Chapitre 10

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   Les fines gouttes scintillantes de pluie viennent s’écraser sur le sol crasseux dégageant une odeur de béton mouillé. Un faible faisceau de lumière grisaillant m’éclaire alors j’avance dans la pénombre. L’écho de mes pas rompt le silence pesant et glaçant. Mon rythme cardiaque se met à s’accélérer en me rendant compte que je ne suis pas seule. Je ne puis l’expliquer, mais je sens qu’on m’épie. J’ai cette sensation que quelque chose se rapproche de moi.

Prise de vertige, je ne peux avancer, je me retrouve obligée de prendre appui contre la brique du mur. Je jette des regards aux alentours, mais il n’y a rien à part l’obscurité. L’air se rafraichit et le peu de chaleur de mon corps qui me reste disparait. Ma nuque se met à frissonner, il est derrière moi. Le souffle court je tourne doucement la tête.

Je fronce les sourcils en ne voyant personne. Terrifiée, je me retourne et fait face au visage fermé de Kieran. D’un geste rapidement il plaque ses doigts sur ma bouche et me bloque brutalement contre le mur. Ses iris d’encre noirs plongent dans les miens enlevant toute ma peur. Il retire sa main qui empêcher le moindre cri de sortir et caresse avec une extrême douceur ma joue.

Son pouce m’ouvre lentement la lèvre tout en s’approchant ; la chaleur de son corps m’enveloppe. Ma peau glacée devient brûlante. Le temps semble s’arrêter, la pluie s’immobilise, lui rendant impossible de venir s’écraser sur le pavé. Un silence terrifiant remplace le bruit incessant de l’averse. Soudain, un son métallique résonne à une telle intensité que l’eau retenue jusqu’à lors se met brusquement à tomber sur moi.

J’ouvre les yeux tout en me relevant lentement. Je me masse les tympans pour essayant de t’apaiser mes maux de tête. Je saisis les comprimés qui sont posés sur ma table de chevet et en avale deux. Il va falloir dans la journée que j’aille à la pharmacie, je n’ai quasiment plus. C’est presque devenu mon quotidien de me réveiller en ayant des migraines, parfois elles partent toutes seules après quelques minutes, mais la plupart du temps je suis obligée de prendre de l’aspirine.

Je finis par me lever, alléchée par l’odeur délicieuse sortant de mon four. Cloé a toujours été une excellente pâtissière comparée à moi, son brownie triple chocolat à l’éclat de caramel est le meilleur dessert que je n’ai jamais mangé, hormis la tarte au citron bien sûr.

— Tu te réveilles juste à temps pour déguster mes cookies, ils viennent de terminer leurs cuissons, s’esclaffe-t-elle en déposant les gâteaux fumants sur une assiette.

— Tu n’étais pas obligé, il doit y avoir des biscuits qui trainent dans un des placards.

Ayant les idées confuses, je me frotte les yeux tout en m’installant sur l’un des tabourets pour me verser un verre de jus d’orange.

— Tu parles des trucs sans sucre au goût infâme. J’ai tenté de croquer un morceau, mais c’était tellement dur que j’aie failli me casser une dent.

— Tu n’exagères pas un peu ? répliquais-je en haussant les sourcils.

— À peine, comment peux-tu avaler ça ? S’il n’y a pas de chocolat dessus, tu ne peux pas appeler ça un gâteau. Et puis les cookies c’est rapide à faire, j’en ai fait assez pour qu’il t’en reste. Tes placards sont aussi vides que le dessert du Sahara et je ne parle même pas de ton réfrigérateur. Tu es au courant que des bouteilles d’eau et des pommes ne font en aucun cas un repas digne de ce nom. Heureusement qu’on n’a pas diné chez toi hier.

— Je n’ai pas encore eu le temps de faire les courses, j’irai les faire tout à l’heure après une bonne douche, j’ai mal partout, bâillais-je en m’étirant.

Je prends un cookie chaud et y croque un bout. Écœurée par le chocolat, je repose le biscuit.

— C’est sans doute dû au fait que tu as passé la nuit à gesticuler, j’aimerais bien savoir de quoi tu as rêvé.

— Je ne me souviens plus, mentis-je en buvant une gorgée de thé.

Comment pourrai-je lui expliquer, je ne comprends pas moi-même. Je me rappelle Kieran, de sa peau chaude et de la pluie, mais le reste est assez vague. C’est la première fois que je rêve de lui, j’avais l’impression que c’était si réel. Jamais je ne pourrai en parler avec Cloé, elle se ferait des films et me lâcherait plus.

— Ça te dit qu’on aille se promène, il fait tellement beau et il me faut absolument un sac à main.

— Tu n’as pas acheté celui que tu as, avant que je déménage.

