Chapitre XVIII - Le palais de Naoki

9 minutes de lecture

Une tempête de neige se déclara dans la nuit qui suivi. Teirloa' ren, balloté par les vagues formées par le vent qui soufflait sur la baie laissait son nez plonger dans la soupe formée par celles ci.

Nos trois compagnons s'étaient terrés au fond de la cabine du bateau. Malheureusement pour Hotsuki, c'était à lui de maintenir le cap vers le palais impérial. Le froid lui congelait la moindre parcelle de peau, et les flocons de neige qui s'écrasent dans ses yeux le fond à force souffir.

En plissant les yeux, il essaye de maintenir son cap, le regard rivé sur le compas magnétique vissé à côté de la porte de la cabine. Une vague s'écrase sur le pont, vient détremper la carcasse du dragon et manque de le faire passer par dessus bord. Hotsuki remercie les Douze d'avoir pensé à nouer une écoute autour de sa taille. Sans elle, il aurait été nourrir les poissons de la baie.

Avec le plus grand mal du monde, le jeune homme maitient son cap, la barre franche tressautant entre ses mains. Entre deux accalmies de nuages, les yeux perçants du démon croient appercevoir une forme sombre au loin devant lui, obstruant dans la pénombre du mauvais temps l'horizon. Il croit d'abord avoir rêvé, puis plisse encore un peu les yeux.

" Elles sont là ..."

Les falaises escarpées de la presqu'île de Naoki.

" Enfin. "

Hotsuki se retient de sauter de joie en voyant enfin les édifices rocheux pointer leur sihouette monstrueuse à l'horizon. Il bloque sa barre pour ensuite se ruer dans la cabine du bateau. Dans la précipitation, il manque de s'étaler contre la porte avant de pouvoir l'ouvrir, puis se précipite comme une furie à l'intérieur.

Ses deux compagnons le regardent avec des yeux ronds. Ils s'étaient assis l'un en face de l'autré séparés par la table à battants traversée en son centre par le mât du navire. Ils tiennent tous deux une tasse fumante en main, lovés dans des couvertures à l´humidité palpalble.

- Les gars ! Les falaises sont à portée de vue !

Sur ces mots, Yuki et Shirô se lèvent, et entreprennent de se couvrir pour faire face à leur destin - et à la tempête, accessoirement- .

A travers les nuages et les flocons ballotés par le vent, Yuki apperçoit enfin devant elle les impressionnants pics rocheux de la falaise. Inquiétants de par leur hauteur vertigineuse, leurs reliefs tranchants, ils exhibent leur couleur noire cauchemardesque et obstruent la vue vers l'horizon.

D'ici une heure, ils seront prêts à accoster quelque part entre ces mortels pics, et laisseront là le bateau qui les portait dans son ventre jusqu'à maintenant. Normalement, ils devraient pouvoir se mouiller dans une grotte semi immergée située sur le flanc sud est des espars rocheux. Là, selon la carte tracée sur le vélin, débouche la sortie principale des égoûts du palais impérial. Ces galeries normalement assez profondes leur permettront d'accéder aux sous sols des quartiers de la cour, ainsi qu'à la salle des réserves de la trésorerie, le lieu présumé de repos de la prophétie.

Les bruit de la tempête empêchait toute possibilité de communication claire avec quiconque. L'angoisse monte petit a petit dans l'estomac de Hotsuki, chargé d'approcher Teirloa'renn au plus près des bouches d'égoûts, et surtout, de mener à bon port ses camarades sans échouer le bateau sur les mortels pics et hauts fonds des récifs.

Sur ses instructions, Shirô alla réduire la surface de la grand voile, tirant de toutes ses forces sur l'étoffe aux tons ocre de celle ci. Il la noua du mieux qu'il pu à la baume du grand mât. Yuki n'en fut pas en reste et alla abattre le génois situé à l'avant du gréement. Le voilier jusque là malmené par la météo sembla s'apaiser. L'allure vive avec laquelle il fendait la mer s'était arrêtée net, et il allait maintenant entre les récifs et les aiguilles de roches mangées par la mer, guidé par le courant et son capitaine, non sans mal.

On apperçut quelques minutes plus tard le fameux trou dans la roche, ainsi qu'une angoissante entrée de caverne à moitié immergée dans les flots bouillonnants. Hotsuki dirigeant toujours son équipe, il alla ammarrer l'esquif bien solidement à l'aide de trois ancres sur les hauts fonds, prenant garde à ce qu'elles soient bien solidement accorchées sur ceux ci.

