CHAPITRE VII – La télépathie.

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 J’arrive pile-poil à l’heure pour la réunion du lundi.

- Tu as failli arriver en retard, d’habitude tu es toujours en avance.

 Je me retourne, cette remarque vient de mon père.

- Excusez-moi, père, j’arrive de Nantes.

- De Nantes ?

- Oui, j’ai passé mon dimanche chez Viviane.

- Apparemment pas que la journée, tu te dévergondes mon fils.

 Un demi sourire me laisse à penser que mon excuse lui convient.

 A la fin de la réunion, il me prend en aparté.

- Je pense qu’il va falloir penser à des fiançailles, tu ne crois pas ?

- Je vais en parler à Viviane. Je l’ai invitée pour le week-end prochain.

- Bien…, je suis content pour toi Merwin, je vois que tu commences à t’épanouir.

- Merci père.

 Sur ces mots, nous nous séparons. René, qui était resté dans les parages me rejoint.

- Excuse mon indiscrétion, mais j’ai plus ou moins suivi la conversation avec ton père.

- Oui, et tu te poses des questions ?

- Te connaissant oui, je ne peux pas dire le contraire.

- Avec Viviane, nous avons passé un accord.

- Un accord ?

- Oui, tous ce que je vais te dire doit rester entre-nous.

- Tu peux me faire confiance.

Je lui chuchote :

- Viviane est lesbienne.

 Il se retient pour ne pas éclater de rire.

- Voilà une situation cocasse, si ton père l’apprenait, il risquerait l’infarctus.

- Aussi je compte sur ta discrétion.

- Pas de problème, et comment comptes-tu t’en tirer ?

- Pour le moment je ne sais pas ? Mais j’ai confiance en Viviane pour trouver une solution.

- Si tu as besoin d’aide, tu sais que tu peux compter sur moi.

Jeudi jardinier.

 Ce matin, avec Brack, nous décidons de consacrer la journée à la méditation. Nous nous dirigeons donc vers notre ami le noisetier. A l’ombre d’une de ses branches basses, je m’installe, Brack se positionne devant moi.

 Je prends la position du lotus et ferme les yeux. Je m’efforce de faire le vide en moi, de ne pas me laisser distraire, le temps s’écoule lentement. Mes muscles commencent à se détendre, une forme de bien être s’installe en moi. J’essaye de visualiser Brack qui est devant moi. Je commence à le voir, il est allongé la tête reposant sur ses pattes antérieures, il m’observe.

~ Brack je te vois.

 Dans ma vision, il semble me faire un « wouaf ». Je le vois nettement mais je n’ai toujours pas le son. Cette dernière phrase me fait sourire. Mon oreille interne ne semble pas vouloir s’ouvrir. Comment faire ? Je me force à me concentrer un peu plus. C’est bizarre, j’ai l’impression que Brack lève les yeux, on dirait qu’il veut me parler. Je sens quelque chose sur la tête, on dirait que la branche du noisetier me caresse le crâne, comment est-ce possible ?

 J’ouvre les yeux, j’aperçois Pascal, la bouche grande ouverte. Mais que se passe-t-il ? J’ai l’impression de planer. Je retombe brutalement, je pense que je vais avoir un beau bleu au niveau du coccyx.

- Vous… vous êtes un… sorcier ?

- Non Pascal, je suis un druide, et peut-être aussi… disons un mage.

- C’est impressionnant, on aurait dit un numéro de magicien.

- Surtout, Pascal, tu n’en parles pas.

- Oui, oui, je vous promets de ne rien dire.

 J’avais oublié que c’était un jour avec jardinier, faut dire aussi que je ne m’attendais pas à léviter. Où tout cela va-t-il me mener ? Pour la télépathie c’est encore raté !

 Je suis déçu, une fois de plus, mais découvrir un nouveau don me turlupine. Je suis sûr que Edouard le savait, mais pour soi-disant ne pas perturber mon évolution il n’a pas voulu m’en parler. Maintenant, il va falloir que j’apprivoise la lévitation.

 Je préviens Mathilde pour l’invitation que j’ai lancée pour dimanche. Elle est d’accord pour venir préparer le repas. Je lui promets un dédommagement qu’elle refuse dans en premier temps mais j’arrive à la persuader d’accepter.

 La journée se déroule sans autre incident.

 Par contre, la nuit, dans mon sommeil je fais un rêve. Je suis dans le jardin, j’aperçois Brack qui vient vers moi.

~ Merwin, reste calme, ne te réveille pas.

~ C’est toi Brack qui me parles ?