— Si, mais il y a un nouveau de ma marque favorite qui vient de sortir. Je dois me l’acheter avant qu’il ne soit en rupture de stock et puisque le seul magasin dans les environs est à San Francisco, minaude-t-elle en me faisant ses yeux tristes.

Étant enfant, c’est grâce à cette technique qu’elle arrivait à avoir tout ce qu’elle voulait, d’ailleurs, même adolescent elle l’utiliser pour me convaincre d’aller en soirée avec elle.

— Je me dépêche de prendre une douche et l’on part, ça te convient.

— Parfait ! Je vais faire du rangement dans tout mon bazar.

J’avale le reste de la boisson chaude et me lève pour aller rejoindre la salle de bain. Je tourne le robinet de l’eau pour qu’elle chauffe en attendant que je me déshabille. Je teste la chaleur avec mon poignet avant de me glisser sous le pommeau. Je ferme les paupières et profite de cette sensation qui détend tous les muscles qui parcourent mon corps.

Je les ouvre en même temps que les souvenirs de la veille rugissent dans mon esprit. Je redoute déjà lundi matin quand je vais devoir lui faire face. Rien que d’y penser me fait mal à l’estomac. Je ne sais pas comment je vais faire si je dois changer de travail. C’est compliqué de finir le mois avec mon salaire alors si je le perds. Je vais profiter pour aller me faire rembourser le haut que j’ai acheté la dernière. Je l’adore, mais je n’ai vraiment pas le choix, heureusement j’ai gardé le ticket de caisse.

Je me lave rapidement et ferme le jet d’eau pour sortir de la douche. Je m’essuie activement et enroule la serviette autour de mon corps. J’attrape des sous-vêtements et une robe longue que j’enfile la porte semi-ouverte pour diminuer la chaleur étouffante et humide qui y règne. Je me brosse les dents puis branche mon séchoir. Je le passe sur ma glace pour enlever la buée avant de m’attaquer à ma chevelure. Je termine de me préparer et sors.

— C’est bon, tu as la salle de bain pour toi, je vais finir ma tresse ici.

— Hé ! c’est la robe qu’on a achetée ensemble cet été, me lance-t-elle en me regardant de haut d’en bas.

— Exactement, il fait si beau que je me suis dit que c’est le temps parfait pour la porter.

— Elle te met en valeur plus qu’avant, surtout au niveau de tes hanches.

— J’ai dû un peu maigrir depuis que je suis ici, songeais-je en passant mes mains sur le tissu clair.

— Je l’ai remarqué hier soir, l’air des grandes villes te va bien à ce que je vois, s’exclame-t-elle en prenant ses affaires.

— Surement murmurais-je en m’approchant de mon miroir.

— Je file à la salle de bain, je n’en ai pas pour longtemps.

Je n’avais pas fait attention jusqu’à présent, mais j’ai dû effectivement perdre un peu de poids. Avant ma poitrine remplissez le décolleté, ce n’est plus le cas maintenant.

Lorsque j’avais vu la robe d’été en vitrine, j’avais totalement flashé dessus. Sauf qu’en magasin il n’y avait pas ma taille, j’ai dû acheter celle au-dessus, bien qu’elle fût plus serrée au niveau de mes hanches. Au moins, ma perte d’appétit a un avantage.

Je fais ma tresse d’un geste rapide et attrape ma ceinture en daim qui pend dans l’armoire. J’en profite pour ranger le haut dans mon sac. Je sors mes talons compensés de leurs boites et les chausse au moment où la porte de la salle de bain s’ouvre sur Cloé qui est apprêtée avec goût. Elle a le don de s’habiller avec élégance et surtout de mettre ses atouts en valeur.

Lorsqu’on était enfant, j’étais ce qu’on appelle vulgairement, un garçon manqué. J’adorais jouer dans l’herbe à me salir mes vêtements. Je détester me brosser les cheveux, pour moi c’était une perte de temps. Je me cachais, obligeant ma mère à me chercher dans toute la maison. Elle arrivait chaque fois à me trouver aisément, mais c’était notre rituel du matin. Dès qu’elle mettait la main sur moi je la laisser me coiffer, mais pas avant. Elle se désespérer de pouvoir me contempler avec une robe un jour, tout le contraire de mon père.

Il s’amusait à me voir être plus forte que certains garçons de mon école. D’ailleurs, c’est lui qui m’a poussée à faire du hockey sur glace pour me canaliser. Pendant huit ans, j’étais l’une des meilleures de mon équipe. J’ai fini par arrêter lorsque je me suis fracturé le radius en courant avec Cloé dans le parc. J’ai raté une des marches, ce qui a définitivement mis un terme à ma passion. J’ai passé l’été avec un plâtre, heureusement que Cloé était là pour me remonter le moral.

