Partie XII

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Découvrant de ses doigts la peau dénudée de son partenaire, Eddy constata que finalement, cette même texture de peau qui était la sienne s'avérait être très agréable au toucher, les grains de beauté ne se percevant pas, ou si peu.

Se plaquant tout contre Isidore, le châtain en profita pour le caresser, glissant ses mains entre leurs deux corps ou bien entre le mur froid et la peau tiède et ferme du brun. Ce dernier en faisait de même, allant jusqu'à palper consciencieusement l'arrière-train toujours vêtu de son partenaire.

— J’ai chaud... soupira l'aîné, d'une voix extrêmement basse.

Eddy sourit, tout en entreprenant de se débarrasser du pantalon d'Isidore. Il fit d'une pierre deux coups et ôta à son invité vêtement et sous-vêtement.

Contemplant la nudité de son amant, Eddy commença à se sentir gêné malgré l'envie du moment. Peut-être que... quelque chose lui disait… insistait… sur le fait qu'ils allaient bien trop vite et qu'il aurait fallu se poser un instant pour cogiter. Baste ! L’excitation aidant, la réflexion devenait l'ennemie de l'Homme. Ce n'était pas le moment de réfléchir. Il se colla de nouveau au brun, dont une légère gêne transparaissait aussi. Rien de bien étonnant, ils étaient tous deux novices.

— Moins chaud ? demanda alors le plus jeune en soufflant dans le cou de son invité, qui frissonna.

— Oui. Non. C’est pire… je crois… répondit Isidore en allant mordre affectueusement l'épaule de son hôte.

— Tu fais moins le malin quand t'es à poil, constata Eddy, ravi, en caressant distraitement les parties du corps d'Isidore nouvellement dénudées.

— Tu sais ce qu'on dit : « un homme en chaussettes est un homme habillé », alors je ne suis pas nu, répliqua malicieusement le brun en s'attaquant au pantalon du plus jeune.

— Et voilà ! On a l’air tout pareil ! s’exclama joyeusement l'aîné, une fois le méfait accompli.

Tous deux gloussèrent en jetant un coup d'œil à leurs pantalons et compagnie, paralysant leurs chevilles. Effectivement, ils avaient l'air stupide. S'accrochant l'un à l'autre, ils libérèrent leurs chevilles emprisonnées et allèrent s'appuyer contre un nouveau pan de mur. Cette fois, ce fut Eddy qui se retrouva acculé contre la surface dure, la fraîcheur de la paroi le faisant sursauter.

Chaussettes aux pieds donc toujours dignes, ils reprirent — où ils les avaient laissé —, caresses et baisers.

Isidore, avide de nouvelles expériences, se chargea de taquiner de ses doigts les tétons d'Eddy ; qui de passablement endormis s'en trouvèrent vivement dressés.

La tête rejetée contre le mur, les yeux rivés au plafond, le châtain savourait ces attouchements. Semblant sans craintes, les doigts du brun descendaient le long de son corps, s'arrêtant sur ses muscles abdominaux qui se contractaient à la fois d'une anticipation attendue et d'un malaise contenu. Puis les mains de son invité glissèrent ensuite vers son nombril, qui se trouva finalement laissé pour compte.

N'y allant pas spécialement par quatre chemins, Isidore effleura alors de ses mains baladeuses la queue partiellement tendue d'Eddy, qui se trémoussa légèrement en soupirant face à cette bien agréable surprise. Encouragé, le brun agrippa pleinement l'objet en question, le traitant comme il lui arrivait parfois — un peu plus souvent que parfois — de traiter le sien.

Attrapant le visage d'Isidore entre ses mains, Eddy l'embrassait férocement, animé d'une nouvelle excitation un peu plus intense. Ragaillardi par le bel effet de sa hardiesse, le brun mordit les lèvres du plus jeune et déposa ensuite ses baisers sur le cou du châtain, descendant lentement le long de son corps.

Le châtain s'en léchait les babines, d'autant plus qu'il pensait deviner ce qu'Isidore avait derrière la tête, ce qui était bien loin de lui déplaire. Comme il s'en doutait, le souffle du brun se fit sentir sur sa queue. Avant qu'il n'ait eu le temps de soupirer de contentement, l'aîné engloutit sans préambules ce qu'il avait sous les yeux.

Eddy en gémit de surprise, glissant par réflexe une de ses mains dans les cheveux courts et décoiffés d'Isidore ; l'autre main contre le mur lui offrant un appui supplémentaire.

