Andréa - I

3 minutes de lecture

16 août 2019

23h54

Comment leur dire ? Comment leur annoncer que j’ai échoué ? Il me faudrait un plan B, une échappatoire, quelque chose à leur annoncer. Pour la millième fois de la journée, je consulte ma boite-mail. Toujours rien mais cette absence de nouvelles ne m’étonne pas réellement. Toutes les réponses obtenues jusqu’à présent sont négatives. Je les ai affichés dans mon armoire. Certaines sont de parfaits exemples des lettres typiques de refus, d’autres tendent davantage vers l’originalité. Mais le résultat est le même : je ne deviendrais jamais écrivain. Et encore moins avocate. Je ne suis pas assez douée. Frustrée, je lance mon téléphone à l’autre bout du lit puis attrape le petit carnet sur ma table de chevet.

Je me mets à mordiller le bout de mon crayon en relisant pour la centième fois ma To Do List alors que je la connais par cœur. La date butoir étant demain midi, je dois m’assurer que je n’ai rien oublié. Histoire de réussir au moins quelque chose cette année.

— Tu as faim ? me demande Solal en pointant du doigt mon stylo.

Je m’arrête net avant de comprendre. J’ôte aussitôt mon crayon de la bouche, honteuse, puis je me lève chercher la clé USB avec toutes les musiques téléchargées pour demain soir. En me voyant faire quelques jours auparavant, ma mère n’a pas arrêté de me répéter « Tu me rappelles quelles études tu fais ? », comme si je pouvais oublier ce genre d’informations.

Je connecte le périphérique de stockage à mon ordinateur. Les chansons sont toujours là. Il n’y a pas de Wi-Fi dans le sous-sol aménagé en piste de danse pour l’occasion alors j’ai dû trouver une autre solution. J’agis toujours pour la bonne cause.

— Andy, c’est au moins la quatrième fois que tu vérifies cette clé. Ça ne se supprime pas par magie des fichiers.

— On ne sait jamais, je grommelle dans la barbe que je n’ai pas.

Sans faire attention à mon petit ami, j’inspecte ensuite les enveloppes contenant des photos des dix-huit dernières années. Elles constitueront une jolie guirlande dans le barnum. Les invités pourront découvrir l’évolution d’Iris, seule, avec la famille ou les amis. Je caresse du bout des doigts une photo de nous enfants.

Ce jour-là, nous nous étions déguisées pour Halloween. J’arbore un costume noir de sorcière et ai peint une grosse verrue rouge sur mon menton alors que ma sœur a le visage barbouillé d’orange et noir afin de ressembler à une citrouille. À quatre pattes, au côté d’une véritable cucurbitacée creusée avec notre père, nous tentons de faire la pause la plus terrifiante qui soit. À en juger pour mon actuel sourire, nous n’avons pas vraiment réussi à effrayer qui que ce soit cette fois-là.

Soudain, une alarme sur mon téléphone me sort de ma rêverie. Je saute de mon lit et me précipite dans la salle de bain. Je prends Iris dans mes bras et la serre contre ma poitrine, me mettant du dentifrice dans les cheveux mais qu’importe. Elle se raidit par surprise.

— Joyeux anniversaire ma sœur ! Je tenais à être la première.

Je l’embrasse sur la joue. Elle finit par me rendre mon étreinte en riant puis crache dans le lavabo.

— Merci ! s’exclame-t-elle avec le contour de la bouche encore blanc.

Derrière moi, Solal, dans l’encadrement de la porte, souhaite également un bon anniversaire à ma cadette. Au même moment, on entend un troupeau d’éléphants monter les escaliers quatre à quatre. Quelques secondes plus tard, Magdalena, la marraine d’Iris accompagnée de ses deux filles, Aline et Lou, saute littéralement sur cette dernière.

Venant de Chartres, les trois assaillantes sont arrivées dans la journée avec Fabien, le mari de Magda.

Bien qu’amusés par l’excitation ambiante autour de la majorité de ma sœur, Solal et moi retournons dans ma chambre pour aller nous coucher.

Il soulève le drap et les couvertures alors qu’il sait que je déteste quand il fait cela. Il a peut-être oublié. Après tout, cela fait un an que nous n’avons pas dormi ensemble dans mon lit, je pense en m’y glissant à mon tour en faisant attention de ne pas tout déborder.

— Tu es contrariée ? finit par me demander le squatteur de draps.

Je ne me suis même pas rendu compte que j’avais les sourcils froncés et la mâchoire légèrement contractée.

— Je suis stressée, j’ai envie que tout soit parfait.

Solal ne me répond rien, il a l’habitude, c’est toujours plus au moins le même scénario la veille d’une réunion familiale. Par réflexe, je me cale dans ses bras chauds et je sens la fatigue alourdir mes paupières. Il a toujours eu cet effet apaisant sur moi.

— Il faut que tout soit parfait.

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