Chapitre 61

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Avec une seule balle, Mercure pourrait très bien blesser grièvement Dylan et mettre fin au combat. Ensuite il s’enfuirait, et se cacherait. C’est ce que pense le docteur Harris, il ne tient pas à ce que l’un d’eux meurt, comme personne d’autre d’ailleurs.

Mais aucun ne l’écoutera, ils sont destinés à se tuer.

Intervenir, c’est aussi risquer d’être pris en cible par Dylan, si un meurtre ne le dérange pas, deux ou trois autres ne changeront rien. Il va ruiner sa vie pour une vengeance. Pour une fille. Pour une fille qu’il a déjà perdue.

Mercure et Dylan se rapprochent dangereusement de la falaise, si c’est voulu alors le rouquin va essayer de jeter le Beretta dans le vide, Dylan n’ira évidemment pas le chercher.

Encore quelques échanges de coups et de douleurs, Mercure n’est pas le premier à faiblir. L’épaule du provocateur ne tourne plus correctement du tout, elle peine faire des rotations classiques, même vers le haut ou en avant, Dylan est en partie paralysée.

« Mercure, casse-lui le deuxième bras. » Explique le Docteur Harris de loin avec une indifférence totale. Le reste du groupe lui adresse un regard stupéfait, un bras de plus cassé, après tout, ce n’est plus grand-chose dans cette histoire. Le rouquin écoute attentivement pendant que Dylan tente de le faire tomber à nouveau. Ce sont quelques secondes d’inattention qui permettent à son adversaire de ramper jusqu’au Beretta et de le reprendre en main. Mercure se retourne vivement, et frappe en plein dans le coude de Dylan avec le plat de son pied.

La fracture n’est pas mélodieuse non plus.

Dylan hurle, il se trouve juste au bord de la falaise maintenant, lui-même n’aurait pas cru s’être autant rapproché depuis le début du combat. Sa tête penche vers l’arrière. Mercure, lui, se relève, en face de son ennemi, il attend de savoir si celui-ci peut toujours bouger, car le Beretta est toujours au creux de sa main, et son doigt toujours contre la gâchette.

Avec un effort surhumain, le blessé relève le bras et vise le rouquin, il pousse des cris sauvages alors qu’il essaie de contracter ses muscles. Malheureusement, le bas se lève avec de terribles tremblements. Mercure est tout à fait prêt à éviter une nouvelle balle, ou à la recevoir à un endroit non mortel de son corps. Maintenant qu’il sait qu’il guérira de toute façon, la douleur ne lui fait plus peur.

« Ça ne se passera pas comme ça… Mercure. Peu importe ce que tu me casses, j’ai toujours la détermination pour te tuer, je me fiche que tu sois immortel ou une connerie du genre, je vais te tuer, Mercure. »
Les deux mains d’Agathe passent de haut en bas sur son visage sale, à présent, il lui est impossible d’éviter le dramatique film qui se déroule sous ses yeux. Elle n’aurait pas du tout aimé lire un roman comme celui-ci, elle se sentirait mal, elle y croirait trop fort. Et à partir de maintenant, toutes les autres histoires seront fades, peu importe la fin de celle-là. Il est encore temps de fermer le livre et de l’incendier, les premières pages lui auront tout de même déjà brûlé la tête.

« S’il vous plaît... » Murmure-t-elle alors que les battements de son cœur font écho dans son crâne.

Dylan tire, mais rien ne sort, la chambre est vide.

C’était la meilleure occasion pour que le rouquin dégaine son Colt, là, tout de suite. Tout le monde retient sa respiration. Mercure vise rapidement, et tire en plein dans la tête de Dylan.

Une autre balle est partie en même temps.

Elle venait du Beretta, dans la chambre suivante, et elle se loge dans la poitrine de Mercure. Peut-être que pour les autres, s’est allée trop rapidement, qu’ils n’ont pas eu le temps de comprendre ce qu’il s’est passé, mais tout le monde a bien entendu deux coups de feu. Le corps de Dylan est emporté depuis la tête, il disparaît dans le vide de la falaise.

La dernière balle l’a tué.