~ Oui, du calme je sens que tu t’affoles.

 Surpris par ce contact, je n’arrive pas à rester dans mon rêve. Je râle de dépit, il est trois heures dix, je me lève et me dirige vers la terrasse. Brack est devant la porte-fenêtre. Je fais coulisser la porte, Brack entre et vient se frotter à ma jambe.

~ C’est toi qui es venu dans mon rêve ?

- Wouaf

~ Désolé je n’ai pas pu me retenir pour rester dans ce rêve !

~ Oui, c’est bien dommage.

~ Hé oui !

 Je réalise brutalement que je viens de converser avec Brack. Lequel s’est assis et me regarde.

~ Brack c’est toi qui m’as dit : « Oui, c’est bien dommage » ?

- Wouaf !

~ Nous avons réussi !

 Je lui prends la tête entre les deux mains et lui fais la bise sur la truffe.

 Enfin j’y suis parvenu ! Je maitrise la télépathie, me reste à voir si cela marche avec mon entourage, en dehors de Brack ? Avec mon compère nous rentrons, je me dirige vers la cuisine, n’ayant pas envie de me recoucher, je décide de me faire un café.

~ Brack désires-tu quelque chose ?

~ Je veux bien un bol de lait et des croquettes

~ Tu bois du lait ?

~ Bah oui, on ne me demande jamais mon avis.

~ Ok, maintenant tu pourras me le demander et corriger cet oubli.

 Brack ayant bu et mangé ses croquettes, je prends possession de mon fauteuil dans le salon, Brack s’allonge devant mes pieds.

 Enfin je maitrise la télépathie. Maintenant, il faut que je teste sur des personnes, car si ça marche avec Brack, possible que ça ne fonctionne pas sur les gens ? Reste à voir, également, la lévitation puisque, apparemment, j’ai aussi ce don.

 Perdu dans mes pensées, je m’endors.

- Monsieur ça va ?

 Je sursaute et me réveille, c’est Mathilde qui vient d’arriver.

- Oui, ne vous inquiétez pas, je n’arrivais pas à m’endormir. Je me suis mis dans mon fauteuil et sans m’en rendre compte je m’y suis endormi.

~ Décidément, depuis qu’il a rencontré cette fille, il est bizarre.

 Je m’aperçois que je lis les pensées de Mathilde, ça devient gênant, je décide de bloquer ce mode avec elle.

 Nous sommes dimanche, j’attends, avec une légère impatience, Vivianne. J’entends Brack qui aboie, ça doit être elle et Dominique qui arrivent ? Je sors, effectivement, ce sont bien elles. Avec Brack, je les accueille. On se fait la bise.

- Bonjour les filles, vous avez trouvé facilement ?

- Oui, sans problèmes grâce à la technique GPS. Dis donc tu habites une constellation.

- Pour un rêveur, comme moi, je ne pouvais pas tomber mieux.

- Il est beau ton chien, il a l’air doux. Il s’appelle comment ?

- Brack, ne te fis pas aux apparences, il a déjà mordu un voleur potentiel.

- Au moins c’est un bon gardien !

- Brack, je suis sûr que tu es un bon toutou. Dit-elle en le caressant.

~ « Un bon toutou ! », je vais lui pincer les fesses elle va voir.

~ Brack, s’il te plaît, pas de bêtise.

~ T’inquiète, je plaisante.

 Nous faisons le tour de la propriété.

- Il est magnifique ton jardin.

- C’est grâce à Pascal, le jardinier, qui vient deux fois par semaine.

- Tu as de la chance, ton paternel est moins radin que le mien, tu as vraiment une belle maison.

 Après avoir visité l’intérieur, nous nous installons sur la terrasse pour l’apéro. Discrètement, j’essaye de sonder Viviane sans succès, il y a comme un barrage qui bloque ses pensées. Je me tourne vers Dominique qui a les yeux fixés sur elle, j’y trouve des pensées salaces et des images on ne peut plus explicites sur des rapports sexuels, j’en rougis. Je me détourne de ses pensées. Comme quoi, ce n’est pas toujours souhaitable de folâtrer dans les pensées intimes des gens. Vivianne dont le regard est fixé sur moi, fronce les sourcils.

- Que t’arrive-t-il ? Pourquoi rougis-tu ? c’est Dominique qui te fait cet effet ? Je te vois la regarder depuis cinq minutes.

- Non, non…, j’étais dans mes pensées. Excuse-moi j’étais en train de rêvasser.