Elle m’a entrainée faire les boutiques quasiment tous les jours pendant les vacances, sans parler des soirées. C’est pendant l’une d’entre elles que j’ai embrassé pour la première fois un garçon, il s’appelait Stan. J’avais quinze ans et lui seize, l’idylle n’a duré que quelques semaines, mais j’étais sur mon petit nuage. C’est à partir de là que je me suis mise à apprécier faire les magasins, à acheter des tonnes de vêtements et me maquiller. Même si je suis fière de ce que je suis devenue, parfois je regrette d’avoir dû arrêter le hockey. J’adorais me sentir glisser sur la glace, même lorsque je n’avais pas entrainement je patiner pour le plaisir. Je pouvais y passer des heures sans m’en rendre compte. Malheureusement, cela fait des années que je n’y suis pas retournée.

— Tu es sûre que tu vas bien Camélia, me questionne Cloé les sourcils froncés.

Devant son air anxieux, je me reprends et fais mon plus beau sourire pour lui répondre. Je n’ai aucune envie qu’elle aille voir mes parents. Je n’ai pas besoin qu’ils s’inquiètent par ma faute.

— Bien sûr, pourquoi dis-tu cela ?

— Ça fait dix minutes que je parle toute seule.

— Excuse-moi, j’étais dans mes pensées, tu es prête.

— Oui, on peut partir, s’enthousiasme-t-elle en attrapant ses affaires.

Je mets la bandoulière de mon sac à main sur mon épaule et suis Cloé qui passe le pas de ma porte d’entrée. Je fais attention à bien la verrouiller et emprunte le couloir vers l’escalier. Je suis stupéfaite de la chaleur de l’extérieur lorsque je franchis le hall, c’est presque étouffant. Je suis heureuse que Cloé ait insisté pour qu’on prenne sa voiture. Je crois qu’elle a encore plus horreur que moi des transports en commun.

Sur la route Cloé s’amuse à danser avec la musique à fond et les fenêtres ouvertes. Elle se met à chanter avec enthousiaste contrairement à moi, je n’ai pas l’esprit à ça. Je regarde les passants avec morosité ne fessant pas attention aux chansons qui défile à la radio. Cloé trouve miraculeusement une place de parking à quelques mètres de la rue commerciale.

— Ça te convient si l’on va manger d’abord j’ai une faim de loup !

C’est vrai qu’il est presque quatorze heures, connaissant Cloé, il vaut mieux aller au déjeuner si je ne veux pas l’entendre se plaindre tout l’après-midi.

— Il y a un restaurant Thai à deux rues d’ici.

— Parfait, ça fait une éternité que je n’ai pas dégusté un Keng Massaman,

Je savais qu’elle dirait ça, si elle pouvait, elle mangerait de la cuisine thaïlandaise tous les jours.

— Tu n’as qu’à réserve une table, je te rejoins dans cinq minutes.

— Où vas-tu ? me demande-t-elle suspicieuse.

— Juste à côté, j’arrive dans cinq minutes.

Je ne la laisse pas le temps de répondre et je me faufile dans l’une des ruelles. Je retrouve aisément la façade du commerce et m’y engouffre. Ayant très peu de monde à l’intérieur, je me dirige directement vers la caisse. Les yeux rivés sur l’écran de son ordinateur elle met quelques secondes pour remarquer ma présence.

— Bonjour, que puis-je faire pour vous ?

— J’aimerais me faire rembourser un article.

Je sors le haut plié pour le lui tendre. Ses ongles vernis prennent le tissu pour l’examiner attentivement. Elle inspecte le moindre détail tandis que je fouille activement dans le fond de mon sac à main à la recherche du ticket.

— Est-ce que vous avez le reçu, mademoiselle ?

Désespérer je le vide presque sur le comptoir sous le regard interrogateur de la vendeuse.

— Je suis persuadée qu’il est là, balbutiais-je en essayant de faire redescendre l’énervement qui monte en moi.

— Je suis navrée, mais sans le reçu je ne peux vous le rembourser, s’excuse-t-elle en me tendant le haut.

Je commence à vouloir répliquer que je vais le trouver lorsque j’entends des sifflements de mécontentement. Jetant un coup d’œil, je m’aperçois que deux clientes s’impatientent derrière moi.

— Je comprends.

Dépiter je le reprends ainsi que le reste de mes affaires qui sont étalées sur le comptoir.

— Passez une agréable journée ?

Agacée, j’emprunte le chemin vers le restaurant. Je suis sûre d’avoir laissé le ticket dans mon sac, j’aurais dû le ranger avec les autres. Je ne pas comment je vais faire pour finir le mois si je démissionne maintenant. Je ne peux pas demander de l’argent à mes parents, cela voudrait dire que j’ai totalement échoué.

