Première leçon

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Ils s’étaient donné rendez-vous au pied du Beffroi de Kan Ahr, au centre du quartier marchand de la cité de Civronno. La tour millénaire, bien que rongée par le temps, dominait la grand-place où s’activaient, dans son ombre imposante, des négociants venus des quatre coins du continent. L’énorme horloge à son sommet venait de sonner le deuxième quart lorsque Tom-ba, pantelant d’avoir traversé la moitié de la ville au pas de course, aperçut Guntasir, les mains sur les hanches et visiblement contrarié.

— Tu es en retard.

— Je n’ai pas de cheval, souffla Tom-ba plié en deux.

— Ce n’est pas une excuse, tu n’as qu’à partir plus tôt.

— Je ne trouvais pas ma deuxième botte, je n’allais pas te rejoindre en clopinant !

— Ça t’aurait fait les pieds, dit Guntasir imperturbable.

— C’est le cas de le dire !

Le champion blandkrien effleura le bord de son chapeau carré.

— Trêve de babillage, tu sais pourquoi nous sommes là.

— Oui, pour me fournir une épée.

— Ou un marteau, une masse d’arme ou encore une lance.

— Je veux une lame, comme toi.

— Peu importe ce que tu tiens dans la main. Ce qui compte n’est pas l’instrument, c’est de bien s’en servir.

— Je ne pouvais rêver d’un meilleur professeur, observa Tom-ba avec un sourire en coin.

— Néanmoins, je l’accorde, il est essentiel que sa poignée soit confortable. Elle devra sonner juste, faire partie de toi, comme le prolongement naturel de ton bras.

— Comme une bonne paire de chaussons.

— D’autres te diront qu’une arme doit être lourde et rassurante, mais ne tombe pas dans le panneau. Après des heures de rude bataille, si tu es toujours vivant, tu loueras davantage son équilibre que son poids.

— Allons trouver la perle rare !

— Je mets un point d’honneur à ce que mes élèves disposent des meilleurs outils. Je vais te présenter quelqu’un de fiable, dont la réputation n’est plus à faire. Ses lames sont indiscutées sur tout le continent. Bien entendu, son expertise vaut de l’or, j’espère que tu me comprends.

— Je vais encore m’endetter pour l’éternité.

— Allons, mon ami, au moins connais-tu bien ton créancier.

— Justement, murmura Tom-ba, la voix blanche et les épaules affaissées, comme si l’ombre du beffroi pesait soudainement des tonnes.

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