..."Il est beau mon pénis hein?"
Je suis allongée. Nue. A côté du garçon que je fréquente depuis quelques semaines. Je le reconnaitrais plus tard mais ce jeune homme n’a jamais été un premier choix. Il n’est pas méchant et a de la conversation mais physiquement, il ne me plait pas plus que cela, si ce n’est pas du tout. Et sa manière de se gargariser après avoir fait cuire des pâtes et un steak haché et de me dire qu’« il m’avait concocté » un repas, comme s’il avait passé des heures en cuisine, m’exaspère au plus haut point. Mais j’ai voulu passer au-dessus de ces détails.
— Tu le trouves comment ? Il est beau mon pénis hein ?
Il y a de nombreuses questions pièges qui sont redoutées dans une relation amoureuse. La plus célèbre reste sans doute « Tu ne trouves pas que j’ai grossi ? ». C’est ce genre de questions auxquelles il n’y a qu’une seule réponse possible : celle à laquelle tu ne penses pas en premier. Il faut alors avoir la gymnastique d’esprit de se dire « qu’est-ce que l’autre veut entendre ? » et non pas « est-ce que mon avis compte vraiment ? ».
Est-ce qu’il avait envie que je le flatte après le coït ? Est-ce qu’il voulait être rassuré de ses performances ? Est-ce qu’il pensait déjà connaître la réponse et voulait l’entendre à haute voix ? Les trois à la fois sans doute.
J’ai donc répondu « oui », pas très convaincue. La pénombre nous enveloppe et cela m’arrange car il ne voit pas l’expression de mon visage. Je ne sais pas mentir.
Depuis j’ai pris la mesure de l’importance de l’attirance physique et des talents culinaires dans mes critères de sélection.
Lorsque quelques mois plus tard, je raconte cette histoire à la jeune femme qui deviendra ma meilleure amie, elle éclate de rire et me dit :
— C’est quand même dingue d’être fier d’un ver de terre avec une tête de champignon.
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