Trempés des pieds à la tête, crachant, toussant et fumants, ils s'en étaient tous sortis finalement vivants. Hotsuki déserra discrètement les fesses, soulagé de ne pas avoir péri noyé. Il s'en fallu de peu pour qu'il bénisse la tempète d'avoir dissimulé leur arrivée aux yeux des sentinelles de l'empire ainsi que de leurs radars.

Sans mot dire, nos trois compagnons mirent à l'eau la petite chaloupe. Celle ci les porta non sans peines vers la gueule béante et escarpée de la fameuse grotte noire.

La nuit recouvrit de son épais voile Hotsuki, Shirô et Yuki.

Le silence sonna comme une sainte et étrangement angoissante musique à leurs oreilles. On n'entendait dans la grotte rien à part le bruit étouffé de la tempète qui se déchaînnait au dehors. Yuki n'osa pas allumer la moindre flamme, appeurée par les conséquences que pourraient provoquer le moindre de ses gestes.

Personne ne vit pas passer l'heure de dérive à ramer vers la bouche d'égouts. Quand ils virent enfin la trachée gargantuesque de la grotte aux eaux noires, un frisson parcouru leur échine de part en part. Les effluves pestinentielles firent monter la nausée dans l'estomac de Yuki, et Hotsuki failli en tomber dans les pommes. Shirô lui, avait l'habitude de l'odeur de pourriture et de viande moisie. Cela ne le gêna point.

Près de l'entrée vers le hellheim se trouvait un minuscule récif de sable, assez grand pour y laisser la chaloupe en lieu sûr. Ils la laissèrent donc ici mème, et ne laissairent à l'intérieur que leurs rames.

Shirô s'approcha sans bruit de la bouche d'égouts, d'environs trois mètres de diamètre. L'épaisse parroi de béton avait été colonisée par les algues et les puces de mer, un ammoncellement de déchets nauséabonds s'entaissait sur quelques mètres devant elle.

Yuki grimaça en posant son pied dans la fange. L´eau boueuse venait de s'infiltrer dans ses rangers, et provoqua dans son dos un frisson de dégoût d'une rare intensité.

" Sans déconner ... Qu'est ce que je fous là ... " Se demandait-elle en sentant des bulles d'air remonter entre ses doigts de pied.

Les trois mercennaires s'arrêtèrent tous quelques instant devant la gorge putride, prenant un moment de décompression avant de se jeter dans la gueule de l'Empire.

La pyromancienne souffla bien profondément, et fit abstraction de sa peur et de son stress. Elle adressa une rare prière à Drann, lui demandant gracieusement de ne pas la laisser crever, pour ainsi dire dans la merde.

- Yuki ... Je pense que tu l'as déjà compris, mais par souci de sécurité, n'allumes pas de feu. Restes bien entre moi et Shirô. Commence Hotsuki. Il sortit de sa besace la carte et la déplia. Fais nous confiance, à nous et à notre vue.

Il finissait ses explications en défroissant le vélin, et murmurait quelques mots en Kahnkla, révélant les dédales des égoûts sur la peau usée du document. Hotsuki et Shirô étaient totalement nyctalopes, et percevaient de ce fait , parfaitement leur environnement de nuit comme en plein jour.

- En avant.

Ils s'engouffrèrent dans les entrailles de l'Empire.

***

Le conduit, contrairement à leurs attentes, ne semblait ni rétrécir, ni remonter vers la surface. Il semblait aussi ne pas avoir de fin.

De temps en temps, un vol de chauves souris fesait sursautter Yuki, lui fesant au passage tourner la tête. Hotsuki devant elle, Shirô dans son dos, elle avait pourtant cette angoisse permatente de ne pas être en sécurité sans le contact visuel de ses compagnons. Des perles de sueur froide coulent le long de son échine. Indéniablement, les féromones de son stress parviennent aux narines des deux hommes. Hotsuki lui, ralentit le pas, et commença à engager la conversation avec la pyromancienne, pour la rassurer. Cette simple présence allégea son coeur et son esprit.

Un léger sourire se dessine sur le visage de la jeune femme. Elle avait saisi le but de cette conversation si banale dans un lieu et un contexte tellement décalé.

Doucement, une main se posa sur l'épaule de la pyromancienne. Une main froide aussi large qu'une assiette. Elle frissonna à ce contact. Non pas un frissonnement de peur comme ces derniers jours, mais quelque chose de bien plus calme, en quelque sorte "chaleureux", rassurant.

