Perquisition

2 minutes de lecture

On était dimanche après-midi et je commençais sérieusement à me sentir mal à cause du lundi. Je mangeais devant la télé, à moitié anesthésié par BFMTV. On passait justement un reportage sur le nucléaire. Ça n’allait pas fort. La Russie avait encore assassiné un de ses agents dissidents avec du polonium 210. Poutine jurait bien évidemment ses grands dieux qu’il n’y était pour rien, mais personne n’était dupe. La victime était morte dans d’atroces souffrances. Un second reportage tirait à boulets rouges sur le RFPR. Il fallait avouer que le pauvre vieux avait été pensé comme une réponse technique à l’accident de Tchernobyl mais que, trente ans plus tard, il n’y en avait toujours aucun en fonctionnement dans le monde. Et ceux qui étaient en construction étaient frappés par des retards de plusieurs années et des dérapages financiers de plusieurs milliards de dollars. On avait beau nous expliquer que l’on venait d’en vendre deux en Angleterre et que ça allait tout changer, il était quand même temps d’en voir un démarrer. Et l’affaire de la cuve n’était pas terminée. L’Autorité de Sûreté avait récemment découvert qu’il y avait trop de carbone dans la cuve, que Greenpower le savait, et que les rapports qualité avaient été falsifiés. Et que notre PDG le savait et avait choisi de le cacher. Ça commençait à faire beaucoup. La suite du reportage me jeta en pleine figure qu’il y avait en ce moment même une perquisition au trente-huitième étage de notre immeuble à Médon-les-Brumettes. J’avais l’habitude d’en entendre des belles, mais celle-là était quand même pas mal. Les enquêteurs avaient manifestement déboulé avec l’artillerie lourde et s’attaquaient à deux sujets : la cuve et la mine.

La fameuse mine.

Vous savez, cette mine d’uranium sans uranium achetée dix fois son prix sans que personne n’ait jamais compris ? Il était manifeste que c’était un montage financier monté de toutes pièces pour extorquer aux Français des montants destinés à des pots de vin sud-africains pour des RFPR jamais signés et que le gouvernement n’avait pas voulu financer. Et apparemment tout le monde politique s’était servi, de Balkanus à Sarpoury. Je savais qu’il y avait une enquête en cours et que notre PDG était visé, mais là, on avait changé de catégorie. Traqué par Tracfin, nous étions manifestement promus en Ligue des Champions. Notre PDG avait été mis en examen et démis de ses fonctions ; son avocat s’appelait Thune ou quelque chose comme ça. Je me disais que pour une affaire de sous, c’était un drôle de choix. Tout à coup, je n’aurais su dire pourquoi – sans doute l’excitation ou quelque chose de ce goût-là – je me dis que j’avais finalement hâte d’être lundi.

Annotations

Vous aimez lire Sam Fralk ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0