Un terrible pirate

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Tout allait pour le mieux, les conditions de navigation étaient excellentes ; l'océan étant doux et calme, le bateau avait pris le bon cap. Tout allait pour le mieux.

J'aimais beaucoup admirer l'horizon. Cette immensité bleue n'aspirait que le calme et la plénitude me fascinait depuis mon plus jeune âge. On pouvait se perdre dans la contemplation de la mer, surtout lorsque l'on était aussi éloigné des côtes.

Depuis ma plus tendre enfance, j'aimais me promener sur les ports pour observer les marins au moment de leur embarcation, puis de les regarder s'éloigner petit à petit sur cette grande toile bleue. Je me souviens que lorsqu'ils disparaissaient de ma vue, je me jurais tout bas, qu'un jour moi aussi je voguerai sur les flots.

Des années plus tard, me voici capitaine d'un navire marchand sous la protection de Sa Majesté Jacques VI, roi d'Ecosse. Je n'ai jamais abandonné mon rêve marin. Depuis la première fois que j'ai foulé les planches d'un navire en tant que simple matelot, je vis mon rêve. Tout ce que je souhaitais c'était qu'il se poursuive indéfiniment.

Je laissai mes pensées voguer en compagnie de cette sérénité, quand soudain, j'entendis le matelot dans la vigie :

"Bateau à tribord !"

Il n'était pas rare de rencontrer d'autres navires sur l'immensité de l'océan. Cependant, si nos calculs de la trajectoire étaient exact, nous n'aurions dû rencontrer aucun dans ces eaux. En croiser un par ici était donc de mauvais augure.

Je pris la longue vue afin de pouvoir identifier son pavillon. Diantre ! C'était le pavillon noir ! Un bateau de pirates. Il ne manquerait plus qu'il navigue en notre direction.

Je regardai une seconde fois pour déterminer leur cap. Il est... à l'opposé du nôtre ! Le navire pirate s'approche de plus en plus de notre batiment.

Lorsque je compris que les pirates n'avaient aucunement l'intention de détourner leur cap, ni de faire demi-tour, je donnais l'ordre de charer les canons. Au même instant, j'aperçus que le capitaine des pirates n'était qu'autre que le capitaire Nameway, surnommé également Teeth. Ce qu'il pouvait détester ce surnom !

La première fois que j'entendis parler de Nameway, capitaine du Black Horizon, je n'étais encore qu'un adolescent. J'avais déjà fait mes premières armes dans la marine royale en tant que commis de cuisine. Un travail qui ne m'intéressait pas vraiment mais qui avait l'avantage de me permettre d'être sur l'océan et non plus à la terre ferme que je détestais de plus en plus.

Le capitaine Teeth était bien connu dans la marine. Pour certains matelots, il était une légende, une source des récits les plus improbables. Les uns contaient qu'il aurait été élevé parmi les sirènes, ce qui le rendrait insensible à leur funeste chant. Les autres imaginaient des combats parmi les monstres marins les plus énormes les uns des autres pour décrire le capitaine des pirates comme un fier combattant dont nul ne pouvait résister. Je n'avais jamais croisé le chemin de cet homme. Jusqu'à aujourd'hui. Je le reconnus à la description que les récits en faisaient.

Même si les récits des péripéties de Nameway étaient aussi farfelus les uns que les autres, la description du capitaine restait invariablement la même. C'était un homme grand, brun, bien qu'avec les années il commençait à grisonner, aux cheveux longs et toujours attachés en catogan avec un ruban de couleur noir, comme l'étendard des pirates. Son physique impressionnait tout le monde, ce qui fait qu'il n'avait aucun mal à recruter de nouveaux pirates pour voguer à ses côtés. Sa musculature était bien développée sans pour autant sembler excessive. Son visage ressemblait à celui d'un poupon, malgré les années passant, le temps ne semblait n'avoir aucune emprise sur lui. Seule sa dentition laissait à désirer. Evidemment, chez les pirates, il n'était pas rare d'avoir des dents en moins, pourries, cassées... Cependant Teeth a toujours eu cette dentition, d'après les nombreux récits. Selon la légende, il serait presque né avec ces dents disgrâcieuses, répugnantes ou tout simplement absentes.