Quant à Mercure, il est forcé de faire quelques pas rapides en arrière, et de tomber par terre. Agathe a hurlé en première quand elle a vu le crâne de Dylan éclater, puis, elle a hurlé de nouveau lorsque c’est Mercure qui est tombé en arrière. Malgré les recommandations du médecin, la jeune femme se lève et court vers son amoureux. Il respire excessivement fort, tout son corps tremble et il serre sa poitrine aussi fort qu’il le peut.

Mais il n’est pas mort.

« Oh Mercure ! Non ! Je t’en supplie, dis-moi que tu vas guérir, qu’elle va se soigner toute seule, comme à chaque fois ! Tu ne vas pas mourir à cause de ça, hein ? » Elle est en pleine crise de panique, la pluie fait glisser le sang de Mercure plus rapidement et recouvre l’herbe. Il se dilue, donne le sentiment d’une quantité plus importante.
Agathe prend la main libre de Mercure, et la presse sur la première, elle ne semble pas vraiment se rendre compte de sa douleur.

« Soigne-toi ! Comme tu l’as fait quelques fois, s’il te plaît ! Pourquoi ça ne marcherait pas ? » Mais rien ne se passe.

Les deux médecins accourent à leur tour, les premières analyses sont compliquées, si Mercure retire sa main il pourrait perdre tout son sang, ils ne voient pas exactement où la balle s’est logée. Le rouquin adopte une respiration paniquée, il voudrait baisser la tête et regarder l’ampleur de dégâts.

« Ne bouge surtout pas. » lui ordonne le docteur Harris alors qu’il remonte ses manches. Ne pas avoir de gants stériles sous la main l’embête, la balle du Beretta pourrait être complètement rouillée, ou sale, d’après l’état du pistolet. Et pus, comme ça dans l’herbe et la saleté.

Du sang coule de plus en plus, il a imbibé les vêtements de Mercure, et de plus en plus, il se met à tousser.

Le docteur Harris pousse très légèrement la main de Mercure, et tâte sa poitrine par petits à-coups, bientôt, son indexe touche la lésion profonde.

La balle est en plein dans son cœur.

« Mais comment… comment es-tu encore en vie ? Comment… » Le docteur reste stupéfait, il croise le regard de son ami, celui-ci comprend immédiatement qu'une nouvelle étrangeté est en train de se produire. Mais après tout, quand il s’agit de Mercure…

« Eh… ça ne va pas ? Dites-moi ce qui ne va pas ! Est-ce-qu’il va s’en sortir ? » Les deux Docteurs aimeraient qu’Agathe s’éloigne, qu’ils puissent ausculter sans dérangements, mais la voilà déjà bien accrochée.

Mercure n’écoute plus ce qui se dit autour de lui, il n’entend plus vraiment la panique d’Agathe ou bien la stupéfaction des deux médecins. Il observe le ciel, et ressent les petites gouttes qui lui tombent sur le visage. Le ciel lui semble moins gris. Sa respiration et son rythme cardiaque ralentissent progressivement, et bientôt, il se sent apaisé.

Dylan est mort.

Mercure ne pense pas au crime qu’il vient de commettre, il ne pense plus à grand-chose et d’ailleurs, il ressent de l’espace dans son esprit, et peut-être même dans sa mémoire. Cela faisait si longtemps.

Un rayon de soleil se dégage, et vient se poser délicatement sur la peau de Mercure, il remet en valeur ses taches de rousseurs, et la clarté de ses yeux.

Le Soleil.

Mercure réouvre les yeux en grand, progressivement.

Oh, le Soleil.

Il se réchauffe graduellement, le Soleil passe dans ses veines, dans ses connexions nerveuses, dans toutes les fibres de son cerveau. Ça fait tellement du bien…. Des sons et des couleurs passent, ils font comme éclore de nouveau son cœur.

Le Soleil qui lui murmure des mots doux et des gentillesses, qui lui caresse le visage et qui le rassure.

Mercure se met à sourire.

« Agathe je t’en prie, rapproche-toi. » Chuchote -t-il par manque de souffle. Ses yeux sont sereins et amoureux. Précipitamment, la jeune femme se rapproche en lui offrant les caresses les plus angoissées qu’il ait reçues.

« J’ai quelque chose à te raconter.

— Évidemment, je t’écoute. Dis-moi ce que tu veux, je t’écoute. »

Agathe lui prend les mains, elle les presse et les frotte, hochant la tête par spasmes, et impatiente.

