baiser de Lucas revenait lui enchanter l’esprit.

Un SMS de Joe tomba :

— Tu as les coordonnées de Lucas ? Kevin a un empêchement. Essaie de le joindre si tu ne veux pas avoir à tout assurer seul.

Le problème était résolu ! Sauf que Lucas allait retravailler. Il avait pris gout aux caresses des clients du club. Cela n’était pas bon pour lui.

De son côté, Lucas se précipitait ! Il avait hâte de retrouver ce travail un peu spécial. Être caressé pour soi, pour sa beauté, était une reconnaissance étrange, mais extraordinairement gratifiante. Il avait ressenti son corps entièrement. Qu’on lui touche le sexe, qu’il soit en érection et manipulé par des mains inconnues l’avait transporté. En plus, financièrement, cela allait arrondir sérieusement son budget. Il était heureux. Il se refusait à voir que le principal était qu’il allait revoir Corentin. Il y avait pensé toute la journée. Ce n’était pas de l’amour, car ils étaient deux garçons. C’était une grande, très grande amitié, qui allait jusqu’au contact physique. Ce que Corentin lui avait fait était limite, mais dans une limite renouvelable. Son plaisir avait été tellement fort et inattendu, qu’ils pouvaient recommencer. Et peut-être dans l’autre sens ! Cette idée le durcissait déjà, alors qu’il franchissait la porte. Il se rendit immédiatement au vestiaire.

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