Son coeur rata un battement, elle s'arrêta sous l'effet de surprise. Shirô le sentit immédiatement. Il s'approcha de la jeune femme, et posa son visage à quelques centimètres de son épaule. Il chuchota.

- Tu ne crains rien avec moi ...

Il resserra sa large main sur son épaule, puis la douce chaleur qui avait réchauffé à cet instant le dos de Yuki s'estompa. Shirô avait reculé d'un pas, avant de retirer sa main.

La scène n'avait duré qu'une fraction de secondes, et Hotsuki, trop occupé à sonder la carte devant, ne l'avait même pas relevée.

Leur long périple sembla durer des jours. Mais finalement, ils ne passèrent qu'à peine une heure, à la montre de Hotsuki, à déambuler dans les conduits putrides des sous sols. Bientôt, ils arrivèrent sous une trappe, que Yuki n'aurait pas remarqué si ses compagnons ne lui avait pas dit.

Cette trappe était affublée d'une échelle en acier dépliable, suspendue par de fortes mâchoires au plafond. Elle menait en fait à l'une des caves du palais impérial, située dans le sous sols. A en croire la carte, il ne restait qu'une poignée de mètres à parcourir avant d'arriver à la fameuse salle des trésors.

Yuki s'en frotte les mains d'avance. Imaginez ! Tout cet or, tous ces bijoux... tant d'argent à se faire sans même se fouler. Un sourire niais se dessine sur son visage, et s'étend jusqu'aux oreilles de la jeune femme.

Shirô s'approcha doucement de l´échelle qui menait au dehors, et tenta de la faire descendre en douceur. Cela ne fonctionna pas. Il eut beau tirer l'échelle en essayant de ne pas alerter tout le pays, rien n'y fit. Les barres de métal ne bougèrent pas d'un iota.

La furie employa les grands moyens. Usant du Galdr, et maudissant déjà Himminin pour les reproches qu'il lui ferait prochainement, il asséna une décharge magique aux mâchoires réticentes de l'échelle. Cela fonctionna enfin. Dans un léger crépitement d'énergie, les barres d'acier se mirent à descendre dans un petit tintement rouillé.

Hotsuki continuait d'ouvrir la marche, et remercia son compagnon pour l'efficacité de ses solutions. Il grimpa à l'échelle, et fit signe à ceux en bas de se cacher dans la pénombre qu´offrait les lieux. On ne sait jamais. Même en pleine nuit dans les quartiers impériaux, aucune erreur n'est tolérable.

Il souleva lentement et sans un bruit la plaque de bois qui leur obstruait l'ouverture. Quelques secondes tendues passèrent, rien.

Le démon bleu scruta quelques instants autour de lui les environs, constatant qu'ils avaient bien atterri dans une cave remplie de vins et de barriques poussiéreuses, sans aucune autre trace de vie que les araignées autour d'eux.

Le dragon leur fit signe d'avancer dans la plus grande des discrétions, et tous sortirent enfin des égouts. Il referma la trappe derrière eux, sans vraiment la coincer.

Doucement' ils traversèrent la grande cave froide et humide, jusqu'à parvenir à ses portes de chêne. Là, même topo. On fit silence, osant à peine respirer. Personne, vraisemblablement, derrière la porte. Pas même une lumière. Hotsuki l'ouvrit avec la plus grande des délicatesses, Shirô était prêt à dégainer son sabre, au cas où.

Un long couloir noir de granit s'étendait devant eux. Quelques torches accrochées aux murs éclairaient faiblement un long couloir poussiéreux et remplis de toiles d’araignées. Hotsuki regarda une nouvelle fois la carte, et les conduisit en quelques secondes vers une immense porte de trois mètres de haut. Verrouillée, évidemment.

- Merde ... Murmure Hotsuki.

" Adieu, précieux butin... " Se dit Yuki, une pointe de déception dans le coeur.

Premier problème de la soirée, un exploit. Ils allèrent se cacher dans une alcôve non loin de là, à l'abris des regards et des ombres dansantes des torches. Hotsuki murmura quelques mots tracés sur le vélin, avant qu'il ne révèle la forme exacte de la clé nécessaire à son ouverture.


Bloqués, ils attendirent là quelques minutes, réfléchissant à courir le risque de faire sauter les portes ou d'attaquer un garde pour les obtenir.

Le tintement d'un sabre impérial et le martellement d'une paire de bottes les aiguilla finalement bien assez tôt.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 6 versions.

Vous aimez lire ryumon ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0