« Je m’en souviens. »

Les deux médecins n’ont pas l’air très enthousiaste, ils échangent une conversation mouvementée, se proposent des solutions mais n’ont encore pas plongé leurs mains dans l’abdomen de Mercure. Ils n’ont même pas pris la décision d’appeler une ambulance.

« Ma Naissance, je m’en souviens. »

Parler n'est plus aussi évident, le rythme cardiaque de Mercure est en chute libre sa tension aussi, et ses mains deviennent froides. Pourtant, le rouquin raconte un souvenir précieux à l’oreille d’Agathe, comme si tout allait bien.

« Nous n’avons pas de matériel, on ne peut pas vérifier sa tension, on ne peut pas arrêter le sang sans presser le cœur, on ne peut pas prendre le risque de l’infecter de bactérie, de tout déchirer.

— Et alors que veux-tu faire ? Son cœur va s’arrêter, il ne pourra plus respirer, il vient déjà de perdre une grosse quantité de sang, il va manquer d’oxygène.

— Une ambulance n’arrivera jamais à temps, aucun matériel ne sera notre disposition, même avec le coureur le plus expérimenté qui irait chercher à la clinique. On ne sait pas exactement comment fonctionne son cœur, on ne sait pas si…

— Johan, tu es médecin bon sang ! » Le docteur Harris lance un regard accusateur à son ami, il est même profondément déçu. L’ambiance est lourde, Johan sent même ses poignets trembler.

C’est vrai, c’est défaitiste, finalement, Mercure est toujours en vie, il pourrait toujours être sauvé, les médecins ne sont pas censés abandonner aussi facilement.

« Dans le fond, tu as sûrement raison, nous n’obtiendrons rien à temps, mais on ne peut pas laisser tomber. Mercure est un homme exceptionnel, à supposer qu’il en soit un, mais c’est aussi avant tout un jeune homme sensible. On ne peut pas le laisser tomber. » Le Docteur Willem hoche la tête. Bien sûr, et il se sent honteux. Alors ils vont le faire, tout ce qu’ils peuvent pour sauver Mercure.

Pendant qu’ils se penchent de nouveau sur le rouquin, Agathe fait rouler de grosses larmes sur son visage, tout en silence. Mercure respire toujours, il affiche une expression détendue.
«Tu es la personne la plus incroyable que j'ai jamais rencontré, Mercure, la plus douce, la plus délicate. Alors c'était évident. Tu ne pouvais pas naitre comme tout le monde, tu avais besoin de ce petit quelque chose de formidable. Tout le monde serait émerveillé face à un récit pareil, mais je pense aussi que personne n'y croirait. Moi j'y crois. Mais j'y crois parce que je t'aime pour ce que tu es aujourd'hui, pas pour toutes ces particularités incroyables. Parce que tu es toi, Mercure. Je t'aime, de tout mon coeur je t'aime.» La jeune femme a du mal à parler entre deux pleurs, entre plusieurs gouttes qui lui tombent du nez. Mercure la regarde avec amour. Les deux docteurs finissent pourtant par interrompre ce moment secret.

« Agathe, s’il te plaît éloigne-toi. » La jeune femme peine à s’éloigner, elle tente malgré tout de garder la main gauche de Mercure dans la sienne. Le Docteur Willem sort de la poche de sa chemise un des stylos qu’il emmène partout avec lui, même s’il regrette de ne pas avoir son préféré avec lui. Puis, il le donne à son ami. Aujourd'hui, Johan ne se sent pas à la hauteur, c’est parce qu’un médecin comme lui ne pourrait guérir le rouquin convenablement. Mercure a besoin d’un médecin à la hauteur de son étrangeté, un médecin qui accepte sans problème d’ajouter un peu d’imagination à ses soins.

« Excuse-moi Mercure, ça fera sûrement mal, mais je ne vais pas traîner. » Lui explique le Docteur Harris. Agathe lui serre davantage la main.

« J’aimerais introduire une fleur entière à l’intérieur de ton cœur, puis refermer avec l’agrafe du stylo. Elle pourrait peut-être… »

Lentement, la mine du stylo s’introduit dans les tissus, elle vient tâter la balle introduite dans son cœur, et la pousse doucement vers le haut.

