Une mission en enfer (You Only Die Hard Twice Forever : Origins) (OneShot complet)

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Disclaimer : je ne suis pas du genre à me plaindre, et cette histoire, bien que véridique, appartient au passé, et n'a pas d'autre vocation que de vous faire rire et/ou compatir.

***

Contexte

Je travaillais à l'époque dans ce qu'on appelle une société de service informatique. Pour ce qui n'en connaitraient pas le concept, nous, employés de ces sociétés, sommes détachés pour effectuer des missions chez des clients, ou parfois juste réaliser des projets pour eux. Voyez ça comme une espère d'intérim de luxe, pour caricaturer. Mais pas tant.

Pourquoi ce type de métier existe-t-il ? Ah, très vaste question. Je fais même des présentations là dessus. Pour faire simple, disons que c'est :

  • Un artifice organisationnel pour contourner la rigidité des contrats français, offrant de la flexibilité aux entreprises clientes, leur évitant d'embaucher du personnel et d'avoir à gérer des processus sociaux complexes par la suite
  • Un filet de sécurité pour les consultants leur permettant d'éviter d'enchainer des CDD ou de se voir imposer de se mettre à leur compte
  • La possibilité pour les dirigeants des entreprises clientes de bousculer le statu-quo de leurs services en leur imposant du sang neuf

Philosophiquement, il y aurait beaucoup à en dire, mais ce n'est pas l'objet de ce texte.

Je sortais alors d'une mission de presque un an, avec beaucoup de déplacements, et avais communiqué mon souhait de travailler plus proche de mon domicile.

***

L'annonce

Mon manager me propose une nouvelle mission dont le contenu technique est parfaitement calibré avec mes aspirations. Qui plus est, ce serait pour travailler avec quelqu'un avec qui je m'entends bien, donc le teaser est plutôt encourageant. Encore jeune, l'opportunité est une chance et je demande à en savoir plus.

Le tableau commence à s'assombrir un peu. La mission est à environ 100km de mon domicile. ça commence bien !

  • "Mais c'est accessible en train"

Ah, ben oui, tout va bien du coup. 1h de TGV, à la limite ça se fait, d'autant que je n'habite pas très loin de la gare.

  • "Et tu auras une voiture d'entreprise pendant le temps de la mission"

C'est à dire ? C'est plus accessible en train ? L'entreprise à bougé dans les dix dernières minutes ?

  • "Sur place, c'est à 20 minutes de la gare"

Ah oui quand même. Donc on me propose une mission à 1h30 porte à porte alors que je souhaite me rapprocher de mon domicile. Mmoké. Le contenu a l'air quand même sympa, et je suis encore docile à cette époque. Donc je demande à en savoir plus.

  • "Bon, rien de grave, mais tu verras, le contexte social est un peu compliqué là bas. On te laisse te faire ta propre idée"

Donc, je résume :

* C'est loin

* C'est un contexte compliqué

* C'est avec des collègues sympa

* Le contenu de la mission a l'air chouette

C'est 50/50. Après une longue réflexion, je décide de tenter l'aventure.

***

L'arrivée

Premier jour sur place. Nous arrivons avec mon collègue dans la clio de société. La grille de l'entreprise est barrée de banderoles.

"Nous ne sommes pas des vaches à lait"

"Entreprise en grève"

"Non au rachat"

Ambiance.

On finit par nous laisser entrer. Nous sommes accueillis par un manager qui annonce la couleur d'entrée de jeu.

  • La direction nous impose de prendre des consultants. Ils ne veulent plus embaucher, car l'effectif est verrouillé jusqu'à la finalisation du rachat. Vous savez, moi je n'ai rien contre vous, je suis à la retraite l'année prochaine. Mais les autres risquent de ne pas vous faciliter la tâche. Il pensent que vous venez leur piquer leur boulot.

Ok, on est bien partis. Il nous dirige vers un membre de son équipe qui est supposé nous installer et nous lancer.

***

L'installation

Nous découvrons donc le reste de l'équipe avec laquelle nous allons travailler : un interne et un autre prestataire externe.

L'interne nous dirige vers notre emplacement de travail. Encore naïf à ce moment, je m'attends à un bureau sympathique et respectant la dignité humaine. Que nenni.

Notre poste de travail sera donc une table, dans un couloir, face à un mur de serveurs dont l'alimentation nous souffle de l'air chaud dessus.

Ma vue ressemblera pendant les trois prochaines semaines plus ou moins à ça :

https://images.unsplash.com/photo-1484557052118-f32bd25b45b5

Je vous passe le bruit incessant qui finit par me donner des migraines, et le plaisir de recevoir cet air aux relents de circuits chaud contre les joues du matin au soir en plein mois de Juin.

