Andréa - XVI

4 minutes de lecture

02h05

Lorsque je sors quelques dizaines de secondes plus tard de ma tente dans laquelle je m’étais réfugiée afin d’enfiler une tenue un peu plus décente, j’aperçois ma jeune sœur en train de somnoler dans la pelouse. Elle tangue légèrement.

— Réveille-toi. ordonné-je en la secouant doucement.

— Je ne dors pas. Je repose mes yeux.

Je ne peux m’empêcher de lever les miens au ciel face à la nuance invoquée par Iris. Un pouffement s’échappe de la bouche de Solal. La situation semble beaucoup l’amuser. Malgré les ténèbres nous enveloppant, je lui lance un regard noir qui l’invite à aller dormir. Les traits de mon visage éclairé par la lune doivent être assez convainquant car mon petit ami disparait dans la tente.

— Allez au dodo maintenant, décidé-je pour ma sœur.

— Je n’ai pas envie d’aller dormir, rouspète cette dernière en croisant les bras sur sa poitrine.

— Mais tu es fatiguée…

— Noooon…

L’accentuation sur la voyelle de ce mot de trois lettres me fait clairement penser le contraire. À peine a-t-elle finit sa phrase qu’elle étouffe un long bâillement avec son bras.

— Allez viens, tu vas reposer tes yeux dans ton lit.

— D’accord.

Contre toute attente, Iris obtempère et me tend sa main pour que je l’aide à se relever. Je m’exécute mais cette dernière prend un malin plaisir à ne pas me faciliter la tâche. Hilare, elle se laisse aller de tout son poids. Ma motivation à la glisser ans ses draps est plus lourde que le gros bébé me servant de sœur. J’arrive après quelques efforts à la mettre sur ses deux jambes. La partie n’est pourtant pas encore terminée car Iris avance petit pas par petit pas afin de faire durer le plaisir. Heureusement que Papa et Maman sont couchés. Je ne sais pas comment ils auraient réagi en voyant leur plus jeune fille éméchée à peine la majorité atteinte.

M’armant d’une patience à toute épreuve, j’essaye de ne pas soupirer trop bruyamment et de ne faire aucun commentaire. Je connais Iris. Si, par malheur, je lui montre qu’elle obtient l’effet escompté, je peux être sûre qu’elle va redoubler d’ingéniosité pour m’agacer encore plus. Mon sourire factice sur le visage, je tente de me persuader qu’elle va se lasser toute seule de jouer à la tortue.

Au bout de plusieurs minutes interminables, nous arrivons dans l’entrée de la maison. Je m’engouffre le plus silencieusement possible dans la cuisine, récupère un verre et une bouteille d’eau puis rejoins la Lenteur incarnée. Mais la fatigue commence à se faire davantage sentir alors les pas de ma sœur s’agrandissent afin de regagner plus rapidement son lit. Malheureusement pour le sommeil de nos invités, elle est aussi discrète qu’un chien dans un jeu de quille. Je prie intérieurement pour qu’elle ne réveille pas toute la maison.

— Désolée, articule-t-elle silencieusement.

Nous regagnons sa chambre et elle s’écroule sur son lit.

— Tu devrais boire ça, lui conseillé-je en lui tendant un verre d’eau tout juste servi.

Iris ne conteste pas et saisit le contenant avec ses deux mains. Elle reste le regarder quelques secondes avant de reporter son attention sur moi.

— C’est pour t’éviter d’avoir mal à la tête ou au ventre demain matin. Tu dois t’hydrater.

Tandis que ma sœur m’obéit sans rechigner, Rudy fait irruption dans la chambre.

— Je cherchais Iris et j’ai vu de la lumière à l’étage. Ça va ? chuchote le nouveau venu.

Les deux derniers mots ont été prononcés d’un ton ne laissant aucun doute sur leur sincérité. Pour toute réponse, Iris opine de la tête, finit son verre et me le tend. Je le remplis de nouveau et lui rends.

— Je peux rester avec elle ?

Sa question est plus hésitante. Mon instinct de grande sœur est en éveil.

— Tu n’es pas obligé. Elle va bien, elle a juste besoin de se reposer.

— Je commence à fatiguer moi aussi alors…

Je comprends que Rudy a vraiment envie d’être avec ma sœur. Mon intuition me souffle que je peux lui faire confiance. Après tout, les autres ne tarderont pas à venir se coucher quand ils se rendront compte qu’Iris est partie dormir. Quoi que. J’observe pendant quelques instants le jeune homme mais le regard qu’il pose sur ma sœur alors qu’elle se glisse sous sa couette finit de me convaincre. Iris est en sécurité, il ne lui arrivera rien. Au pire, elle se mettra à hurler pour réveiller tout le monde. Et le lendemain, je me chargerais de l’affaire.

Je me rends dans le dressing pour attraper un sac de couchage et un petit coussin à prêter à Rudy. Pendant ce temps-là, il installe son matelas avec un gonfleur électrique. Heureusement, il ne fait pas beaucoup de bruit. Cela ne perturbe pas le début de la nuit d’Iris. Une fois sa tête posée sur l’oreiller, elle a été accueillie dans les bras de Morphée. Sa respiration est régulière, je m’assois au bord du lit et lui caresse doucement les cheveux. J’espère qu’elle n’aura pas de regrets d’ici quelques heures.

Une fois, le matelas gonflé, Rudy se glisse dans le sac de couchage. J’étouffe un bâillement et comprends alors qu’il est temps de ne retrouver Solal et de regagner ma tente. Je me lève et souhaite une bonne nuit à Rudy. Ce dernier me répond avec un sourire tandis que je quitte la pièce. En traversant le couloir menant à la mezzanine, mon instinct de grande sœur se réveille. Je m’arrête quelques secondes. Je ne peux pas laisser ma sœur, seule en compagnie d’un garçon que je connais à peine. À cette pensée, je fais demi-tour. Sur le pas de la porte, j’observe la scène à la dérobée. Rudy est au près d’Iris. Il lui embrasse le sommet du crâne, les yeux mi-clos. Il se couche le plus silencieusement possible sur son matelas gonflable en tournant le dos à sa partenaire de jeu.

Un poids s’envole de ma poitrine. Attendrie par l’attitude du jeune homme, je ne peux empêcher un léger sourire de se dessiner au coin de mes lèvres. Iris est en sécurité et c’est tout ce qui m’importe.

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