Aucun doute sur la chose : son invité ne savait pas vraiment y faire, en comparaison avec la relation la plus longue d'Eddy ; une de ses voisines, la seule avec qui il avait couché et eu l'occasion de faire quelques galipettes.

Il ne savait donc pas y faire, dans le sens où il cherchait la technique la plus adaptée pour donner le plus de plaisir au châtain, s'éparpillant et se trouvant un peu partout à la fois. Le résultat y était, Eddy n'avait jamais autant apprécié cette caresse. Le fait qu'Isidore soit lui-même devait aussi aider à ce constat.

Des soupirs et une respiration lourde animaient le plus jeune et démontraient à Isidore qu'il se débrouillait plutôt bien. Ce faisant, la caresse produisant son effet et Eddy perdant de plus en plus ses moyens, le brun se démena de plus belle. Tant et si bien que le châtain sentit qu'il arrivait au bout de sa résistance.

— Stop ! gémit-il en tirant par les cheveux la tête d'Isidore, le délogeant.

Surpris par la brutalité de la chose, le brun ne put qu'observer — d’un air ahuri, la bouche luisante et entrouverte — le sperme jaillissant qui alla s'écraser sur le sol, passant à deux centimètres de son oreille. Puis il éclata de rire.

— Merci de m'avoir prévenu, pourtant t'étais à deux doigts d'avoir l'occasion de m'intoxiquer ! chuchota-t-il malicieusement.

En réponse, Eddy sourit en observant Isidore, toujours à genoux devant lui. La main du châtain caressant délicatement la joue du brun, Eddy soupira néanmoins à la vue du sol taché de sperme.

— Putain, j'ai tout dégueulassé, ronchonna-t-il, tandis qu'Isidore se relevait et plaquait son corps nu tout contre le sien.

— On s'en fout, on nettoiera après, répliqua l'aîné en embrassant le plus jeune.

Son hôte laissa faire sans entrain, retrouvant doucement son esprit rationnel, puisque l'excitation s'était envolée. Ce résidu de lui-même, grouillant de bestioles, s'étalant par terre à mesure qu'il se liquéfiait de plus en plus n'était pas pour lui plaire. De plus, ses inquiétudes revenaient et il hallucinait de s'être laissé sucer par Isidore — mâle et voisin pénible de son état. Créature qu'il ne connaissait que depuis quelques jours, dont il avait pourtant une opinion peu brillante, qui était plutôt moche à ses yeux et qui visiblement, attendait un certain retour des choses qu'Eddy ne se sentait absolument pas en mesure d’offrir.

La respiration évocatrice d'un être toujours excité, Isidore fixait Eddy de ses yeux vifs et actuellement emplis d'un désir certain. Les joues légèrement rouges de l'effort accompli, accompagnées d'un zeste de gêne, agrémentaient son petit sourire facétieux. Eddy réalisa néanmoins qu'il lui trouvait malgré tout un charme indéniable.

— J’ai envie de toi... chuchota Isidore à l'oreille du châtain, en l'enserrant dans ses bras.

Le sexe du brun — dur comme un poteau —, était coincé entre leurs deux corps, et le châtain le sentait frétiller contre son ventre.

Eddy songea précipitamment à ce qu'il faisait ici, dans cette situation pour le moins incongrue, et à son absence de gêne apparente. Il eut quelque peu honte d'apprécier autant l'instant et de n'avoir aucun problème à l'idée de tripoter un garçon — Isidore, de surcroit.

Pour sûr, il y avait déjà quelques années qu'il avait compris où allaient ses préférences. Il avait eu le temps de s'y faire, de s'y préparer. Le seul point l'emmerdant véritablement, c'était le reste du monde et le fait qu'il s'était dit que tant qu'il ne franchissait pas le pas, il restait innocent ; ou bien de supposer que s'il essayait, il n'aimerait pas. Maintenant, le mal était fait. Il avait essayé et il aimait ça. Il avait envie d'Isidore et se projeter avec lui dans un futur proche lui semblait une chouette perspective. C'était ses volontés, ses envies viscérales, mais il sentait que l'histoire ne pouvait pas durer, que ça poserait bien des problèmes et que l'un comme l'autre ne trouveraient aucun terrain d'entente.

En attendant, Isidore avait toujours chaud et il attrapa une des mains d'Eddy, qu'il posa sur sa queue tendue.