Sans grand appétit je m’approche de la terrasse du restaurant où Cloé m’attend impatiente, un verre de Mai TAI a là main. Je connais Cloé depuis suffisamment longtemps pour savoir exactement ce qu’elle commande, c’est assez simple puisque c’est toujours la même chose.

— Je me suis permis de te prendre un Mai TAI, je me suis dit que ça te fera un peu de bien. Tu as une tête à faire peur, balance-t-elle sans me regarder, préférant fermer les yeux pour profiter du soleil.

— Merci.

À peine me suis-je assise que j’avale quasiment la moitié du verre à cocktail.

— Tu avais soif, qu’est-ce que tu es partie faire ?

— J’avais un haut que je voulais me faire rembourser, mais j’ai égaré le ticket de caisse, avouais-je en buvant le reste du liquide alcoolisé.

— J’ai l’impression qu’on a échangé nos rôles, c’est moi qui suis tête en l’air d’habitude, se moque-t-elle en retirer ses lunettes de soleil.

Voyant le serveur arriver vers nous, elle se relève aussitôt sur sa chaise pour mettre ses attributs en valeur.

— Mademoiselle avez-vous commandé ? Nous demande-t-il en nous fessant un sourire radieux.

Cloé ne se démonte pas et use de ses charmes, jusqu’au moment où elle aperçoit qu’une jolie alliance orne son annulaire. Elle perd instantanément son côté enjôleuse.

— Je vais prendre un Keng Massaman, prononce-t-elle plus froidement.

Le serveur qui n’a pas l’air d’avoir remarqué le changement d’altitude de ma meilleure amie se tourne vers moi avec ce même sourire angélique.

— Et pour vous ?

— Juste une salade verte avec un deuxième verre si possible.

— Très bien, note-t-il sur son calepin avant de repartir vers une autre table.

— Depuis quand te contentes-tu d’une salade ? D’habitude, tu raffoles du Pad Thaï, s’étonne-t-elle en ne fessant plus attention au garçon de salle.

— Je n’ai pas très faim, je mangerai mieux ce soir.

— Je ne te l’ai pas dit, mais j’ai revu Dean, tu sais le mec trop canon de notre cours de philosophie, maintenant il travaille pour une agence de pub et apparemment il sera photographe. Tu y crois, alors qu’au lycée à part jouer au ballon avec ses potes…

Cloé continue de parler sans que j’arrive à l’écouter. Tout ce qu’elle me raconte me parait d’une futilité, tellement absorbée par ses phrases qu’elle ne fait nullement attention à moi. Pendant le reste de l’après-midi, ce fut ainsi. Elle s’aperçoit à peine de mon humeur maussade.

Après plus de deux heures de magasins, elle finit par me ramener chez moi. Je la salue d’un geste de la main et sors de sa voiture épuisée par cette journée. C’est d’un pas lent que je monte les marches en béton de l’escalier de mon immeuble. Arrivé au palier je remarque qu’une nouvelle fois la porte de mon appartement et entre ouvert. Irriter j’approche rapidement, mes doigts serrant fermement la bandoulière de mon sac. Avec amertume, je franchis le seuil, m’attendant au pire, je sursaute en voyant Kieran en plein milieu de mon salon. Portant un tee-shirt foncé fessant ressortir ses tatouages, ses mains sont dans ses poches et sa tête baisser. Entendant mes talons composés il la relève, ses iris noirs me fixant.

— Je le savais que c’était toi ! J’appelle la police tout de suite,

Avant que je ne puisse prendre mon téléphone, Kieran me lance un objet que j’attrape de justesse. Je fronce les sourcils en remarquant qu’il vient de me donner un couteau avec la lame pliée dans le manche. Il ressemble à l’un de ceux qu’utilise mon père lorsqu’il va en forêt. Je lève les yeux hébétés vers son regard qui m’observe attentivement.

— Tu en auras sans doute plus besoin que moi, même si la veille, tu t’en es sortie toute seule.

— Ce n’est pas parce que je suis une femme que je dois être faible !

Le voyant s’approcher, je recule en même temps le faisant sourire. Il s’arrête à quelques centimètres de moi, son parfum vient m’enivrer. J’ai du mal à garder mes pensées calmes quand il est si près de moi.

— Tu es tout sauf faible apparemment, murmure-t-il en quittant l’appartement.

Le cœur battant, je fixe l’objet froid et lourd qui repose dans le creux de ma main. Intriguée, je sors la lame noire et caresse le côté tranchant parfaitement très aiguisé. Je passe mon pouce sur les initiales gravées le manche du couteau, C. K.

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