« Ah... » Mercure frissonne, ses doigts ont des spasmes, et sa voix produit de faibles gémissements de douleur. La jeune femme près de lui plaque sa main libre sur sa bouche, comme pour se retenir de vomir, pourtant, elle ne s’empêche pas de regarder. Quand la balle est extraite, le Docteur Harris la jette violemment derrière lui, cette monstruosité restera confondue dans l’herbe, et absorbée par l’étendue de fleurs jaunes.
Qu’elle disparaisse.

Le sang continue à s’échapper, mais de moins en moins. Le Docteur Harris essaie de dissiper les amas de sang qui gênent une possible fermeture des tissus, c’est la vésicule droite qui a été percée. C’est une expérience formidable et intimidante à la fois, le docteur touche du doigt un cœur qui bat. Il cherche à réunir les deux extrémités disséquées, il pourrait les réunir avec l’agrafe du stylo en attendant des soins hospitaliers, Mercure est très faible, mais toujours bien vivant. Spectaculaire…

Le jeune homme éloigne soudain la main du Docteur Harris, et son stylo.

« Je t’ai fait mal ? » S’inquiète Matthew naturellement. Mercure tousse, il ne cesse pas sourire.

« Il va bientôt s’arrêter. Lui, et tout le reste. Docteur, ne prenez pas la peine... »

C’est une demande choquante pour le groupe. Si Mercure ne les laisse pas intervenir, il va mourir. Ils se sont sans doute laissé endormir par la mort très ralentie du rouquin comparé à quelqu’un de normal, qui n’aurait même pas eu le temps de se rendre compte de la douleur. Il serait mort une ou deux secondes après que la balle se soit confortablement installée dans son abdomen.

« Mais Mercure… laisse-moi faire, s’il te plaît, tu es épuisé, tu ne penses pas ce que tu dis.

— J’ai froid aux doigts, à la tête, et, tout ce qui n’est pas à moi. » Les battements de son cœur ralentissent à vue d’œil maintenant, et le Docteur Harris les sent en palpant la main de Mercure.

« Mercure, que veux-tu dire…

— C’est mon père qui me l’a dit. » La stupeur est de mise. La lumière du soleil se couche sur sa rétine, quel bonheur il a dans les yeux. Agathe, elle, ne peut pas s’empêcher de se remettre à pleurer. Elle se frotte inlassablement les yeux, peu importe les saletés qu’elle peut s’étaler sur le visage.

« Est-ce que ça veut dire que tu te souviens de…

— Il me rassure, il me dit que ça va aller maintenant. Je m’en veux tellement de l’avoir oublié. » Il n’est presque plus possible de l’entendre parler. Les deux docteurs s’échangent un regard, ils se remémorent tout ce que le rouquin a pu leur expliquer à propos de ses souvenirs, et c’est la première fois qu’ils prennent connaissance d’un membre de sa famille. Un père. Mais le Docteur Harris ne peut pas croire à ça. Ou pas de façon normale. Le rouquin n’a pas quitté le Soleil des yeux une seule fois, depuis tout à l’heure.

Mercure caresse les doigts d’Agathe avec le peu de force qu’il lui reste, une interaction presque figée, la jeune femme a le sentiment de sentir les doigts d’une statue.

« Mercure je ne veux pas que tu t’en ailles… tu vas me manquer, je ne veux pas rester sans toi. On devait passer notre vie ensemble, on devait avoir plein de projets et ne jamais se séparer.
— Pardonne-moi… Agathe, je t’aime tellement. » La jeune femme se rapproche de Mercure, elle voudrait s’allonger près de lui et lui caresser le visage. Il n’écoute plus ce qu’on lui dit, il ne voit plus, sa peau devient pale petit à petit.

Plus rien ne bat.

Agathe pleure à torrent, Monsieur Ford à la mâchoire qui tremble. Le Docteur Willem passe une main sur son visage, résigné, tout ce qu’il s’est passé… Quant au Docteur Harris, il observe le visage de Mercure comme une œuvre d’art. Ses yeux sont des miroirs, la lumière se baigne dedans, ils sont bien plus qu’un reflet. Il voudrait tâter son cœur une dernière fois, pour être sûr, qu’il ne fasse pas une erreur monumentale, mais il n’y a rien à faire. Alors, il se penche dans l’herbe et cueille plusieurs fleurs jaunes. Il les équeute sensiblement, et les dispose délicatement dans le cœur de Mercure. C’est la beauté dont il mérite.