— S’il te plait... marmonna-t-il en ondulant tout contre le châtain.

Tout à ses réflexions, le plus jeune embrassa lentement l'aîné et se détacha de lui, s'éloignant de plusieurs pas.

— Désolé. J'peux pas là, dit-il simplement, culpabilisant à l'idée qu'il appréciait vraiment trop ce qui arrivait et que si les autres apprenaient qu'il aimait ça, ils risquaient de le considérer différemment, d'une manière plutôt méprisante ; s’il en croyait ce qu'il voyait de part le monde.

Il évita d'observer Isidore, chez qui le moindre ersatz d'excitation avait disparu.

— J’ai fait quelque chose qu'il fallait pas faire ? demanda ce dernier, livide.

— Non, c'est moi. J'ai pas envie, désolé. Ce serait mieux que tu retournes chez-toi, là, tout de suite, répondit Eddy, extrêmement mal à l'aise.

Un silence des plus lourds s'engagea. Fixant le sol, Eddy jugeait préférable de ne pas avoir à subir les foudres d'Isidore. Mieux valait qu'il s'en aille et que cette fichue histoire prenne fin dès à présent. Après tout, ils n'avaient rien à faire l'un avec l'autre, et puis le châtain savait qu'il ne pouvait pas se permettre de saisir cette opportunité. Sa vie sociale en dépendait et à ses yeux, elle était bien plus importante qu'une quelconque vie amoureuse.

Le temps refusait de s'écouler à une allure décente et la scène se profilait un peu trop longuement aux yeux du plus jeune. S'en était presque insupportable. Finalement, l'hôte sentit Isidore remuer lentement mais il ne lui accorda toujours aucun regard. Le bruit du sac plastique perça le silence et Eddy s'en sentit d’autant plus peiné. Le brun ouvrit la porte et quitta la pièce sans un mot, ce qui paniqua le châtain — Isidore était du genre bavard, et il n’était pas vraiment convaincu qu’il partirait sans faire de vagues.

Enfilant rapidement ses vêtements éparpillés sur le sol, Eddy quitta promptement la pièce. Descendant les escaliers au pas de course, il retrouva Isidore dans son salon, qui avançait vers la fenêtre donnant sur le jardin arrière ; celle-là même que le plus jeune lui avait fait franchir la veille pour quitter la maison en toute discrétion.

Marchant derrière le brun, Eddy, plus que perplexe, se décida à briser le silence.

— Tu devrais enfiler tes vêtements, tu sais, marmonna-t-il en jetant des coups d'œils partout dans la maison.

Isidore ne répondit pas, avançant toujours, tête baissée, serrant contre lui le sac plastique contenant toutes ses affaires — chaussures comprises — entièrement trempées. Il n’était vêtu que des chaussettes d’Eddy.

Sans mot dire, le châtain le suivit, interloqué par le comportement loufoque de son invité.

Arrivé près de la fenêtre, l'aîné l'ouvrit et lentement, prudemment, il enjamba comme il put le chambranle. Quelques bons mètres derrière lui, Eddy le regardait faire, plus gêné que jamais.

— T’es ouf, réagis pas comme ça, ça sert à rien de faire ta pétasse vexée... Imagine quelqu'un te voie à poil en plus ! Puis tu vas pécho la crève, fait pas chaud dehors... dit le plus jeune d'une voix calme tandis qu'intérieurement, le stress et la culpabilité gagnaient de l’ampleur.

Le brun ne pipa mot, une fois encore. Fatalement à l'extérieur, il se trouva alors un bref instant face au châtain. Les lèvres tremblantes et les yeux bien trop brillants, il lui tourna finalement le dos et s'engagea dans le bois, de sa démarche particulière ; sa peau nue et trop pâle tranchant avec l'environnement, sa minceur et ses tremblements évidents donnant l'impression qu'il était une créature des plus fragiles.

Eddy ferma la fenêtre et le regarda partir en déglutissant, un air coupable imprimé sur le visage. Pourtant, il n'avait aucune raison d'avoir des remords : il avait agi au mieux pour tout le monde, de façon responsable. De toute évidence, qui pouvait bien avoir envie de sortir avec un idiot capable de se balader dehors nu par un temps pareil ? Non, décidément, les excentriques, il n'aimait pas ça. Ce n'était pas pour lui.

Sur ces sages pensées, Eddy tourna le dos à la fenêtre.

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