Chapitre 12 - 940 -

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Le temps passe et l’orage autour de l’affaire de Lucinda a l’air de se calmer. Loran et Bastian ne lui adressent plus la parole, mais après les supplications de la jeune fille, celle-ci semble demeurer dans sa caravane sur le terrain. Je ne pose de question à personne et ne me soucis plus d’elle.

Tandis que je dors à poings fermés, quelqu’un tambourine à ma porte comme un sauvage. À l’extérieur mes chiens aboient, mais ne paraissent pas particulièrement agressifs, ils doivent connaître l’individu matinal, car il est encore tôt, à peine sept heures. Je n’ai presque pas fermé l’œil cette nuit, je me suis affairé à trouver des solutions pour une commande complexe. Autour de moi, mes notes sont toutes éparpillées.

— Scar, lève-toi ! hurle Paco.

Ce n’est pas dans ses habitudes de venir ainsi au lever du jour. Je me redresse en espérant qu’il ne se passe rien de grave, puis je pose les deux pieds à terre tandis que je me coiffe vite fait d’un coup de main.

— Scar, ouvre !

Cette fois, c’est la voix de Tito qui insiste. Mes deux frères ont pris la peine de se déplacer, cela n’annonce rien de bon. Je bondis du lit et sans m’habiller ni de ramasser mes papiers, je déverrouille la porte de la cuisine.

Finalement, je découvre que Picouly est également présente, ses yeux sont rouges et je suppose qu’elle a pleuré. Mon sang ne fait qu’un tour, je suis inquiet et questionne sur le champ ce qu’il se passe.

— On peut entrer ? demande Paco.

Je lui indique d’un geste de la main que la voie est libre, puis je récupère un pantalon resté dans le couloir pour l’enfiler rapidement. La première idée qui me vient à l’esprit est Lucinda. Merde, j’espère que cet imbécile de Bastian ne lui a pas fait de mal. Je n’étais pas amoureux de la jeune fille, mais je ne souhaite en aucun cas qu’il lui arrive quelque chose. Je suis même soudain assailli de remords et je m’en voudrais jusqu’à la fin de mes jours si tel était le cas.

Pendant que je m’habille, mes frères et sœur se sont installés dans la cuisine autour de la table. J’allume ma cafetière et me tourne vers eux pour les interroger à nouveau :

— Y a un problème ?

Picouly agite la tête et soupire, puis elle remonte une mèche de cheveux qui lui tombe sur le visage avant de faire signe à Paco de parler.

Il pince ses lèvres, se gratte la gorge et annonce :

— Belinda a accouché !

— D’accord !

Je suis soulagé. Lucinda va bien, c’est l’essentiel. Je n’étais pas au courant que l’accouchement de Belinda était prévu pour maintenant. Je ne m’occupe pas de ces affaires. Je ne sais pas vraiment quoi dire, cela ne me fait ni chaud ni froid. Je ne me sens pas concerné par la nouvelle et surtout, je ne comprends pas pourquoi ils sont venus à trois me l’annoncer.

Je me tourne vers la cafetière qui est désormais brûlante. J’ouvre un placard au-dessus de moi pour attraper des verres et propose du café.

— Je veux bien, acquiesce Tito.

Je pose une tasse devant lui, ainsi que la boîte à sucres.

— Moi aussi ! confirme Paco.

Je sers les cafés et m’assois avec eux. L’envie de fumer commence à se faire sentir, je saisis le cendrier à côté de moi. Picouly m’envoie en regard désapprobateur, elle n’aime pas quand je fume dedans, mais se retient de commenter.

Tito avale sa tasse d’un trait, je n’ai jamais compris comment il pouvait boire aussi chaud. Il la repose et me lance :

— C’est un garçon !

Je reste de marbre, le sexe ne change rien. Je n’ai pas souhaité ce mioche et je n’en veux toujours pas. Pour que les choses soient claires, je finis par dire :

— Cela ne me concerne pas !

Paco échange un coup d’œil avec Picouly qui prend enfin la parole :

— Bien sûr que cet enfant te concerne, Scar. C’est ton fils et maintenant tout le monde le sait ! Il a ta tâche de naissance au front !

Aussitôt par réflexe, je porte ma main à mon visage et caresse du bout des doigts la trace qui m’a tant fait complexée plus jeune.

— Bastian est fou de rage ! Il a failli tuer la sage-femme quand elle lui a apporté le bébé. Maintenant, il veut répudier Belinda !

J’accuse le choc, à la fois surpris que cette révélation se fasse si vite, mais satisfait que ma vengeance tombe enfin.

— Loran a sorti le fusil pour te faire la peau quand il a appris la nouvelle, les cousins sont en train de le calmer.

J’ai volé à Loran et Bastian la dernière chose qu’il leur subsistait : leur fierté, leur descendance, leur honneur. Je suis soudain pris d’un fou rire devant ce coup du sort, ce bambin qui naît avec mes gênes, ma marque.

— Tu vas faire quoi ? m’interroge Tito.

— Rien !

Mes plans ne changent pas, je les condamne à vivre avec ce gosse sous les yeux pour leur rappeler chaque jour qui je suis, qu’il faut se méfier de moi, que je vais tout leur dérober, qu’il ne leur restera rien que la douleur.

— Mais Belinda ?

— Ce n’est pas mon problème !

Je coupe court à la conversation en me levant pour aller fumer à l’extérieur.

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