- Pour rougir ainsi, j’ai l’impression que tes songes étaient plutôt libidineux. Me dit-elle en rigolant.

Dominique, qui semble atterrir, nous regarde intriguée.

- J’ai raté un épisode ?

- Mon fiancé, apparemment, n’a d’yeux que pour toi, et comme il rougissait, je n’ose pas imaginer quelles pensées il avait à ton encontre ?

 Les filles éclatent de rire tandis que je repasse au rouge.

- Ce n’est pas juste, vous exagérez, à deux contre un ce n’est pas loyal.

- D’accord…, il faut que l’on te trouve quelqu’un, on connaît plein de mecs mignons et sympas.

- S’il vous plait, ne jouez pas les entremetteuses, laissez-moi vivre ma vie !

- Ok, ok ne te fâche pas.

- Je ne me fâche pas… Il faut, Viviane, que l’on ait une conversation sérieuse.

- Pas de problème mon chéri. Tu veux que l’on parle de quoi ?

- De nos fiançailles, mon père n’arrête pas de me relancer sur le sujet.

- Mon père me bassine aussi, en plus il veut que ça se passe chez nous.

- Le mien, comme tu peux l’imaginer, veux que ça se fasse chez lui.

- Pourquoi ne pas le faire chez toi, comme ça ils seront en terrain neutre, et tu coupes cours aux jalousies de territoire.

- Tu as raison Domi, reste à choisir une date et à acheter une bague. Ça je peux m’en charger.

- Pas question, c’est à moi de l’acheter ! D’ailleurs, peux-tu me prêter une bague qui te va bien ? c’est pour le diamètre de ton doigt.

- Pas de problème, je te confie celle-ci. (Bague qu’elle retire de son annulaire). Mais inutile de faire des folies.

- Ça, c’est à moi de voir. Je ne veux pas, non plus, passer pour un radin aux yeux de mes parents.

 Mathilde fait son apparition.

- Vous pouvez passer à table, le repas est prêt.

- Merci Mathilde.

 Nous nous levons et nous dirigeons vers la salle à manger. Le repas se passe dans une ambiance détendue, Dominique nous raconte des anecdotes sur les animaux qu’elle a eu à soigner.

 Le repas terminé, je libère Mathilde. Nous en profitons pour aller flâner dans le jardin. Pendant que Dominique joue avec Brack, Viviane et moi nous peaufinons le déroulement, à venir, de nos fiançailles.

- Tu sais que tu as un chien très intelligent, on dirait qu’il comprend tout ce qu’on lui dit et fait tout ce qu’on lui demande.

- Je sais…, c’est pour ça que je l’ai choisi.

- Il est presque seize heures, nous allons te laisser.

- Vous reprenez un café avant de partir ?

- D’accord.

- Installez-vous sur la terrasse, je vais le préparer.

 Tout en préparant le café je repense à mon expérience télépathique avec Dominique et Viviane. Apparemment, ça ne fonctionne pas avec tout le monde. Je pense qu’Edouard pourra m’expliquer pourquoi. Demain, ayant une réunion de service avec le paternel, je programme une petite visite à Brocéliande pour Mardi.

 Je rejoins les filles avec mon plateau. Brack assis à côté de Dominique se laisse caresser. Apparemment il l’a adoptée.

~ Alors mon vieux tu n’as plus envie de lui pincer les fesses ?

~ Non…, je la trouve sympa, elle a l’air d’aimer les animaux.

~ Pour une vétérinaire je pense que c’est normal.

 Une fois le café pris, nous nous dirigeons vers la voiture de Viviane. Après une bise et une caresse pour Brack, elles reprennent la route.

~ Que penses-tu de cette rencontre ?

~ J’ai bien aimé, elles sont toutes les deux sympas.

~ N’as-tu rien trouvé de bizarre ?

~ Si…, ta future femelle, je n’ai pas pu lire dans ses pensées.

~ Brack, s’il te plait, elle s’appelle Viviane. Mais tu as raison, si j’ai pu lire dans les pensées de Dominique, je n’ai rien pu voir pour Viviane.

~ Tu sais ce n’est pas un cas isolé, tu t’apercevras que nombre de personnes sont fermées à ce genre d’intrusion, même chez les animaux. Ne me demande pas pourquoi ? Je n’en ai aucune idée.

 Tout en discutant, nous arrivons au fond du jardin vers le noisetier. Si j’en profitais pour me ressourcer. Depuis qu’il est guéri, il me communique beaucoup d’énergie, même plus que mon ami le bouleau. Est-ce sa façon de me remercier ?

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