Chapitre 04

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Le jour venu est une angoisse dès l'aube, cruel Solstice. À peine les yeux ouverts, des hauts le cœur font trembler plusieurs parties de son corps et de ses pensées.

C'est l'été.

Mercure se réveille chez Agathe et Monsieur Ford, il se rappelle qu'hier soir elle était venue le chercher pour lui montrer sa surprise, qu'il a grandement appréciée.
 Il n'y a personne d'autre dans la chambre, en général, Agathe part courir, et pour ce qui est de Monsieur Ford, il doit déjà être parti travailler. Mercure se retrouve tout seul dans la maison.
 Il n'est pas perdu, évidemment, il s'y trouve régulièrement, mais il décide de sortir tout de même pour prendre le soleil, et ce qu'il voit le rend confus.
 Il ne voit personne. Cette rue est très passante, dès le matin le commerce est en activité. Beaucoup de gens y viennent pour acheter leurs provisions de la journée, surtout des produits frais comme le poisson ou le lait, mais aujourd'hui, personne. Aucun des commerces extérieurs n'a été installé. Mercure se retourne et cherche des yeux le moindre mouvement, il ne comprend pas.
 Le jeune homme décide d'avancer un peu et de remonter vers le centre du village, tout est pareil, le silence n'a aucun sens.
 Soudain, il voit quelqu'un avancer vers la périphérie du village. Sans hésitation il décide de la suivre même si l'interpeller lui semble compliqué.
 Cette femme rejoint un groupe de valise, de personnes qui discutent en formant un cercle, en fumant pour certains. Et ce n'est pas le seul regroupement, en fait, Mercure est abasourdi quand il voit que tout son village est réuni à la sortie principale, tous avec leurs bagages, animaux de compagnie, enfants.
 Le Maire est présent, et il ouvre la marche vers l'extérieur, l'ensemble du rassemblement se met à le suivre avec leurs valises.
 « Attendez... vous partez tous ? » Il se décide enfin à leur adresser la parole, plusieurs personnes se retournent.
 « Désolé Mercure, on préfère partir pour l'été.
 — Quoi... tous ? » Une sorte de stress s'empare de lui, une terrible envie de se gratter le dos des mains le prend. C'est alors qu'il voit Agathe et Monsieur Ford dans le groupe. Son visage se décompose.
 « Agathe... tu avais dit que tu resterais pour l’Été !
 — Je ne voulais pas mais Papa a décidé qu'on ne resterait pas cette année, je suis vraiment désolée. » Agathe est embarrassée, elle fuit du regard, cherche un moyen de s'expliquer alors que Mercure se sent quelque peu trahit.
 C'est la première fois, que le village entier s'en va.
 « Ne t'inquiète pas, ça passera vite ! Nous seront revenu bientôt.
 — Excuse-nous Mercure. » Dit Monsieur Ford sans sourire en posant sa main sur l'épaule de sa fille pour l'emmener avec lui suivre le groupe.
 « Mais... vous me laissez seul... complètement seul...
 — Il est impossible de vivre ici en été, rien ne pousse à cause de la chaleur, on ne pourra pas alimenter le village très longtemps, la sécheresse détruit nos terres. » Explique un des hommes avec regrets.
 « Ce n'est pas contre toi Mercure. » Enchérit une femme. À présent, c'est de la détresse qui prend le contrôle en voyant tous ces gens s'éloigner vers les routes de campagne, près des champs qui souffrent d’ores et déjà de la sécheresse. Rien ne les retient. Seule Agathe se retourne, elle voit Mercure, au centre de l'avenue, seul au milieu de rien, l’absence de mouvement et le silence. Avec un visage désolé, elle va de l'avant, les yeux baissés vers le sol.
 « Vous me laissez tout seul... » Sa voix s'étouffe et le voilà dans l'obligation de se frotter les yeux.
 L'année dernière, plusieurs familles sont parties pour l'été, pour Juillet et Août pour la plupart, d'autres partaient dès Juin et ne revenaient que pour Octobre. En cette période, le village était calme, mais ça n’empêchait pas le bruit de la mer de se dissimuler derrière les rires des enfants en vacances sur la plage.
 Mercure observe les vagues, qui lui paraissent violentes, et le ciel, comme s'il était gris pour la première fois. Aucun chalutier n'est en mer, personne ne s'occupe d'allonger le pont pour accueillir les marins et leurs prises du jour, aucune manutention. Pas de son de cloche, pas de chants, pas de poissonniers sur le port.
 Mercure ne se souvient pas avoir beaucoup vu la pluie au cours de sa vie, aujourd'hui il ne pleut que dans ses yeux.

***

Après quelques jours déjà, le village n'est qu'une image grise et figée, où le temps ne passe plus, où il fait chaud à en crever.
 Ce n'est pas la mort qui règne, mais bien le vide et tout ce qui n'a pas de sens, l’existence n'a pas lieu d'être dans un environnement qui ne lui convient pas. Mercure se sent comme quelqu'un de perdu qui ne sait pas où trouver sa place, qui vraisemblablement, ne se trouve pas parmi quiconque.
 On lui répète inlassablement les mêmes choses, Tu n'es pas méchant Mercure, ce n'est pas contre toi, mais tu rends nos vies compliquées. Et c'est vrai, la vie est compliquée.
 « Tu as une très jolie couleur de cheveux Mercure, j'aime tes taches de rousseur Mercure, tu es un beau garçon Mercure. » « Mais tu nous gênes Mercure. »
 L'été s'annonce long, Mercure se résigne à rentrer chez lui et attendre de quelque façon que ce soit que les villageois reviennent dans deux ou trois mois. Il ne sait rien, il cherche à imaginer où peuvent-ils bien être partis, dans quel village, très loin ? Chez de la famille peut- être ? Ou bien pas du tout. Il n'a que sa tête pour s'occuper lorsqu'il est seul.
 Il s'ennuiera dans le vide et pendant longtemps cet été.

C’est sans compter sur l'arrivée accidentelle du Docteur Johan Willem au village demain matin.

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