Avec toutes ces informations sur le pirate, j'en étais sûr : c'était bien cet homme-là que j'allais rencontrer.

Je me demandais comment allait finir cette rencontre avec le capitaine pirate.

De son navire, je vis le capitaine Antheme Nameway tirer son sabre au clair et le pointa vers le ciel avant de l'abattre violemment vers le sol en criant : « A l'abordage ! » Les grappins s'accrochèrent aux bastingages du galion écossais. Teeth, le corsaire invincible, était au milieu de ses hommes en train de se battre affrontant et désarmant un à un les membres de mon équipage. Les balles de plomb et l'acier des sabres virevoltaient autour de lui mais il ne s'en préoccupait pas. Son unique objectif était de me mettre à genou, moi le capitaine ennemi, pour soumettre l'équipage et piller le navire qu'ils avaient abordé.

Après de longues minutes de combat contre les matelots du navire, Teeth me repéra enfin. Il sourit en me reconnaissant. Il semblait me connaître, Mark Keller, capitaine dans la marine royale dont plusieurs des proches parents faisaient partie de l'entourage du roi Jacques VI. Peut-être pensait-il qu'avec un peu de chance et de persuasion, Teeth pourrait me soutirer quelques informations intéressantes. Esquivant les lames qui se dressaient sur son chemin, le pirate me rejoignit à l'avant du galion.

"Hey capitaine Keller ! Je suis ravi de vous rencontrer enfin, s'amusa Antheme Teeth esquissant une révérence moqueuse.
- Capitaine Nameway, j'aurais dû m'en douter. Qui d'autres que vous oserait attaquer le Thistle ?
- Je ne pouvais rater une si belle occasion de vous dire bonjour, sourit le fougeux capitaine. Mais je dois avouer que votre accueil laisse à désirer, ce n'était pas gentil de votre part de tirer avec vos canons sur mon Black Horizon.
- Je dois avouer que j'aurais préféré couler votre Horizon, cela aurait été du plus bel effet pour vous accueillir parmi mes futurs prisonniers."

Teeth éclata d'un mauvais rire avant d'enchaîner :
"Et bien voyons lequel de nous deux sera le prisonnier de l'autre.
- Avec plaisir, conclus-je en pointant mon sabre sur le pirate.

Le combat qui suivit dura plusieurs minutes selon les matelots qui y assistèrent. Aucun de nous deux ne semblions vouloir lâcher du terrain. Les deux équipages nous observaient, leurs capitaines respectifs, avec admiration, certains échangeaient même des paris sur l'issue du combat. Nameway commençait à en avoir assez de ce combat qui s'éternisait, il recula et fit semblant de tomber en se prenant les pieds dans une corde posée sur le pont. Malheureusement, je réagis comme le vieux corsaire s'y attendait en pointant mon sabre sur sa gorge.

"Et bien, il semblerait que j'ai gagné, dis-je.
- Vraiment ? Vous avez gagné ? "

Teeth donna un grand coup dans mon genou droit, puis je tombai au sol. Le corsaire m'attrapa le poignet qui tenait le sabre et se saisit du couteau que je portais à la taille pour me le mettre sous la gorge.

"Et maintenant si j'étais vous, je lâcherais ce sabre et je me soumettrais."

Je poussai un grognement de rage mais obéis tout de même à mon adversaire qui poussa du pied le sabre alors que des hourras s’élevaient parmi son équipage. Une fois le sabre hors de ma portée, Antheme Nameway m'attrapa par le col de ma veste et m'obligea à me relever. En un intant, je sortis la seconde dague que j'avais gardée dissimulée dans mon dos et je visai mon geôlier. Mal m'en prit. Le capitaine Nameway évita mon coup dans un mouvement de recul, sans me lâcher.

Une seconde plus tard, je sentis une brûlure au niveau de mon abdomen. Un liquide chaud se répandit et colla mes vêtements à ma peau. Un coup au visage suivi d'un craquement au nez me fit hurler de douleur. Je perdis l'équilibre, la brûlure laissa la place à un froid intérieur. A mesure que mon sang quittait mon corps, ma vie se défilait. Bientôt, je ne sentis plus rien, ni douleur, ni froid. Puis, ce fut le néant.

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