Leçon n° 1 : toujours bien ranger ses affaires

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"Merde. Merde ! MERDE !!"

Ça fait au moins cinq minutes que je tourne en rond dans cette pièce en cherchant mon fusil. Et bien sûr, quand un zombie est en train de frapper à votre porte, c'est cinq minutes de trop.

Ma mère avait raison, finalement : mon étourderie me perdra.

"Mais où il est, bordel ?"

Je suis sûr de l'avoir posé sur la table, mais de toute évidence, il n'y est pas. Je pourrais y réfléchir au calme, mais les râles de la créature et le bruit de la porte en train de céder ne m'aident pas vraiment. Tant pis, je passe en mode urgence et décide de me rabattre sur autre chose ... Mais quoi ?

Totalement paniqué, je regarde autour de moi : la table, les chaises, l'halogène ... Que choisir ? Bon, de toute façon, ça va partir en morceaux, alors pas de chichis. J'attrape le lampadaire en vitesse ; avec un peu de chance et si je vise bien, ça écrasera la boîte crânienne. Je pousse un cri pour me donner le courage que je n'ai pas ...

... Et une rafale de calibre 12 réduit le zombie en bouillie, me manquant de peu. Hébété, je me retourne et soupire :

  • Non mais ça va là, je gérais, je l'avais presque ...
  • Ah oui ? A quel moment, au juste ? répond une voix moqueuse.

Je secoue la tête en grognant, et repose délicatement le lampadaire. Le canon de son arme encore fumant, Alexa se fout de moi :

  • J'ai bien cru que tu allais lui demander la permission de lui éclater la tronche, gamin !
  • ' M'appelle pas comme ça !

C'est vrai quoi, moi, c'est Julien. J'ai 23 ans, je suis petit, pas costaud et asocial ; bref, je n'ai rien d'un Terminator, surtout avec mes cheveux bouclés et mes grands yeux bleus.

Alexa est mon opposé : 1 m 80, peau café au lait, dreadlocks rose fluo, percée et tatouée de partout, elle promène sur le monde un air cynique et suffisant. Passons sur le fait que c'est une tireuse d'élite, une pro du combat au corps à corps et qu'elle jure comme un charretier. À côté d'elle, j'ai effectivement l'air d'un gamin.

Mon seul atout, c'est ma passion du bricolage. Je peux réparer quasiment n'importe quel appareil en un temps record. Vous voyez le stéréotype du gosse qui démonte la montre de Papa pour voir "comment c'est fait dedans" et la remonte sans se tromper ? Bon, en vérité, il m'a fallu plusieurs essais et quelques fessées avant d'y arriver, mais j'ai quand même appris assez vite. C'est même comme ça que j'ai trouvé mon futur métier : je dépannais les appareils ménagers, les tablettes, les smartphones, et jusqu'aux voitures et aux vélos. Ma seule exigence, c'était de travailler à mon compte. Pas de patron, pas de collègues, pas d'emmerdes.

Quand les choses se sont un peu corsées là-dehors, c'est Alexa qui est venue me trouver. Elle avait un fusil enrayé, et j'étais le dépanneur le mieux recommandé sur Internet ... Et le seul encore en vie.

Bien sûr, j'ai réparé l'engin, et en prime, je l'ai équipé de tout un tas de gadgets pour le rendre plus efficace. À la vue du résultat, Alexa a eu l'air sincèrement épatée (une expression que je ne lui ai jamais revue depuis), et m'a dit :

  • Ouaip, c'est du bon boulot. J'te propose un marché : tu deviens mon mécano perso, et je te protège. Offre non cumulable et valide seulement pendant les 30 prochaines secondes. T'en penses quoi ?

Vu comment tournaient les choses depuis quelques temps, et malgré mon aversion pour le travail en équipe, j'ai vite compris que j'aurais intérêt à accepter le marché qu'elle m'offrait.

Dès le lendemain, j'emménageais dans l'appartement qu'Alexa avait transformé en bunker ultra-sécurisé. Si elle ne persistait pas à m'appeler "gamin", je me sentirais presque à mon aise dans cette collaboration. De temps en temps, je l'accompagne faire la tournée des logements du coin, pour voir s'il reste des survivants ou du matériel utilisable.

Aujourd'hui, mauvaise pioche, car non seulement nous repartons bredouille, mais on a intérêt à se barrer vite fait : les coups de feu vont sans doute attirer d'autres créatures, et la porte est quasiment en miettes.

  • On se tire, confirme Alexa. Ramasse tes trucs. Oh, et tiens.

Elle me tend le fusil que je cherchais.

  • Dans la cuisine, répond-elle devant mon air interloqué. Si je t'ai pas dit cent fois de faire gaffe à ton matos ...

Elle part en ronchonnant, comme d'habitude. Et moi, comme d'habitude, je contemple l'étendue des dégâts et je me pose toujours la même question :

"Comment a-t-on pu en arriver là ?"

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