Après plusieurs demandes (sans suite) de nous déplacer, en passant par notre responsable local, puis la hiérarchie de notre entreprise, j'en viens à recourir aux moyens ultimes. (Par souci de précision, pour les éventuels informaticiens qui pourraient lire ce texte, il s'agit de serveurs de tests et de recette, je reste un professionnel). J'interpose un carton qui dévie vers le haut l'air chaud à l'arrière de la pile de serveurs, ce qui atténue le bruit et rend mon poste de travail un peu plus vivable. Trois jours plus tard, l'alimentation d'un des serveurs surchauffe et claque.

À ce moment là, on daigne enfin nous déplacer. J'ai supposé, bien que je ne le saurai jamais, qu'il ont peut être admisce jour là avoir dépassé les bornes. Notez qu'ils auraient également pu nous accuser de sabotage et nous renvoyer chez nous sans autre forme de procès. Le consultant n'est pas vraiment un être humain après tout.

***

SuperConnard

Revenons quelques semaines plus tôt, quand nous rencontrons l'égérie de l'escroquerie, le mentor des charlatans, le seigneurs des écornifleurs.

Pour ce qui nous concerne, en bons soldats, nous n'avions d'autre objectif que de rendre le service attendu, pour que l'entreprise cliente soit satisfaite, et que nous puissions partir la tête haute. Car nous n'avions nullement l'intention de passer plus de temps que nécessaire dans cette antre du démon qui rejette notre présence. Du professionnalisme en somme.

Comme évoqué plus haut, nous réalisons la mission avec un interne et un autre prestataire indépendant, que nous appellerons SuperConnard par souci d'anonymat et d'honnêteté intellectuelle. Ledit SuperConnard intervient depuis près de quatre ans dans l'entreprise, et fait partie des meubles, à tel point qu'il donne la sensation de dicter sa loi. Son bureau est installé dans celui de l'interne, avec le même niveau de confort et les mêmes avantages (climatisation, plante verte et bouilloire, quel luxe incroyable).

La personne se présente comme un véritable messie, sans qui l'entreprise aurait déjà coulé depuis des temps immémoriaux. A l'aise avec la population interne, il blague et politise à tout va, et se sent littéralement intouchable. Si l'entreprise est le roc, lui est la balane soudée au minéral. La tique accrochée au chien. L'étron incrusté dans la semelle. Il a pris soin de se rendre indispensable dans de multiples domaines, en se gardant bien de donner les manuels d'instructions de tous les petits engrenages vicieux qu'il a su stratégiquement placer dans la machinerie de l'entreprise. Par conséquent, il nous voit arriver d'un mauvais oeil, craignant que nous mettions à nu sa supercherie et en danger son vil gagne pain.

Fait remarquable : il réussit, en apprenant notre arrivée, à se positionner comme expert et référent auprès de l'interne dont il a aspiré une partie du travail tel un coucou roublard. L'interne y voit son intérêt : moins de travail, et un fusible sous la main en cas de pépin. Mais il s'en trouve également pieds et poings liés. Une symbiose contre nature du machiavélisme et de la paresse.

SuperConnard ne nous confiera finalement que des tâches subalternes, dont nous ne manquerons pas de souligner régulièrement l'inutilité et l'absence absolue de respect pour les règles de l'art du développement informatique, ce qui se soldera par deux événements symptomatiques :

Il en sera pratiquement venu aux mains en poussant à bout mon collègue qui est pourtant une véritable crême, doublé d'un expert plutôt reconnu dans son domaine.

Et pour ma part, je me souviendrai jusqu'à la fin de ma carrière de ce jour où il m'a pris à part, dans la cour, précautionneusement hors du champ des caméras et loin des oreilles du client :

  • Tu sais, si l'un de nous deux doit partir, ce sera pas moi.

Et il avait raison.

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En réponse au défi

Le bureau des plaintes

Lancé par LuizEsc

— Vous partez déjà, Marty ?
— Patron, il est 21h passé et ma femme…
— Mais je vois que vous n’avez pas terminé le dossier Duchevel.
— C’est que…
— Allez hop hop hop, il ne va pas atterrir sur mon bureau par magie. Retournez au travail !

*

Comme un air de déjà vu ? On a tous eu, un jour, cette envie furieuse de s’enquérir des promotions sur les lance-flammes. Un patron tyrannique ? Une collègue insupportable ? Un formateur incompétent ? Les astres qui s’alignent pour faire de cette journée de travail la pire de votre existence ?

Je vous propose, grâce à ce défi, de défouler ce paquet de frustration accumulé : racontez donc un évènement particulièrement pénible de votre vie de travailleur.se / étudiant.e, ou cette journée qui vous a donné envie d’appuyer sur le bouton de lancement de ogives nucléaires.

Le genre privilégié est « autobiographique », mais personne n’ira vérifier la véracité de vos dires si vous exagérez ou extrapolez un peu, beaucoup. Puisqu’il s’agit de laisser libre cours à sa rage, les insultes et grossièretés sont permises, mais veillez tout de même à ne pas tenir de propos offensants ou injurieux à l’encontre d’une personne ou d’une communauté. On grogne, mais avec classe, s’il vous plaît.

Commentaires & Discussions

Welcome to hell, we don't have cookiesChapitre6 messages | 2 ans

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