Mercure est mort.

***

Ils ont fait le choix de n’appeler personne, d’être discret. Mercure ne mérite pas d’être enterré dans un cimetière commun, puis d’être oublié dans un petit siècle quand plus personne ne se souviendra de lui.

Non, il mérite d’être tranquille. Le silence absolu qu’il appréciait, il n’en profitera nulle part ailleurs que chez lui.

Le Docteur Harris demande à Monsieur Ford de porter Mercure délicatement, pour ne pas abîmer son corps davantage, et de le transporter jusqu’au fond du Terrier. Ils demandent à Agathe de ne pas les suivre. Ensemble, ils reconstituent le meilleur nid de fleurs qu’il est possible de faire, il faut que Mercure soit bien au chaud à l’intérieur. Quand le rouquin est bien installé, le Docteur Harris prend le soin de nettoyer son visage, et le maximum de sa poitrine. Il compose par-dessus un magnifique bouquet, comme si le cœur de Mercure avait éclot. L’emballement est un art, le Docteur Harris n’a pas de mal à le pratiquer avec ce qui lui passe sous la main, surtout avec des fleurs aussi jolies que celles-ci.

C’est terminé. Mercure est prêt à reposer pour l’éternité. Les deux hommes adressent une dernière pensée au rouquin, ils s’excusent pour tout ce qui a pu se produire, tout ce qui a pu lui faire du mal, et lui promettent la paix dorénavant. Maintenant, il faut sortir. Ils rejoignent l’extérieur, et décident de déplacer à deux le plus gros rochers des alentours, afin de condamner l’entrée du Terrier, et ainsi, en faire un sanctuaire.

Agathe se sent mal, ils sont en train de l’enfermer, elle ne le verra plus jamais. Tous ensemble, ils observent le Soleil se poser sur la porte infranchissable du Terrier. Elle est si éclatante que les fleurs qui jonchent le sol n’ont jamais été aussi lumineuses.

« Peut-être que son corps ne se décomposera jamais, il est protégé ici. » Essaie de la rassurer le Docteur Harris. Monsieur Ford frotte chaudement l’épaule de sa fille.

« Au revoir, Mercure. » Chuchote le grand barbu, avec une larme à l’œil. Agathe n’y arrive pas, elle reviendra plus tard lui dire adieu, quand elle sera en pleine possession de ses émotions.
« Et… pour les études, qu’est-ce qu’on fait, Matthew ?

— On les cache. Personne ne mérite de savoir tout ça, elles appartiennent à Mercure et plus jamais qui que ce soit devrait en profiter. Ces connards, ils seraient capables de venir le chercher pour l’ouvrir. Alors on ne dit rien. On ne sait rien.

— Je comprends. » Le Docteur Willem serre contre lui le carnet qu’ils avaient remplie, il ne sera lu par personne dorénavant.

Pour ce qui est de Dylan, le groupe décide d’appeler la police.

Avant de partir, Agathe se retourne. Elle ne sait plus quoi penser. La tristesse inonde ses pensées, elle était persuadée de pouvoir soulever le monde pour lui, de partir aussi loin qu’il le fallait pour le tenir hors de danger. Pourquoi serait-elle spéciale ? Après tout… elle regrette d’avoir balancé son téléphone, d’avoir perdu toutes les photos, de ne pas l’avoir dessiné encore plus, de ne pas avoir fait l’amour avec lui davantage. Ses souvenirs matériels sont maigres, mais Agathe à conscience que sa mémoire à elle est intacte. Elle conservera jusqu’à la fin de sa vie le moindre souvenir de Mercure, elle les chérira et y pensera chaque jour.

Chaque nuit, elle lui montrera les étoiles du monde une par une, elle lui racontera ses journées, ses idées, lui transmettra ses peurs et ses angoisses. Elle vivra comme s’il était toujours intimement avec elle. Que quelqu’un se souvienne de lui le plus longtemps possible.

Agathe est persuadée qu’elle ne sera pas la seule, les deux Docteurs ont rencontré une personne biologiquement trop spéciale pour l’oublier, et Monsieur Ford, il se souviendra de Mercure comme un de ses enfants, probablement.

La jeune femme cueille une Fleur Jaune, qu’elle serre contre sa poitrine.

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